Les Américains rêvent-ils d’être français ?
Un regard américain sur la France : la chronique de Lauren Collins, correspondante du New Yorker à Paris.
Avez-vous entendu parler de la dernière tendance aux Etats-Unis ? C’est vrai qu’il y en a beaucoup, mais même si vous êtes indifférente au green juice ou au vélo d’intérieur, vous pourriez apprécier le « washed. » C’est quoi, être « washed » ? D’abord, c’est un adjectif qui, littéralement, signifie « nettoyé ». Récemment, ce mot s’est mis à désigner une sorte d’anti-branchitude. Aucun effort pour y parvenir, si ce n’est prendre un peu d’âge – en fait, moins vous en faites et plus vite vous atteindrez cet état joyeusement passif. « Est-ce qu’une vie d’ambition et d’efforts a eu raison de vous ? s’interrogeait récemment le journaliste américain Zach Baron dans son éditorial du magazine GQ. Souhaitez-vous parfois pouvoir vous relâcher un peu, arrêter de courir vers tant de buts inutiles que de toute façon vous n’atteindrez probablement pas ? C’est l’heure de devenir “washed”. » Le golf est « washed », selon Baron. (Nous sommes d’accord.) Les mots croisés sont « washed ». (Mais certes pas autant que le sudoku.) Ce n’est pas « washed » d’aller au cinéma, mais il est tout à fait « washed » de regarder le même film sur Netflix. Idem, évidemment, pour le jardinage, les dîners à la maison, le vin, Roger Federer depuis qu’il est un papa poule en cardigan blanc. Attendez… ce n’est pas une théorie parfaite – on comprend que Federer est Suisse même s’il parle la langue de Molière –, mais la washitude ressemble à une certaine manière de savoir-vivre. Se pourrait-il qu’être « washed » soit en fait être français ?