Construire aujourd’hui EN INTERPRÉTANT L’ARCHITECTURE TRADITIONNELLE
Dans ce projet contemporain, l’architecte Stéphane Goasmat propose une déclinaison des volumétries traditionnelles et réinterprète le mas cévenol. Les matériaux de façade restent en accord avec la pierre grise utilisée dans la région.
Qu’est-ce qui caractérise les mas traditionnels de cette partie des Cévennes ?
Les mas cévenols, comme souvent l’architecture vernaculaire, développent une grande intelligence d’adaptation au site : des volumes hauts et étroits, bâtis sur le rocher pour épargner les terres arables, une implantation rigoureusement définie par la pente, qui est aménagée en terrasses – appelées ici « faïsses » ou « bancels » –, une multiplication des plain-pied avec le terrain naturel. Architecture sobre et austère – on est ici en pays protestant –, bâtie dans une économie de gestes et de matériaux. On utilise la pierre sombre et des bois d’oeuvre de portée limitée. Dans le coeur des Cévennes et ses vallées de schiste noir, les maisons atteignent une grande abstraction volumétrique avec des murs et des toits de lauzes, construits dans un matériau unique.
Dans ce projet particulier, quels sont les principaux traits cévenols ?
La maison de Meyrannes reprend ces dispositifs majeurs de l’architecture cévenole. L’implantation dans la pente, en équerre autour d’un grand chêne, permet de disposer toutes les pièces de rez-dechaussée avec un accès extérieur sur chaque bancel (ou terrasse). Des volumes hauts et étroits, une certaine austérité. Mais elle en propose une vision contemporaine, adaptée aux besoins actuels, notamment en termes de vue et de lumière. Chaque espace cadre des vues spécifiques sur l’extérieur, assurant une qualité de lumière avec une impression d’être entouré de nature.
Quels sont les matériaux ici mis en oeuvre ?
Nous avons utilisé un matériau unique en façade, sombre et austère, qui confère à l’ensemble une certaine abstraction. Il s’agit d’un parpaing gris, hydrofuge, destiné à rester apparent. Il est produit près du pont du Gard. Utilisé dans une version texturée, il accroche la lumière rasante comme les moellons de pierre naturelle des bâtisses de la région. Les planchers constituent le second élément de composition : la sousface est réalisée avec des poutres en métal et des panneaux de bois OSB. Au-dessus, des terrasses comportant une membrane d’étanchéité sous un platelage bois ont été réalisées par les propriétaires. Les matériaux ont été choisis selon la même économie de moyens et de gestes des anciens.
Qu’en est-il du budget ?
Lorsqu’elle a été construite, en 1995, cette maison était une réponse économique. Le plus important est qu’elle offrait, à coût égal par rapport à ce qui était produit alentour, des niveaux de qualité bien supérieurs !