CAMOUFLAGE DESIGN
Dans le parc naturel des Dolomites, un ancien chalet de chasse joue l’épure architecturale et le minimalisme décoratif pour mieux s’intégrer à un décor grandiose.
Sur le site d’un ancien chalet de chasse, tapi dans un parc naturel des Dolomites, un cocon tout bois met au goût du jour l’art de voisiner avec cet environnement d’exception. Entre épure architecturale et panoramas sauvages, seule la contemplation donne envie de rester à l’affût.
Depuis la piste de ski de fond qui serpente entre plateaux sauvages et à-pics karstiques, comment soupçonner que le chalet Tamersc est en planque à quelques foulées de là ? Ce n’est pas un hasard si sa concrétisation a nécessité près de dix ans, depuis la première esquisse de plan jusqu’à la dernière pose de bardage en mélèze: dans le parc naturel de Fanes-Sennes-Prags, couronné par les Dolomites inscrites au Patrimoine mondial de l’Unesco, la préservation de l’environnement est drastique. En montagnard du val Badia et propriétaire d’un hôtel dans le village de San Vigilio, Thomas Erlacher a fait preuve d’une clairvoyance aussi patiente que tenace. Loin de vouloir bâtir un château dans son fief du Haut-Adige, l’Italien a fait le voeu d’une retraite simple et moderne, en laissant carte blanche au duo d’architectes d’EM2. « De sa topographie à sa forêt, le paysage a guidé notre inspiration », se remémore Gerhard Mahlknecht, qui exerce aujourd’hui en son nom propre. En témoigne le musée de la photographie montagnarde Lumen, qui évoque un tremplin dans le proche domaine skiable de Plan de Corones. Ici, c’est un camouflage sylvestre qui a présidé à l’édification des deux bâtiments composant le chalet, eux-mêmes en dialogue formel et usuel. En extérieur, celui-ci se lit aussi dans les fenêtres rythmant la façade, lesquelles laissent place à des ouvertures horizontales dans les hauteurs. «De même que des panneaux coulissants nuancent l’éclairage en fonction du soleil, ces jours surlignés de métal noir sont à la fois austères et contemporains. Sous une apparente simplicité, ce design ingénieux module les ambiances, notamment au crépuscule lorsque l’atmosphère est éthérée. » Une pareille sophistication épurée dessine l’intérieur, où le mobilier a été entièrement intégré, à l’image de toutes les commodités requises pour un séjour quatre saisons. Dès le rez-de-chaussée, l’unité de parement est remarquable, convoquant tantôt un manteau de neige virginal, tantôt une prairie d’herbe inaltérable. Cette impression de cocon aux horizons larges se ressent dans les objets décoratifs, sélection choisie en ardoise, feutre, coton ou céramique. Seul élément de maçonnerie, un poêle inspire la même hospitalité bienfaisante, aussi fonctionnelle qu’esthétique. Dessiné par l’architecte et réalisé par des artisans locaux, cet agencement prolonge son harmonie dans l’escalier, dont la mise en lumière met sur le chemin de l’espace de nuit. Des deux chambres doubles à un petit bureau, séparées par des cloisons au double jeu, sa clarté conceptuelle ne se dément pas. « J’adore ce chalet, à toute période de l’année. Il est idéal pour randonner y compris en raquettes, skier en mode nordique ou alpin, écouter les oiseaux, observer les marmottes... Bien qu’il se trouve à une dizaine de kilomètres de mon lieu de vie et de travail, j’ai toujours l’impression de partir en vacances », partage Thomas Erlacher, entre deux assauts touristiques. Reste à guetter la vacance de cette retraite stylée, en location. Totalisant cent trente mètres carrés, elle accueille jusqu’à six personnes, amateurs sportifs ou contemplatifs de grands espaces. Attention : qui va à la chasse perd sa place !