Marie Claire

Mode Modern craft, l’antitendan­ce qui colle à l’époque

- Par Nathalie Dolivo

Des robes comme des aubes, des matières naturelles et des tons terreux : les podiums de l’été ont mis en avant une silhouette quasi monacale, en tout cas d’une grande simplicité. Et si ces vêtements qui revendique­nt leur dimension artisanale étaient les meilleurs alliés de notre quête d’authentici­té ?

Dans Peau d’âne, le film de Jacques Demy, la princesse exigeait une robe « couleur du temps ». En cet été 2020, la formule magique pour créer une telle pièce n’a, hélas, toujours pas été trouvée. Mais à la place, on peut désormais se consoler avec des vêtements « aux couleurs de l’air du temps » : des habits qui correspond­ent à ce que l’époque réclame. Tiendrait-on là l’uniforme parfait pour habiter une période en quête de sens ? Bienvenue dans l’ère du « modern craft ». L’idée ? Faire rentrer sous cette appellatio­n les pièces qui relèvent d’un artisanat moderne (traduction de la formule), d’une esthétique de la simplicité et du fait main. Dans cette catégorie, on rangera les robes en lin, voire en bure, les tissus brodés, le macramé, le crochet, les matières naturelles comme l’osier, le raphia, la corde, le cuir. Les coupes sont sobres, les tons organiques, le plus souvent doux. « Il y a des formes qu’on pourrait qualifier de silencieus­es, note Fériel Karoui, du bureau de tendances Promostyl. Ce sont des robes longues et droites, des tuniques, rien de complexe. Idem au niveau des couleurs, qui jouent la naturalité : toutes les nuances de blanc, beige, terracotta, vert pâle. Des teintes pastorales, agraires. » Parce que la mode est toujours un formidable révélateur de son temps, les podiums de l’été racontent à merveille ce désir de frugalité. Les créateurs ont été nombreux à vouloir (re)nouer avec une allure frôlant parfois le monacal. « Cela fait plusieurs saisons que nous notons cette appétence, explique encore Fériel Karoui.

Mais elle n’est pas près de s’arrêter. » Bien sûr, on pense aux précédents dans l’histoire de la mode, tels le mouvement Arts and Crafts porté par William Morris dans l’Angleterre de la fin du XIXe siècle ou les années 70, habitées aussi par une ferveur artisanale. Mais il semblerait aussi que tout ce qui monte en puissance depuis quelques années dans la création, à l’instar des références aux mormons ou au baba cool version Larzac, ait fini par s’agréger pour constituer un véritable courant de fond en phase avec nos aspiration­s. Les habits du monde d’après, en quelque sorte.

« Renouer avec la nature, affirmer une sorte de symbiose »

C’est sûr : la crise sanitaire et l’épreuve du confinemen­t que nous venons de traverser ont opéré comme un révélateur pour certain·es, un accélérate­ur pour d’autres. « Ce qui se joue à travers le textile et nos envies vestimenta­ires ne fait que traduire nos interrogat­ions profondes, estime Bénédicte Fabien, du bureau de style Leherpeur Paris. Les gens ressentent le besoin de renouer avec la nature. Ils ont des envies d’installati­on à la campagne. Ils sont concernés par les questions environnem­entales. Ils aspirent à ralentir, à être dans un autre rapport à la consommati­on. Ils veulent sortir d’une position de dominant, vis-à-vis de la faune et la flore, pour affirmer une sorte de symbiose. Du coup, ce qui fait rêver, aujourd’hui, ce n’est plus l’osten

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France