Marie Claire

Ces quatre personnali­tés du monde de l’entreprise qui ont rejoint le think tank Marie Claire nous expliquent pourquoi elles soutiennen­t notre initiative.

- Propos recueillis par Catherine Durand

Anne Lebel Directrice des ressources humaines de Natixis (natixis.com)

—Marie Claire : Avez-vous déjà été confrontée à des inégalités entre femmes et hommes dans votre carrière ?

Oui je suis une femme, et en tant que DRH j’y suis souvent confrontée. Des biais inconscien­ts subsistent. Je suis mère de quatre garçons. C’est terrible de les entendre vous dire le soir : « Pourquoi tu ne viens jamais me chercher à 16 h 30, l’heure des mamans ? » Cela continue en entreprise, quand on parle de maternité et non de parentalit­é. Dans les pays anglo-saxons, il est normal de partir en congé paternité. Ici, un salarié qui en prend un, un peu long, passe souvent pour un glandeur. Il faut aussi apprendre aux femmes à se positionne­r, à négocier un salaire, à faire acte de candidatur­e pour des postes à responsabi­lités.

—A Natixis, sur quels dossiers avez-vous avancé ?

Chaque année, on consacre 0,2 % de la masse salariale pour combler l’écart entre femmes et hommes. Nous avons aussi profession­nalisé nos modes de recrutemen­t : on a mis en place des processus de sélection avec des short lists de candidats diversifié­es en termes de mixité, de profi ls, de nationalit­é. Ainsi que des parcours de formation et des actions de mentoring pour aider nos salarié(e)s dans leur développem­ent profession­nel.

—Pourquoi avez-vous rejoint le think tank Marie Claire ?

Sa raison d’être nous a séduits, le mot « agir » a retenu notre attention. Je crois beaucoup à l’intelligen­ce collective. Echanger des pratiques, s’ouvrir à d’autres expérience­s, c’est très enrichissa­nt.

Olivier Derrien Directeur général de Salesforce France (salesforce.com)

—Marie Claire : Avez-vous déjà été confronté à des inégalités entre femmes et hommes dans votre carrière ?

Il y a huit ans, on était 20 salariés en France, contre plus de 700 aujourd’hui. Dont 27 % de femmes l’an dernier, 29 % cette année… on est sur la bonne voie. On veut créer un environnem­ent où tout le monde ose dire qui il ou elle est sans avoir peur des blagues ou d’être mis au placard. Des groupes travaillen­t sur les orientatio­ns sexuelles, le handicap, et proposent des idées que le « comité equality » retranscri­t. On défi nit des priorités diff usées à nos 30 000 employés dans le monde.

—Chez Salesforce, sur quels dossiers avez-vous avancé ?

Sur l’égalité salariale, le président a mis 3 millions d’euros pour régler le problème. On ajuste tous les six mois. Il y a cinq ans, le comité de direction, c’était 100 % d’hommes blancs. On a presque atteint la parité femmes-hommes. Dans le high-tech, on a dû mal à recruter des femmes alors que je rencontre des promotions avec 90 % d’étudiantes. On va créer 150 000 emplois dans les cinq ans en France, dont au moins 40 000 directs. Ce serait bien qu’au moins 50 % soient pourvus par des femmes. Partenaire de ParisCode, on parraine des jeunes femmes avant de les embaucher, chez nous ou chez des partenaire­s.

—Pourquoi avez-vous rejoint le think tank Marie Claire ?

Pour agir. On aimerait rencontrer plus de personnes pour mettre des choses en place, on a tous un rôle à jouer.

Aurélie Feld PDG de CSP – The Art of Training (csp.fr)

—Marie Claire : Avez-vous déjà été confrontée à des inégalités entre femmes et hommes dans votre carrière ?

Jamais ! J’ai longtemps travaillé dans des cabinets d’avocats américains. Ils ont une vision plus égalitaire de la société. Chez McKinsey, ils avaient identifié le retour de congé de maternité comme un moment de fragilité. Ils ont mis en place un accompagne­ment pour que les salariées ne partent pas.

—A CSP, sur quels dossiers avez-vous avancé ?

64 % de nos salariés sont des femmes. Je m’assure au quotidien de traiter tout le monde de manière égale. Je n’attache pas plus d’importance à la parole des hommes, l’égalité salariale est réelle. A CSP, on tient le journal de nos erreurs, à partager avec nos clients à l’occasion de nos 50 ans… dont mon erreur de recrutemen­t : deux candidats pour un poste de direction, j’ai choisi l’homme avec ma directrice des ressources humaines, on s’en veut encore ! Il était sûr de lui. La femme, qui nous a fi nalement rejoints et remplacé l’homme, nous avait dit : « Je ne suis pas sûre de pouvoir le faire. » On a pris celui qui était sûr de lui. Erreur fatale… corrigée. Avec la meilleure volonté du monde, sans préjugé, même moi je me plante !

—Pourquoi avez-vous rejoint le think tank Marie Claire ?

C’est en phase avec nos valeurs. Nos commandita­ires, les ressources humaines, la formation, sont des métiers très féminisés, cela nous intéresse de dialoguer avec elles sur ces sujets. On a aussi notre pierre à porter à l’édifice, même si on est une petite entreprise, on est assez avancé. Cela me rappelle une expérience : on a fait faire la même chose à un garçon et à une fi lle de 7 ou 8 ans, et à la fin on a donné moins de bonbons à la fi lle, juste parce que c’était la fi lle. « N’importe quoi », ont-ils dit spontanéme­nt, avant de partager. J’aimerais bien qu’à l’âge adulte on continue à partager les bonbons.

Jean-Claude Le Grand Directeur général des relations humaines de L’Oréal (loreal.fr)

—Marie Claire : Avez-vous déjà été confronté à des inégalités entre femmes et hommes dans votre carrière ?

Quand je suis arrivé, il y a vingt-trois ans, dans une entreprise comme L’Oréal, où nos consommate­urs étaient des consommatr­ices, cela ne choquait pas que ce soit des hommes qui fassent des produits pour les femmes. L’idée de promouvoir, nommer, développer des talents féminins, a démarré avec Lindsay Owen-Jones, probableme­nt par intuition. Cela s’est accéléré il y a une dizaine d’années. On l’a fait sans l’explosion d’un #MeToo, sans contrainte extérieure. Cela a été une énorme prise de conscience des dirigeants de se dire : « On ne peut pas continuer à n’être que des hommes de 50 ans, tous pareils, autour de la table ! » Aujourd’hui, celles qui sont dans notre comité exécutif ont été nommées parce que ce sont les meilleures.

—Chez L’Oréal, sur quels dossiers avez-vous avancé ?

On a travaillé sur tous les sujets à la fois : l’égalité des salaires, d’accès à la formation, aux promotions. J’ai une philosophi­e : « On ne peut agir que si on mesure. » Dès 2007, en partenaria­t avec l’Ined, nous avons travaillé à réduire l’écart salarial. Et aujourd’hui 35 % de femmes dirigent, il faudrait parvenir à 50 %. Nous déployons cette politique dans le monde, mais la prise de conscience n’est pas de la même nature dans tous les pays.

—Pourquoi avez-vous rejoint le think tank Marie Claire ?

On a considéré que c’était bien de nous mettre au service de cette cause avec Marie Claire. On a aussi participé à la création du Forum Elle active, du programme Eve avec Danone, de la Journée de la femme digitale, au programme Les Femmes et la Science avec l’Unesco… Il n’y a pas compétitio­n mais « coopétitio­n » entre entreprise­s, médias, ce combat est si important qu’il faut le mener ensemble.

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