AUTOMNE-HIVER 2020-2021 À LA VIE, À LA MODE
Quel sens donner aux défilés, et plus largement aux vêtements, lorsque l’humanité se relève à peine d’une crise sans précédent? Les conséquences de l’épreuve que nous avons traversée, aux quatre coins de la planète, seront encore longues à se faire sentir. Nos priorités sont bouleversées, notre rapport au temps redéfini. Les liens aux autres, surtout, nous semblent plus nécessaires que jamais. Mais cet élan vital nous fait aussi reconsidérer avec émotion toutes les choses qui confèrent de la profondeur à nos vies. La mode, derrière son apparente superficialité, en fait partie. Avant même que tout se fige dans la pandémie et le confinement, les fashion weeks automne-hiver 2020-2021 de New York, Londres, Milan et Paris avaient donné le ton: solennel. Les créateurs ne sont pas des êtres coupés du monde. Sans cesse, ils ressassent le réel, le décortiquent et le ré-interprètent afin de le transcender. Cette saison, on a donc vu de nombreuses silhouettes sépulcrales sonner le tocsin, la fin de l’innocence - mais tenter aussi de faire souffler un vent de mysticisme. Chez Balenciaga, Demna Gvasalia a ainsi élaboré «une métaphore du monde qui semble se
noyer dans les problèmes post-apocalyptiques». Julien Dossena pour Paco Rabanne a multiplié, sous les voûtes sacrées de la Conciergerie, des robes comme des aubes, mi-médiévales mi-futuristes. Chez Valentino, le noir a pris des accents universels, telle une toile sur laquelle se réinventer un destin. Nicolas Ghesquière, chez Louis Vuitton, a composé lui une partition traversant les époques, se jouant du temps, et nous rappelant que l’on est toujours tributaire d’une histoire, d’une filiation. En contrepoint de ces propos habités, les podiums ont aussi regorgé de couleurs vives (et en associations audacieuses), d’imprimés chatoyants, de robes virevoltantes… Comme de superbes hymnes à la vie.