Marie Claire

Clotilde Hesme La discrète en lumière

Turbulente, l’actrice excelle dans une comédie sur la GPA et nuance son image de “fille chic et cérébrale”. Une mue jubilatoir­e.

- Par Emily Barnett

Clotilde Hesme a d’abord été ombre évanescent­e, silhouette aussi élégante qu’éthérée filant à travers les rues d’un Paris rétro et romantique. C’était en 2005, dans Les amants réguliers de Philippe Garrel. Elle y jouait la compagne de Louis Garrel, une belle jeune femme à frange sublimée par le noir et blanc de la pellicule. Depuis, on a souvent recroisé l’actrice, devenue une sorte de muse du cinéma d’auteurs (Christophe Honoré, Raoul Ruiz…), avant de la perdre un peu de vue, puis de la retrouver en infirmière légèrement égarée au bras d’Omar Sy dans la comédie Chocolat. « L’image de la fille chic et cérébrale m’a longtemps collé à la peau. Je suis plus clown qu’on le croit. Un jour quelqu’un m’a dit : “Vous êtes marrante en fait.” J’ai répondu qu’effectivem­ent, dans la vie j’étais en couleur, pas en noir et blanc. » Un aveu que vient confirmer sa turbulente interpréta­tion d’une mère porteuse dans Diane a les épaules de Fabien Gorgeart : l’histoire d’une jeune femme qui a accepté de porter le futur enfant d’un couple d’amis homosexuel­s.

« Diane n’est pas une victime ni une martyre. Son geste n’est pas associé à un sacrifice. Elle n’est pas non plus payée pour le faire. Sa grossesse est un acte d’amour et d’amitié qui aura des conséquenc­es mais pas celles qu’on croit. Le film ne la juge jamais, il interroge un vertige. »

Une héroïne virile Réflexion contempora­ine sur la maternité et le lien filial (qu’est-ce qui fait qu’on se sent parents, quelle place y tient la biologie ?), Diane a les épaules explore en parallèle le vaste champ féminin à travers cette héroïne virile, gaffeuse, soupe au lait et fière, qui ressemble parfois à un grand adolescent dégingandé perdu dans le corps d’une femme enceinte. La comédienne de 38 ans, qui a fait ses armes au Conservato­ire, raconte s’être « longtemps excusée d’être une fille. J’avais déjà deux grandes soeurs, et mes parents voulaient un garçon. Pendant toute la grossesse ils m’ont appelée Antoine ». Finalement, Antoine n’a pas pointé son nez, ni même Antoinette, mais Clotilde, une sacrée jeune femme, drôle, gracieuse et puissante, qui se vit dans ce film comme un « Bruce Willis de la gestation pour autrui ». Certaines images ont été tournées alors qu’elle attendait son premier enfant. « C’était une façon d’inscrire ma grossesse au coeur de mon travail. Les actrices doivent parfois mettre leur carrière entre parenthèse­s à partir du moment où elles choisissen­t d’être mère. Je voulais faire le geste inverse. » Clotilde a vraiment les épaules.

Diane a les épaules de Fabien Gorgeart, avec aussi Fabrizio Rongione, Thomas Suire, sortie le 15 novembre.

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