Coco Capitán, l’oeil du futur Les carrières se font de plus en plus tôt. Portrait de la photographe jeune diplômée que la mode s’arrache.
4 Elle shoote ses modèles un sac à poisson rouge à la main, des sparadraps multicolores en travers du visage ou en pull à carreaux, de dos, fesses à l’air. Coco Capitán, nouvelle coqueluche de la mode de 25 ans, a le goût des poses incongrues, des mises en scène ironiques – une petite voiture sur la tête, une poubelle pour accessoire – et des images « parfaitement imparfaites ». Depuis deux ans, son nom circule avec une occurrence exponentielle. Publiée dans des magazines prestigieux ( Dazed, New York Times Magazine, M Le Monde), on l’a vue collaborer avec A.P.C., Paco Rabanne, Miu Miu ou Mulberry. Cette native de Séville, diplômée du Royal College of Art de Londres depuis un an seulement, a le même
« Cette phrase principale – What are we going to do with all this future ? – me semble très pertinente dans ce moment où personne ne sait ce qu’il va se passer, en particulier avec ces changements majeurs de pouvoir politique », dit Capitán au New York Times, sans citer directement Trump. Les aphorismes dont regorge son Instagram signent aussi l’exigence d’une mélancolie ludique : « How to stop existing without dying » (Comment cesser d’exister sans mourir). « Dès que je suis dans une situation stressante ou paradoxale, ces pensées me viennent naturellement en tête », confie-t-elle sur gucci.com. Un regard analytique qui s’accompagne d’un point de vue critique sur la société de consommation. En 2014, une série d’autoportraits et de natures mortes intitulée The System of Objects renvoie au Système des objets (1968) de Baudrillard ; elle en retient cette phrase : « Les objets sont des catégories d’objets qui induisent très tyranniquement des catégories de personnes. » La presse l’associe souvent à d’autres photographes de sa génération – Petra Collins, Harley Weir – au sein de la mouvance du « female gaze », soit l’avènement d’un regard féminin venant briser le monopole du « male gaze », regard masculin objectivant les corps de femme. « Quand nous parlons de female gaze, nous continuons de réagir au passé, quand n’existait que le male gaze », objecte-t-elle à Business of Fashion. Elle, préfère penser le futur, pour un regard enfin libéré du genre.