Sou Abadi lève le voile
Dans “Cherchez la femme”, la cinéaste francoiranienne Sou Abadi tourne en dérision l’islam radical. Une comédie irrésistible et pleine d’audace qui peut d’ores et déjà prétendre au titre de “Certains l’aiment chaud” musulman.
Marie Claire : Un jeune homme se dissimule sous une burqa pour reconquérir sa bien-aimée. Comment est née l’idée folle de ce scénario ?
Sou Abadi : Le déclic a eu lieu en 2012, en plein débat sur les femmes voilées. Il y avait une telle anxiété autour de cette question que j’ai eu l’envie de la désamorcer par une comédie. Deux faits m’ont beaucoup marquée : l’ex-président Bani Sadr qui a demandé l’asile politique en 1981 à la France et qui a quitté l’Iran déguisé en musulmane voilée. De jeunes Afghans m’ont aussi raconté qu’ils se promenaient parfois en burqa afin d’échapper à la surveillance des talibans, de cacher des instruments de musique… Ce bout de tissu qui heurte tant les regards en France peut être, dans un régime autoritaire, un formidable outil de liberté. Je me suis aussi beaucoup inspirée de Certains l’aiment chaud, qui est un de mes films préférés.
Ça m’affecte pour certains comédiens qui ont reçu des menaces de mort sur Facebook. C’est très préoccupant. Mais à titre personnel, je n’ai pas peur. J’ai grandi sous une république islamique, donc il en faut plus pour m’effrayer. Les insultes qui accusent mon film d’islamophobie ont tort : je ne ris pas de la religion mais de l’intégrisme. Je ris aussi de moi, de mes parents, des féministes, des communistes, des étudiants de Sciences-po… C’est un film qui doit rassembler par le rire, pas diviser.
Comment s’est déroulée votre collaboration avec Camélia Jordana ?
Elle possède une énergie incroyable. Camélia et les autres comédiens ont fait un choix courageux : jouer dans Cherchez la femme n’allait pas de soi. Des gens ont refusé d’y collaborer par peur. Faire ce film relève quasiment d’un acte militant.
Cherchez la femme de Sou Abadi, avec Félix Moati, Camélia Jordana, William
Lebghil, déjà en salle.