TROUVILLE POSTE RESTANTE
En 2017 après de longues années de fermeture, la mythique poste de Trouville retrouvait une nouvelle affectation. Le flamboyant bureau de poste qui incarnait à lui seul le faste des années folles sur la Côte fleurie reprenait vie sous les traits d'un magnifique loft de 300 m². Avec talent, l'architecte d'intérieur Amelie Buvat réussit la gageure de réaliser la synthèse de l'esprit du site et lui insuffler une modernité fusionnelle avec son histoire.
Depuis la fin du XIXE siècle, l'ancien petit port de pêche connait un essor flamboyant. Trouville est fréquenté par les plus grands artistes : Gustave Flaubert y connait ses premiers émois, Marcel Proust vient y puiser les sources de ses oeuvres. L'incroyable lumière inspire alors les peintres Charles Mozin puis Eugène Boudin qui y posent leur chevalet et s'y installent. L'impressionnisme naissant fera de la « reine des plages » une destination de villégiature prisée de tout le « grand monde » parisien. Entre 1860 et 1880, les villas aussi fastueuses qu'excentriques fleurissent au pied de la plage, la station connait alors un développement sans précédent. Les années folles trouveront sur la côte fleurie l'eldorado de la fête et des paillettes. Le bureau de poste bâtie en 1838, ne suffisant plus au développement de la station, un nouveau bâtiment voit le jour en 1932. La nouvelle poste est à l'image de l'époque qui célèbre l'art déco et ses formes stylisées en rompant avec la représentation de la nature. Moderne et vaste le bureau de poste sera actif jusqu'au début du XXIE siècle. Après avoir été cédé à l'issue d'un appel d'offres à un groupe financier, ce joyau du patrimoine renait en 2017. Le permis de rénovation n'est pas passé comme une lettre à la poste, Situé dans un périmètre sauvegardé, le bâtiment ne pouvait être transformé sans respecter un cahier des charges très strict, plus de trente mois ont ainsi été nécessaires pour le voir renaitre sous la férule de la direction régionale des affaires culturelles du Calvados.
Le bâtiment à été conçu par l'architecte Louis Chirol, le rouennais à réalisé plus de trente bureaux de poste dans toute la Normandie. Il a réalisé également de nombreuses églises. La synthèse de son art se retrouve dans la présence des imposants vitraux. La façade donnant sur la rue est emblématique de l'esprit néonormand, à base de faux pans de bois sur une structure en béton, la toiture en débord sur la rue est elle aussi représentative du style vernaculaire en vogue dans le début du XXE siècle. L'intérieur à des airs de nef de cathédrale ou de gare transatlantique, ses plafonds à cinq mètres de hauteur sans poteaux comme le permet l'usage du béton armé enveloppent l'espace avec légèreté. À l'époque de la construction, toutes les fantaisies et l'opulence économique le permettant, les installations de la salle recevant le public sont réalisées dans le plus pur style des années 30. L'art déco y règne en maitre, grâce aux immenses vitraux du maître-verrier Georges Tembouret, la lumière pénètre abondamment pour illuminer le magnifique sol calepiné en mosaïque aux tonalités chaudes sur lequel est posé le mobilier en chêne ouvragé et orné de marqueterie stylisée. Grâce à un classement aux Monuments historiques en 2010, ces somptueux éléments du passé miraculeusement préservés ont pu être sanctuarisés. La rénovation du site à des fins immobilières devait tenir compte de ces éléments autour desquels les nouveaux aménagements devaient trouver leur place.au terme d'un appel d'offre garant du respect du lieu, le nouveau propriétaire, le groupe Fininvest, spécialiste des sites de prestige fait appel à la jeune architecte d'intérieur Amélie Buvat qui aura pour noble tache de transformer ce bureau de poste historique en un loft où le confort des futurs occupants devra être primordial sans dénaturer la vocation première du lieu. Il lui sera nécessaire de s'affranchir du poids du patrimoine pour y insuffler sa touche personnelle et contemporaine.
Un second souffle pour un site classé
Le style des années trente, malgré son élégance épurée et ses lignes élancées n'est pas foncièrement évocateur de douceur et de dolce vita. Tout l'art de l'architecte sera donc de mêler les matières chaudes : laiton, velours, osier ou papier recyclé aux écritoires massives et aux anachroniques cabines téléphoniques et aux portes à tambour par lesquelle entraient et sortaient naguère les usagers. Dans un esprit de maison de famille, les multiples références à la vie passée ravivent les mémoires, le sigle PTT incrusté dans la mosaïque est omniprésent dans tous les recoins du loft de 180 m². La longue ligne de guichets a été reconvertie en un bar de taille exceptionnelle ouvert sur la grande cuisine ouverte et festive. Deux immenses tables de ferme ont été assemblées pour former une table d'hôtes conviviale où les convives prennent place dans les fauteuils en chêne d'origine. Les luminaires en papier recyclé qui surplombent cet espace repas sont réalisés dans l'esprit des filets de pêche, rappelant l'activité ancestrale de Trouville. Derrière cette salle ouverte au public, le centre de tri fourmillait jadis des petites mains qui, sans relâche, avaient à coeur de faire cheminer lettres enflammées et cartes postales ensoleillées. L'architecte y à redessiné l'espace en y intégrant cinq chambres avec salle de bain. Avec plus de liberté que dans la salle classée, la note contemporaine y est plus marquée. Chaque espace nuit est personnalisé et promet des atmosphères variées. De la sobre chambre bleue qui décline la couleur du ciel sous ses hauts plafonds aux ambiances exotiques avec d'exubérants papiers peints de chez Bien-fait qui épousent les hauts murs tels des têtes de lit surdimensionnées. Le loft est proposé à la location pour des séminaires professionnels mais aussi pour des groupes d'amis. Les aménagements ont été pensés dans un but de confort maximal, avec le sauna installé au sous sol, l'ancienne poste est aujourd'hui une des meilleures adresses de bien-être au coeur d'un patrimoine unique, y séjourner est hautement recommandé.
Le sens de la fête