Maisons Normandie

DES RACINES, DE L'ENCRE, DES PLUMES

- Crédits photos : Benoît Delplanque – Texte : Jérôme Marcadé (extraits de l’ouvrage « Lieux d’inspiratio­n Maisons et Jardins d’écrivains » paru aux Editions des Falaises)

Leurs racines se sont nourries de ces terroirs verdoyants et de ces forêts majestueus­es, leurs plumes ont trempé dans ces fleuves ondulants et ces mers flamboyant­es. Qu'ils soient Normands de naissance ou d'adoption, ils ont, chacun à leur manière, magnifié l'atmosphère normande si particuliè­re de ces paysages bercés par les vents et les embruns et de ces lumières aux couleurs fugitives. Entrons dans l'intimité des écrivains normands ! Maisons des villes ou des champs, au décor modeste ou fastueux, entourées d'un jardin clos ou d'un vaste parc, toutes imprégnés du parfum de leur encre et encore habitées par l'âme de leur plume.

Cet héritage remonte peut-être au XIE siècle avec la fameuse Chanson de Roland, entonnée par les troupes de Guillaume le Conquérant comme un hymne à la Normandie, et qui trouverait ses sources du côté de Pont-audemer. Marie de France, dans le sillage d'aliénor d'aquitaine, écrit au XIIE siècle les premiers vers de la langue française au château de Domfront dans l'orne. Le siècle suivant voit la naissance du grand poète bayeusain Alain Chartier qui, sans avoir le génie d'un François Villon, a marqué son temps. Enfin n'oublions pas François de Malherbe, le fondateur des lettres modernes au XVIE siècle, dont on retiendra le rôle de promoteur de la langue classique. Nul doute que ces grands anciens ont contribué au rayonnemen­t de la langue française du Grand Siècle, dont Pierre Corneille est l'un des plus illustres représenta­nts. Si les références normandes sont absentes de ses pièces, on peut lui pardonner cet oubli, quand on sait que Le Cid est né sur le banc d'un potager près de Rouen.

La Normandie, « terre d’inspiratio­n », serait-elle le berceau de la littératur­e française ?

Flaubert et Maupassant, témoins d’un XIXE siècle particuliè­rement fertile

Aujourd'hui, Flaubert et Maupassant sont les plus célèbres des écrivains normands, témoins d'un XIXE siècle particuliè­rement fertile, qui voit aussi naître des auteurs qui ont connu leur heure de gloire comme Barbey d'aurevilly ou Hector Malot, même s'ils sont désormais quelque peu retombés dans l'oubli. Si Madame Bovary et Boule de Suif ont enflammé l'imaginatio­n de génération­s de lecteurs, Arsène Lupin ou Rouletabil­le nous embarquent toujours avec autant d'entrain dans leurs aventures. La Normandie de ce siècle est surtout romanesque, mais elle est aussi poétique. Victor Hugo ne fut pas insensible, malgré la tragédie, aux bords de la Seine, qui lui inspire les plus beaux vers des Contemplat­ions. Charles Baudelaire, quant à lui, peindra dans la solitude d'honfleur, quelques-unes de ses plus belles Fleurs du mal.

Le XXE siècle n'est pas en reste. On ne compte plus les académicie­ns normands : André Maurois ou Jacques de Lacretelle ont, dans des styles différents, loué leur Normandie natale, celle du patrimoine industriel symbolisé par les hautes cheminées d'elbeuf ou celle des belles pierres immortalis­ées par Brécy ou le château d'ô. La Normandie peut également se glorifier de deux Prix Nobel, Roger Martin du Gard et André Gide, qui ont magnifié leurs jardins, le grand parc qui s'ouvre vers la forêt de Bellême ou le verger qui conduit à la porte étroite. Pour terminer ce parcours historique, évoquons les écrivains d'adoption: Marcel Proust, chantre de la féminité normande dont les jeunes filles en fleur s'épanouisse­nt à l'ombre du Grand Hôtel de Cabourg ou Marguerite Duras contemplat­rice de la plage de Trouville, dont les vagues tumultueus­es résonnent comme un écho à sa vie tourmentée

La Normandie se glorifie de deux Prix Nobel, Roger Martin du Gard et André Gide

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Le miroir d'eau du château de Tocquevill­e, proche de Cherbourg.
 ??  ?? Une réplique en pierre du buste de Guy de Maupassant par Raoul Verlet a été installé en 1925 dans le parc du château de Miromesnil, lieu de naissance de Guy de Maupassant.
Une réplique en pierre du buste de Guy de Maupassant par Raoul Verlet a été installé en 1925 dans le parc du château de Miromesnil, lieu de naissance de Guy de Maupassant.
 ??  ?? Le pavillon Flaubert, seul vestige de la propriété familiale de Croisset, depuis le jardin.
Le pavillon Flaubert, seul vestige de la propriété familiale de Croisset, depuis le jardin.
 ??  ?? La maison de Jacques Prévert à Omonville-la-petite.
La maison de Jacques Prévert à Omonville-la-petite.
 ??  ?? Jean de la Varende. Le château de Bonneville à Chamblac (Eure).
Jean de la Varende. Le château de Bonneville à Chamblac (Eure).
 ??  ?? Le musée de Petit-couronne abrite une reconstitu­tion du bureau de Pierre Corneille où il acheva la rédaction du Cid.
Le musée de Petit-couronne abrite une reconstitu­tion du bureau de Pierre Corneille où il acheva la rédaction du Cid.
 ??  ?? Raymond Queneau. La plage du Havre.
Raymond Queneau. La plage du Havre.
 ??  ?? Le buste de Léopoldine, fille de Victor Hugo et femme de Charles Vacquerie, est exposé dans sa chambre.
Le buste de Léopoldine, fille de Victor Hugo et femme de Charles Vacquerie, est exposé dans sa chambre.
 ??  ?? André Gide. Le château de Cuverville.
André Gide. Le château de Cuverville.
 ??  ?? Ci-contre : Un buste de Marcel Proust d'aristide Rousaud, ami de Rodin, réalisé en 1912. Ci-dessous : Roger Martin du Gard. Le château du Tertre à la lisière de la forêt de Bellême.
Ci-contre : Un buste de Marcel Proust d'aristide Rousaud, ami de Rodin, réalisé en 1912. Ci-dessous : Roger Martin du Gard. Le château du Tertre à la lisière de la forêt de Bellême.
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