Marie Claire Style

L’énergie vibrante de Rushemy Botter et Lisi Herrebrugh

Avec leurs couleurs fortes et leurs coupes qui s’affranchis­sent élégamment des genres, les créateurs font chez Nina Ricci le pari de l’optimisme. Leur dynamisme fait un bien fou. Rencontre.

- Propos recueillis par Louise des Ligneris

Votre duo créatif est complice car vous avez grandi ensemble. Quelle est l’histoire de votre rencontre?

Nous nous sommes rencontrés il y a RUSHEMY BOTTER: plus de vingt ans lorsque nous étions enfants, nous habitions dans deux villages voisins. Le grand frère de Lisi était mon meilleur ami, il l’est toujours d’ailleurs, alors j’allais souvent jouer chez eux. Quelques années plus tard, nous prenions le même bus pour aller à la fac et nos chemins se sont de nouveau croisés.

Nous avons ensuite étudié la mode LISI HERREBRUGH: dans deux écoles différente­s, mais cette passion commune nous a liés. Pour ma part, à l’Amsterdam Fashion Institute, j’étudiais des aspects techniques. Rushemy m’aidait sur tout le côté créatif, comme par exemple la conception de motifs. En réalité, on travaille ensemble depuis que nous sommes étudiants.

Durant ces années d’études, nous avons vécu en R.B. : Belgique et y avons lancé notre marque, Botter. Dans notre petit atelier, on a véritablem­ent commencé à créer en duo et à participer à des concours.

Qu’est-ce qui fait la force de votre duo créatif?

Il y a beaucoup d’avantages à être deux. Nous L.H. : avons deux paires d’yeux et d’oreilles. Autour de nous, les choses vont parfois à une telle vitesse qu’il est difficile de tout voir.

Nous sommes très complément­aires: Lisi est très R.B. : douée dans certains domaines où j’ai des faiblesses. Et inversemen­t. Nous avons la même esthétique, les mêmes centres d’intérêt. Et nous sommes aussi très honnêtes l’un envers l’autre. Les yeux fermés, on peut se fier à l’honnêteté de l’autre en cas de doute. Chacune de nos discussion­s est productive et nous fait avancer.

Chez Nina Ricci, vous créez pour la femme. Chez Botter, pour l’homme. Sentez-vous de grandes différence­s entre les deux genres?

À nos yeux, masculin et féminin sont assez proches. L.H. : Nous laissons les deux genres interagir. Chez Botter, on aime questionne­r la masculinit­é en ajoutant des codes féminins. L’élégance est non genrée. Chez Nina Ricci, à l’inverse, on apporte des notes masculines sur nos collection­s femme. Dans l’imaginaire, la femme Nina Ricci est une bourgeoise, romantique et féminine. Notre challenge était de lui amener plus de complexité, notamment avec certains de nos codes masculins. Et une touche moderne, avec de l’humour. R.B. :

Par exemple, en 1973, Nina Ricci présentait une L.H. : collection avec des mannequins aux côtés de bodybuilde­rs. Elle pouvait avoir cet esprit décalé qui nous plaît. Elle était aussi forte et audacieuse. Après-guerre, elle a créé pour les femmes des vêtements du quotidien. Elle ouvrait sa maison à toutes les femmes, elle se voulait accessible en termes de prix, ouverte à toutes, inclusive. Toutes ces choses dont on ne se souvient pas forcément sont pourtant très importante­s dans l’histoire de la marque. C’est pourquoi nous aimons particuliè­rement rappeler ces qualités qu’avait Nina Ricci.

Votre avant-dernière collection s’inspirait de L’Air du Temps, le parfum signature de la maison. Justement, que vous inspire l’air de notre temps?

Les évènements de l’année furent éprouvants. Face L.H. : à la négativité ambiante, on s’est tourné vers ce parfum créé en période d’après-guerre. Avec cette collection du même nom, nous voulions transmettr­e des émotions positives, apporter une note de joie. Beaucoup de drames éprouvent notre quotidien, mais au travers de ce défilé, nous avons voulu porter un message d’espoir.

Ce n’est pas naïf. Nous sommes réalistes quant à la R.B. : gravité de la situation. Mais nous avons fait le choix d’être positifs car c’est ce que nous sommes avant tout.

Au milieu du chaos, un état d’esprit joyeux peut L.H. : éventuelle­ment faire un peu de bien.

En évoluant désormais au sein d’une grande maison tout en travaillan­t votre marque Botter, vous sentezvous libres?

C’est difficile de se sentir entièremen­t libre. L’histoire L.H. : de Nina Ricci a commencé dans les années 30. Nous nous imprégnons de tout son univers pour essayer d’y apporter notre touche moderne. C’est un exercice plus intéressan­t que d’avoir une totale liberté. C’est une sorte de défi personnel d’amener Nina Ricci et son héritage vers une nouvelle direction qui est la nôtre. À notre arrivée ici, pour être honnêtes, nous avons ressenti les «contrainte­s» que le travail dans une grande maison peut imposer. C’était très nouveau. Mais trois ans plus tard, nos cerveaux sont habitués à penser pour deux mondes, celui de Nina Ricci et celui de Botter.

Cette manière très particuliè­re de travailler, en R.B. : alternant entre Botter et Nina Ricci, est passionnan­te. Pour chaque maison, nos idées se construise­nt différemme­nt car les équipes, les moyens et les impératifs ne sont pas les mêmes. Au quotidien, c’est enrichissa­nt de développer ses idées et nos imaginaire­s de deux manières. Ça nous tient éveillés.

 ??  ?? Rushemy Botter et Lisi Herrebrugh.
Rushemy Botter et Lisi Herrebrugh.
 ??  ?? Collection Nina Ricci automne-hiver 2021-2022.
Collection Nina Ricci automne-hiver 2021-2022.

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