Marie Claire

Dans le bureau de Yaël Braun-Pivet

La présidente de la commission des Lois à l’Assemblée nous reçoit sur son lieu de travail et nous parle de son quotidien, entre joies intimes, fruits secs et goût pour le combat.

- Par Corine Goldberger — Photos Elise Toïdé

— Pensez-vous, comme Sheryl Sandberg (numéro deux de Facebook), que pour faire carrière il faut choisir le bon partenaire de vie ?

Quand j’ai rencontré Vianney, on était au lycée, en première. On s’est toujours accompagné, soutenu. Quand, pour sa carrière, il a été envoyé à Taïwan, puis au Japon et au Portugal, je l’ai suivi avec les enfants. A notre retour, lui aussi a respecté mes choix. Il est venu à ma première réunion publique quand je me suis lancée en politique.

— En quoi êtes-vous la plus douée ?

Pousser des idées qui ne font pas l’unanimité (au début), comme le projet de centres pénitentia­ires de réinsertio­n avec un niveau de sécurité allégé, pour les petites et fins de peine. — Profession­nellement, que ne supportez-vous pas que l’on dise de vous ?

Que je ne suis pas à ma place, pas à la hauteur. La première femme présidente à mon poste, Catherine Tasca, était une ancienne ministre. Elle avait donc déjà une stature politique. C’est inédit d’avoir une inconnue à cette fonction-là. —Que faites-vous en premier en arrivant sur votre lieu de travail ? Je prends mon café, dans la tasse offerte par ma fille, sur laquelle est écrit : « Maman chérie que j’aime ».

— Votre tenue de combat profession­nel ?

Les imprimés fleuris : chemisiers, vestes… L’année dernière, avec une députée Modem, on s’est retrouvé avec la même tenue, achetée en soldes chez Pimkie, parce qu’on avait réalisé qu’on n’avait pas de « tenue de députée ». Pour me donner de la force et du courage, je porte l’alliance de ma grand-mère décédée. En devenant députée, je suis allée prendre un cours de maquillage avec ma fille de 15 ans. — Prenez-vous un petit-déjeuner ?

Oui, mais salé. Avant que je sois députée, mon mari m’apportait mon petitdéjeu­ner au lit. Depuis que je suis élue et présidente de la commission, c’est moi qui lui apporte le sien, je pars avant lui.

— Que faites-vous pour tenir le coup ?

Le meilleur carburant ? Les conviction­s et l’enthousias­me, plus un mélange d’amandes et de noisettes. Quand ma grand-mère venait nous voir, dans sa valise il y avait toujours du chocolat et des paquets de noisettes.

— Aimez-vous le pouvoir ?

Je n’aime pas le pouvoir pour le pouvoir. J’aime agir, comme lorsque j’ai lancé des consultati­ons gratuites d’avocats dans des centres des Restos du coeur.

— Avez-vous connu la misogynie au travail ?

Oui. Mère de cinq enfants, j’ai entendu, en campagne, que je ferais mieux de rentrer chez moi m’occuper d’eux… Il y a eu aussi l’incident avec Robin Reda, le député LR qui a dit que je pourrais être sa mère.

— Avez-vous été atteinte du syndrome de l’imposteur ?

Non. Mais comme j’ai été attaquée dès le départ, il a fallu que je prouve que je suis légitime. Nous étions trois candidats à la présidence de la commission des Lois, deux hommes et moi. Elue par mes pairs, j’ai éprouvé un sentiment de grand vertige. Je me suis dit que je venais de faire un hold-up : personne ne m’avait vue venir.

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En poste depuis juin 2017, la députée LREM des Yvelines Yaël Braun-Pivet est, à 47 ans, la deuxième femme à présider la commission des Lois sous la Ve République, après Catherine Tasca.
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