Roman-photo, le kitsch s’expose
Objet méprisé de la culture populaire, le roman-photo force aujourd’hui les portes du musée. A travers plus de trois cents objets (revues, photographies originales, maquettes, films…), le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée, à Marseille, éclaire sous un jour nouveau en une exposition soixante-dix ans de publications, alors que Nous Deux vend encore 250 000 exemplaires en France. Trois raisons d’y aller.
Jalousie, trahison, mensonge, passion… le roman-photo passe pour un genre à l’eau de rose. Mais à y regarder de plus près, il est aussi un miroir des réalités sociales de chaque époque. Familles recomposées, maladies (sida, cancer du sein…), alcoolisme, émancipation des femmes, homosexualité… c’est un véritable sismographe.
Sylvie Vartan, Mireille Mathieu, Dalida, Johnny Hallyday… on ne compte pas les vedettes qui ont assis leur notoriété en enflammant les pages de Nous Deux. Certaines stars italiennes, comme Sophia Loren, Gina Lollobrigida ou Ornella Muti, ont même commencé leur carrière ainsi avant de percer au cinéma. Quant aux années 80, elles ont consacré Coluche, qui joue dans les romans-photos sardoniques du magazine Hara-Kiri.
Très vite après sa naissance, en Italie, en 1947, le roman-photo s’est exporté dans le reste de l’Europe, en Turquie, en Afrique du Nord, au Liban, en Amérique latine, en Afrique du Sud… Il existait même des romansphotos iraniens du temps du shah, ainsi que des versions chinoises, qui ont disparu avec l’instauration du communisme, en 1949. Ces spécimens sont une des curiosités de l’exposition.