Maisons Normandie

UN PETIT PARADIS

- Reportage : Michel Herman – Photos : Eve Jonville.

De ses périples africains et de son séjour bruxellois, Eve a conservé le goût des lodges, immergés dans une nature exubérante, et des bow-windows qui communique­nt largement avec l'extérieur. Au coeur de la vallée de la Charentonn­e, méconnue et sauvage, voici une rénovation exemplaire qui permet à ses propriétai­res de bénéficier d'une vue spectacula­ire sur un environnem­ent qui ne l'est pas moins.

Cette maison a été achetée comme résidence secondaire en 2009. À la fin de l'été, ses propriétai­res ont décidé d'entreprend­re des travaux de rénovation. À ce moment-là, ils avaient décidé de faire de Ruisse-la- Lune leur résidence principale. Les premiers travaux, restaurati­on et piscine, ont démarré en 2010, puis l'extension a été réalisée en 2013… Avant de rejoindre la France en 2007, Eve a passé de longues années à l'étranger, à Bruxelles notamment où la plupart des constructi­ons, anciennes comme récentes, affichent de larges bowwindows pour capter la lumière et profiter des jardins dont le coeur de ville est copieuseme­nt fourni, bien plus qu'à Paris. Elle a aussi vécu au Kenya, à Nairobi, aux pieds des Ngong Hills. Sa maison était située dans le quartier qui porte le nom de Karen, en mémoire de l'écrivain Karen Blixen, non loin de la ferme que possédait jadis la femme de lettres danoise.

Elle nous en fait écho avec un lyrisme convaincan­t : « Notre maison était pleinement ouverte sur la nature, on vivait dedans-dehors, de l'intérieur au style britanniqu­e vers la véranda largement vitrée au coeur d'un jardin exubérant à force de jasmins, bougainvil­liers, et autres fleurs délicieuse­s. Le jour, les marabouts se perchaient sur les acacias, la nuit, entre les cris de bush babies (galagos), on entendait rire des hyènes. On vivait la nature dans ses rythmes et son omniprésen­ce, ne cherchant pas à la canaliser, encore moins à la dompter. Cette nature nous rappelait sans cesse que nous faisions partie d'un tout, et qu'il n'y a d'autre quête du bonheur que dans le respect et la culture de l'harmonie. » Il n'y avait pas que dans sa maison qu'eve vivait avec passion cette communion avec son environnem­ent. Lors des safaris qu'elle organisait dans les grandes plaines de la vallée du Rift, la région des lacs, et les montagnes du nord du Kenya, elle « respira » les grands espaces, les horizons à perte de vue, côtoya la faune, vécu dans cette nature qui submerge totalement par sa puissance et sa beauté. Elle connut les lodges construits en bois et en terre, somptueux, totalement ouverts, surplomban­t le bush africain et sa vie sauvage… « Ainsi, à partir d'une petite ferme en colombages, en respectant scrupuleus­ement les codes et lois de la constructi­on normande traditionn­elle, en gardant l'harmonie comme fil d'ariane mais sans le chercher consciemme­nt, nous avons fait sortir de terre une extension qui se résume en un mélange de bow-window bruxellois et lodge africain… Et ces sensations perdues d'afrique reviennent, ici, au coeur du bocage normand dans cet écrin de nature qu'est la vallée de la Charentonn­e, entre pays d'ouche et Pays d'auge. »

Ici, tout est beau, tout est bon : les ciels changeants, la brume qui monte de la rivière, les lumières et toute leur palette de nuances, le vent dans les feuilles, les rideaux de pluie sur la vallée, le dégradé des verts, les cris d'animaux dans la nuit, le hululement de la chouette, la danse des chevreuils, la famille sanglier avec ses 12 marcassins à la queue-leu-leu qui viennent boire à la rivière, les vols d'oiseaux migrateurs, canards, cormorans, hérons… et le reflet de la lune dans la Charentonn­e. Ici, nous sommes à Ruisse-la-lune. À l'intérieur, l'ambiance y est tantôt lumineuse – toujours la journée, même « quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle... » – tantôt tamisée le soir venu et toujours chaleureus­e. Ce bonheur à moins de deux heures du centre de Paris, à moins d'une heure de la côte normande « dans une vallée magnifique, truffée de petites normandes comme la nôtre, qui sont autant de petits paradis en puissance ! ».

 ??  ?? Les matériaux de constructi­ons de « Ruisse la Lune comme dans les lodges africains sont naturels – presque bruts ! – et locaux : bauge, pierre et bois.»,
Les matériaux de constructi­ons de « Ruisse la Lune comme dans les lodges africains sont naturels – presque bruts ! – et locaux : bauge, pierre et bois.»,
 ??  ?? Eve s'est nourrie de son séjour africain, ses réminiscen­ces ont largement contribué aux choix constructi­fs de sa maison normande.
Eve s'est nourrie de son séjour africain, ses réminiscen­ces ont largement contribué aux choix constructi­fs de sa maison normande.
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 ??  ?? L'extension en chêne massif a doublé la surface de cette demeure qui s'appuie sur un soubasseme­nt en pierre. La toiture en ardoise est débordante de façon à protéger les bois du ruissellem­ent des eaux de pluie.
L'extension en chêne massif a doublé la surface de cette demeure qui s'appuie sur un soubasseme­nt en pierre. La toiture en ardoise est débordante de façon à protéger les bois du ruissellem­ent des eaux de pluie.
 ??  ?? Les poutres d'origine ont été grattées et blanchies. Au-dessus du sommier dans les interstice­s ont été placées des briques.
Les poutres d'origine ont été grattées et blanchies. Au-dessus du sommier dans les interstice­s ont été placées des briques.
 ??  ?? Ci-contre : cette cave à vins a été créée sur une ancienne citerne extérieure, un espace complèteme­nt étanche. Le sol a été chaussé de tommettes. Les murs, grattés, auparavant recouverts de charbon, ont été laissés tels quels révélant aujourd'hui une couleur rouille.
Ci-contre : cette cave à vins a été créée sur une ancienne citerne extérieure, un espace complèteme­nt étanche. Le sol a été chaussé de tommettes. Les murs, grattés, auparavant recouverts de charbon, ont été laissés tels quels révélant aujourd'hui une couleur rouille.
 ??  ?? Le premier plan jusqu'au portique : une partie de l'extension. En bas du portique, une poutre au sol fait la jonction entre la dalle d'origine et celle de l'extension. Au fond, le pan de mur en briques blanches et un autre muret en briques en harmonie avec le sol en tommettes : toujours des matériaux naturels dans la tradition normande.
Le premier plan jusqu'au portique : une partie de l'extension. En bas du portique, une poutre au sol fait la jonction entre la dalle d'origine et celle de l'extension. Au fond, le pan de mur en briques blanches et un autre muret en briques en harmonie avec le sol en tommettes : toujours des matériaux naturels dans la tradition normande.
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