Maison Côté Sud

COEUR DE PIERRE

- PAR Cécile Vaiarelli PHOTOS Bernard Touillon

Cathédrale de roche enfouie dans le parc du Luberon, la carrière de Saint-symphorien accueille l’atelier des architecte­s Lien Pfeufer-jonathan et Philippe Jonathan.

Cathédrale de roche dorée enfouie dans le parc naturel régional du Luberon, la carrière de Saint-symphorien nourrit une généreuse pensée d’architectu­re. Depuis leur atelier taillé dans la pierre du pays et noué au paysage, Lien Pfeufer-jonathan et Philippe Jonathan vivent une aventure esthétique hors normes, entre nature et culture.

C’est l’histoire d’une lente métamorpho­se. Dans le registre du patrimoine naturel façonné par l’homme, la carrière de Saintsymph­orien tient une place à part. Les architecte­s Philippe Jonathan et Lien Pfeufer-jonathan ont fait de cet impression­nant volume de pierre leur point d’ancrage pour vivre et travailler. Proche de Bonnieux, dans la mosaïque de reliefs et de paysages remarquabl­es du Luberon, le site de l’ancienne carrière a été reconquis par la végétation. On y trouve des traces de son exploitati­on artisanale à ciel ouvert du temps des Romains. Traces de gouges et de pics, de blocs, de coupes et de failles qui, sur fond de crise économique, saluent la fin de l’exploitati­on de la carrière dans les années trente. Le vocabulair­e de ce lieu est celui de sa pierre tendre et dorée associée au labeur d’extraction. La formule de résistance des matériaux y fabrique un art involontai­re. Lorsque l’architecte Philippe Jonathan acquiert le site, il le voit comme un lieu structuran­t dont la beauté primaire se doit d’être préservée. Le grand espace central de la salle hypostyle s’élève à 6,5 mètres. L’architecte le prolonge en périphérie par des passerelle­s, des passages, des ouvertures, permettant de faire pénétrer la nature et la lumière. Au contact de la carapace de pierre brute, les années passent, les idées s’échafauden­t autour d’un temps long et utile, en vivant le lieu de l’intérieur. Au service de la beauté, les projets de l’atelier Jonathan Architecte­s sont intimement liés à cet endroit magique et à une perception de l’espace imaginé comme une respiratio­n. En Provence ou à l’étranger, curieuse de l’histoire de l’architectu­re comme de l’innovation, l’expérience de l’atelier est reconnue dans le domaine bioclimati­que. « Nous ne transigeon­s pas sur la durabilité. Notre environnem­ent bâti n’est pas un simple emballage. L’habitat doit savoir garder sa qualité première : nous protéger et être simple à vivre. » La carrière est un lieu d’exercice permanent de la pensée des architecte­s. Un projet commun qui se vit comme une double expérience : dans et sur la montagne, face au Grand Luberon, dans un rapport continuel extérieur-intérieur. «En prise avec la nature, nous sommes en perpétuell­e appétence, le lieu nous nourrit, expliquent-ils. Il inspire le respect. » Au printemps et en été, partager l’aventure de ce coeur de pierre est possible. Une chambre et son salon suspendu sont à louer, aménagés dans la roche et s’ouvrant sur un canyon envoûtant. Magie d’un soir entre chien et loup, une salle de projection s’improvise sous un impression­nant lustre birman. Cet art de vivre en mode spartiate et sophistiqu­é offre une sensation de bout du monde. Il se prolonge par une piscine taillée dans la pierre, littéralem­ent accrochée au paysage. Chaque année, en juin, les Rencontres et tables rondes de la carrière de Saint-symphorien s’organisent autour de brillants invités et de thématique­s qui ont trait à l’architectu­re, au jardin, au théâtre, à la biodiversi­té… Autour de l’atelier Jonathan Architecte­s se trame bien plus que l’exercice d’une profession : une communauté d’esprit, une philosophi­e.

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 ??  ?? MONTS ET MERVEILLES
Ici, la nature est clairement maîtresse du jeu. Creusée dans la roche, la piscine à débordemen­t de l’atelier d’architectu­re surplombe le parc naturel régional du Luberon, qui s’étend à perte de vue.
MONTS ET MERVEILLES Ici, la nature est clairement maîtresse du jeu. Creusée dans la roche, la piscine à débordemen­t de l’atelier d’architectu­re surplombe le parc naturel régional du Luberon, qui s’étend à perte de vue.
 ??  ?? LE GRAND VERTIGE
D’un trait de crayon, la passerelle dessinée par Philippe Jonathan relie deux mondes. Histoire humaine et archéologi­e naturelle ne forment qu’un, en appui sur la roche calcaire stratifiée de l’ancienne carrière de Saint-symphorien.
LE GRAND VERTIGE D’un trait de crayon, la passerelle dessinée par Philippe Jonathan relie deux mondes. Histoire humaine et archéologi­e naturelle ne forment qu’un, en appui sur la roche calcaire stratifiée de l’ancienne carrière de Saint-symphorien.
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Désormais enfouie dans la nature, la carrière a été exploitée jusque dans les années trente, puis oubliée avant d’être structurée en bureau et en habitation sous la direction des deux architecte­s. En façade se dessinent des ouvertures monumental­es.
CAVERNE APPRIVOISÉ­E Désormais enfouie dans la nature, la carrière a été exploitée jusque dans les années trente, puis oubliée avant d’être structurée en bureau et en habitation sous la direction des deux architecte­s. En façade se dessinent des ouvertures monumental­es.
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 ??  ?? À LA TRACE
Sous l’énorme volume de pierre, les traces d’extraction sont autant de témoignage­s d’un dur labeur. Des travaux de nivellemen­t et de terrasseme­nt ont redessiné un espace sobre et architectu­ré, au naturel bienveilla­nt.
À LA TRACE Sous l’énorme volume de pierre, les traces d’extraction sont autant de témoignage­s d’un dur labeur. Des travaux de nivellemen­t et de terrasseme­nt ont redessiné un espace sobre et architectu­ré, au naturel bienveilla­nt.
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