VALLETTA 2018
Depuis toujours, le destin de Malte est lié à celui de la Méditerranée. Et la jeune génération prend de plus en plus à coeur son rôle de passeur entre les deux rives de la Méditerranée, entre Orient et Occident. Matière à réflexion pour les artistes invités de l’exposition « Dal-bahar Madwarha », « une île est ce que la mer entoure ». Avec l’installation A Straight Line through the Carcass of History, le Ghanéen Ibrahim Mahama trace une frontière glaçante dans la Pixkerija, l’ancien marché aux poissons abandonné aux courants d’air et aux convoitises des investisseurs. Pendant que Susan Philipsz nous parle avec poésie de racines, du combat pour subsister, dans les anciennes citernes d’eau, creusées par les chevaliers sous la cocathédrale. Et qu’un collectif d’artistes prolonge le débat dans les salles de classe du centre d’examen du fort Saint-elme. Pour les expositions, les fortifs, c’est fantastique ! À Saint James Cavalier, on a pu voir les photographies d’alexandra Pace pour le projet « European Eyes on Japan ». « On m’a envoyée au nord de Honshu, dans un Japon très rural, une île dans l’île qui m’a renvoyée à mon bout de chewing-gum collé dans la Méditerranée. » Alexandra représente cette jeune génération d’artistes maltais, autodidactes ou formés à l’étranger (les métiers artistiques ne sont guère enseignés sur l’île), qui a eu envie de revenir vivre à Malte. Après des années dans la mode et la publicité, elle a transformé la maison de ses grands-parents, abandonnée depuis trente ans, en lieu d’exposition, de résidence, où elle mène désormais un travail plus personnel, et a retrouvé le plaisir de créer… Ce come-back réjouissant, les institutions l’accompagnent. Avec la fougue d’un Alexander De Bono aux manettes du MUZA (Muzew nazzjonali tal-arti), qui ouvrira ses portes après l’été dans une auberge d’italie entièrement transformée. Il jubile à l’idée de faire dialoguer création contemporaine et chefs-d’oeuvre du passé. Et imagine un musée du XXIE siècle, un musée du vivre-ensemble, toutes communautés et rives de la Méditerranée confondues. « Surtout pas un sanctuaire, mais une boîte à outils pour mieux réfléchir, tenter de comprendre ce qu’est un être humain, et être plus créatif en toutes circonstances. » Que les Maltais qui ne s’intéressent pas (encore) à l’art se le tiennent pour dit : il veut, il va briser la glace !