Marie Claire

Des enquêteurs très spéciaux

Un ex-détenu en mission, un diplomate oisif, un patron des stups accro, une vieille enquêtrice, un frère survivant : les six héros de notre sélection de polars défient toutes les représenta­tions du genre.

- Par Gilles Chenaille

Une bonne âme repentante

« Une bonne conscience, c’est rien d’autre qu’une mauvaise mémoire », balance un homme détenu depuis vingt ans à un autre qui sort du pénitencie­r en lui confiant une lettre à remettre à sa fille qu’il n’a jamais connue. La bonne âme se retrouve alors dans une ville du Texas qui ne semblerait paisible qu’aux idiots. Ellory, avec un formidable don d’empathie, nous embarque dans ce petit monde d’amour, de famille, d’ombre et de sang.

Le chant de l’assassin de R.J. Ellory, traduit de l’anglais (États-Unis) par Claude et Jean Demanuelli, éd. Sonatine, 22 €.

Un flic à la dérive

Pour une fois, c’est lui – victime d’une addiction particuliè­re – qui doit répondre à toutes sortes de questions déstabilis­antes dans cette salle d’interrogat­oire où d’habitude il officie en tant que patron des stups. Comment sa relation passionnel­le avec sa lieutenant­e Laëtitia Graminsky l’a-t-elle fait chuter ainsi, grillé par un coup de foudre ? L’auteure, plusieurs fois primée pour ses thrillers, nous montre comment la mécanique intérieure du sentiment peut tout broyer sur son passage.

Ce que tu as fait de moi de Karine Giebel, éd. Belfond, 20,90 €.

Des époux détectives

Comme le démontre sans pitié Jacques Saussey au fil de ces 572 pages qui tordent l’estomac : « Le plus dangereux des prédateurs est celui que vous laissez tisser sa toile dans votre cerveau. » Par un des meilleurs orfèvres du « rompol » à la française, navigant entre les effets sismiques d’un retour du passé et l’incarnatio­n terrible de la violence faite aux femmes par un pervers narcissiqu­e. Un bien cruel bijou.

Du poison dans la tête de Jacques Saussey, éd. French pulp, 21 €.

Une Miss Marple vacillante

On se sent tout de suite en sympathie avec Teresa Battaglia, héroïne atypique de cette série policière qui cartonne en Italie. Commissair­e de police, la soixantain­e, diabétique et souffrant des premiers signes d’Alzheimer, sa tristesse et son humanité impression­nent une fois de plus dans cette affaire d’un portrait peint avec du sang il y a soixante-dix ans. Un « cold case » qui donne froid dans le dos.

La nymphe endormie d’Ilaria Tuti, traduit de l’italien par Johan-Frédérik Hel Guedj, éd. Robert Laffont, 21,50 €.

Un consul léthargiqu­e

C’est à l’ambassade de France au Mozambique que cette nouvelle enquête du consul adjoint, toujours aussi foutraque et perspicace, nous conduit. Aurel, glandeur avéré dans cette vie de sous-diplomate, ne sort de sa léthargie que quand un crime est commis – ici la mort du patron véreux d’un hôtel sur laquelle il enquête sans mandat officiel. Après le grand succès du Suspendu de Conakry, l’auteur, ancien prix Goncourt, s’en donne à coeur joie avec ce raté si réussi.

Les trois femmes du consul de Jean-Christophe Rufin, éd. Flammarion, 19,50 €.

Un frère justicier

Une ambiance à la Stephen King, mais dont la lenteur maîtrisée accentue le trouble presque délicieux qu’on éprouve à la lecture. Lieu principal : le supermarch­é d’un bled de Floride. Protagonis­tes : un petit garçon qui y disparaît dans les toilettes, son grand (et gros) frère qui l’accompagna­it, le patron insupporta­ble et les employés que l’aîné fréquenter­a, en s’y faisant embaucher cinq ans après la disparitio­n de son cadet qu’il recherche encore, la police faisant du surplace dans cette affaire…

Bad man de Dathan Auerbach, éd. Belfond, traduit de l’anglais (États-Unis) par Nathalie Perrony, 21,90 €.

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