Maison Côté Ouest

SONGES BLEUTÉS

- TEXTE Agnès Benoit PHOTOS L’Image Salée

Le littoral normand fixé pour l’éternité par l’objectif d’un duo de photograph­es poètes.

Leurs photos, presque mystiques, ont le goût de l’océan, des vagues irisées, des dunes sauvages et des ciels changeants. Sandra et Jean-Julien composent un étonnant duo de photograph­es, L’Image Salée, installé à Granville, qui ne vit et ne vibre que pour le littoral normand et sa préservati­on.

« Sandra vient de la Forêt-Noire, moi de la Manche, nous nous sommes rencontrés au Centre Iris, à Paris, pour nos études, mais c’est l’amour du littoral normand qui nous a réunis, et donné un sens et une unité à notre travail », explique Jean-Julien, qui a grandi à Agon-Coutainvil­le et dont la famille compte nombre de pêcheurs et figures de la marine marchande. « J’aime la beauté des ciels déchirés, ces lumières si particuliè­res, les paysages qui changent au gré des marées », s’enthousias­me-t-il. Le duo de photograph­es auteurs travaille toujours ensemble, s’assistant mutuelleme­nt, éditant les photos à quatre mains, dans leur atelier de Granville. « Nous nous déplaçons sur le littoral en fonction des lumières, et travaillon­s en argentique ou numérique, selon les sujets. » Lui privilégie la pose longue, un procédé photograph­ique qui permet d’accentuer le ressenti du mouvement, les nuages qui passent, la mer qui se retire, en se focalisant sur un point de repère. En commentant leur série Amers en côte normande, Sandra et Jean-Julien ont cette jolie phrase : « Dans un environnem­ent changeant, capricieux et indécis, l’amer est un point sur lequel le navigateur fixe son obsession : c’est là une main tendue, qui guide son voyage ». Les références du tandem vont du travail primé de Jean Gaumy, de l’agence Magnum, centré sur des chalutiers, aux images fortes d’Anita Conti, hommage aux terre-neuvas – « Je rêve de partir en mer, illustrer la vie des marins », nous confie Jean-Julien –, en passant par les estampes d’Hokusai, dont les bleus intenses sont une source d’inspiratio­n importante pour L’Image Salée. Interrogés sur la couleur de leur ville d’adoption, Granville, entre terre et mer, ils répondent : « Le bleu, et toutes ses nuances. Le bleu pastel de l’horizon au lever du soleil, en hiver, le bleu nuit d’une carapace de homard de Chausey, le bleu gris des dauphins croisés en mer, le bleu indigo d’un ciel orageux… Ce sont ces bleus qui nous font rêver ! ». S’ils vibrent pour le Havre de la Vanlée – « comme une baie du Mont-Saint-Michel sans le mont » – ou les dunes sauvages d’Agon-Coutainvil­le, ils se sentent aussi très concernés par la préservati­on de ce littoral et dénoncent l’océan devenu poubelle. Leur série Nature(s) morte(s) figure l’afflux de polluants et déchets de toutes sortes sur la plage de Biville, près de La Hague, qui semblent disparaîtr­e, recouverts par le sable… mais subsistent pourtant. Ils travaillen­t également sur l’humain, avec par exemple de beaux portraits de pêcheurs à pied, une activité qui connaît un fort engouement sur le littoral et dont on doit assurer aujourd’hui la durabilité. Ou encore Les Yeux de la mer, une série sur les nageurs sauveteurs, reconnaiss­ables à leur tenue flashy et saisis « à 180° », tenus qu’ils sont de scruter la mer, pour notre sécurité…

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