Constance Debré,
écrivaine et avocate
—Quand vous êtes-vous sentie femme la première fois ?
Le passage à l’homosexualité a été un moment où je me suis sentie accéder à un moi plus large, plus varié, plus fort. Ce n’est pas pour ça que je resterai éternellement dans cette sexualité.
—Comment avez-vous été éduquée?
Peu de discours, mes parents étaient assez libres sur tous les plans, contrairement à leurs familles. Pour moi la personne la plus forte dans le couple était ma mère, mannequin, aristocrate, ultra-féminine, maquillée, avec quelque chose de conquérant, mais qui passait par un corps androgyne. Mon père avait une masculinité que j’aime beaucoup, la sensibilité, l’intelligence et la douceur. Très petite fille, j’ai voulu être un garçon.
—Etes-vous féminine ?
C’est en ne cachant plus ce que je pouvais avoir de viril que j’ai aussi accepté, en toute tranquillité, le fait d’être une fille. J’adore la compagnie des hommes, mais après n’avoir fréquenté quasiment que des garçons pendant vingt-cinq ans, dont mon mec, avec qui je passais beaucoup de temps et que j’ai beaucoup aimé, mon fils et mon père, j’ai des copines, je redécouvre les filles, dans mes rapports amoureux et de façon beaucoup plus large. Je me suis aperçue à quel point on a tous été hyper-marqués par ce qu’on peut appeler un discours hétéro-normé, des rôles définis et attribués et je pense qu’on va déconstruire ça.
—En quoi votre féminité répond-elle à un schéma classique ?
Je ne sais pas ce qui reste de schéma classique dans ma vie, mais si un exemple, peut-être le dernier : il ne me reste plus beaucoup de longueur de cheveux, mais je suis régulièrement tentée de me raser complètement ou de me faire une iroquoise, et je me dis que, peut-être, ce serait beaucoup pour mon fils. J’ai encore des réflexions comme ça.
—Quand ne vous sentez-vous pas femme du tout ?
C’est assez rare, je ne réfléchis pas tellement à moi dans ces termes-là. Peut-être quand je suis avec des copains garçons qui parlent de leurs histoires d’amour avec les filles, je me sens de leur côté. Mais je suis aussi fille quand je suis avec des filles.