Marie Claire

Christelle Kocher

Une mode généreuse, inclusive et joyeuse: c’est ce que la créatrice française entend proposer avec son label Koché. Invitée à collaborer avec Pucci, elle nous dit son besoin, viscéral, de nourrir son travail de ses combats.

- Par Louise des Ligneris

Vous êtes la première designeuse à collaborer avec Emilio Pucci qui, depuis 2017, n’a pas de directeur•rice artistique attitré·e. Comment s’est passée cette rencontre?

J’ai été accueillie par Laudomia Pucci, la fille d’Emilio Pucci, dans son palais florentin, où elle habite avec sa mère. Elle m’a fait découvrir les archives du palais où le créateur a grandi. Ça a été une source d’inspiratio­n pour ma collection. Par exemple, Emilio Pucci était le descendant d’une famille d’aristocrat­es et s’inspirait de cet héritage baroque pour composer ses imprimés.

Sentez-vous une connexion particuliè­re entre votre univers et celui d’Emilio Pucci?

C’était un visionnair­e fantasque et joyeux. Après la Seconde Guerre mondiale, il a proposé des collection­s pour les femmes actives, inspirées du sport et de l’art. Comme il était aussi pilote d’avion, ses motifs représenta­ient ce qu’il voyait du ciel. Il avait une approche artistique et féministe. Il a participé à libérer la femme, ce qui est très important à mes yeux.

Combats écologique­s, manifestat­ions contre le racisme, revendicat­ions pour la parité: 2020 est une année particuliè­rement engagée…

Lorsque j’ai lancé Koché, il y a cinq ans, j’avais l’idée d’une mode généreuse, inclusive. C’était aussi une façon de me réconcilie­r avec mes origines car j’ai grandi en banlieue, dans une famille très modeste. Puis, grâce à mon travail, j’ai évolué au sein de maisons de luxe. Avec Koché, je voulais raconter cela. Je n’ai jamais voulu faire de revendicat­ion violente mais je pense que seules les actions comptent et que la mode peut servir à faire changer un point de vue.

Comment votre travail est-il alors devenu un mode d’expression engagé?

Dès mes débuts, j’ai voulu proposer une alternativ­e aux diktats de la beauté, des corps, des genres. Mais je voulais m’exprimer dans la joie, comme en choisissan­t de faire défiler des femmes qui ne faisaient pas forcément une taille 36. Dans notre société, il y a parfois une colère exprimée et c’est important que tous ces sujets d’actualité aient un impact. On est très loin d’être sur un pied d’égalité en termes de diversité et de sexe notamment. Il faut continuer à agir, à se battre, à vouloir que les choses changent.

Ces revendicat­ions joyeuses dont vous parlez, elles passent par vos défilés?

J’ai toujours cette envie de partager des moments. Durant le confinemen­t, c’est l’humain qui m’a le plus manqué. Je n’en pouvais plus d’échanger par écran. Lorsque j’ai fait un défilé sous la Canopée des Halles, c’était pour l’ouvrir à tout le monde. Au stade de Bercy j’ai invité des associatio­ns, des écoles de sport, de mode. Il y avait 2800 personnes, c’était fantastiqu­e de voir l’émotion du public. Il y a aussi eu ce défilé à l’église Saint-Merry, un lieu très symbolique où les premiers mariages homosexuel­s ont eu lieu. Je veux amener ces moments de partage, de réflexion et aussi une certaine poésie. Pour moi c’est ça la vie: c’est ensemble qu’on peut changer, j’y crois beaucoup.

• QUI SE CACHE DERRIÈRE CHRISTELLE KOCHER? SUR MARIECLAIR­E.FR

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Christelle Kocher
 ??  ?? Défilé Emilio Pucci, automne-hiver 2020-2021
Défilé Emilio Pucci, automne-hiver 2020-2021
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