Marie Claire

Benjamin Voisin

À 23 ans, l’acteur embrase Été 85*, le nouveau film de François Ozon. Grand lecteur, il choisit ses projets sans compromis, mais avec l’insoucianc­e de la jeunesse.

- Par Maroussia Dubreuil

1

LANGUE À 13 ans, il séduit par la tchatche sa camarade de classe Maria dans la cour du collège Claude-Bernard, dans le

16e arrondisse­ment parisien.

« Elle était l’Espagne à elle seule, un accent magnifique, des formes latines, c’était une femme parmi les enfants. Ses bras savaient parfaiteme­nt se positionne­r sur ma nuque, sa langue contrôlait la musicalité du baiser, c’était Schubert dans sa bouche.» Quelques semaines plus tard, il vit son premier chagrin d’amour.

2

MARS Lecteur invétéré, surnommé « Rimbaud » par ses copains, il aime l’insoucianc­e qui émane des romans de Milan Kundera,

La vie est ailleurs et L’insoutenab­le légèreté de l’être qu’il dévore à 16 ans. « Cela a quelque chose à voir avec l’enfance. Quand tu es petit, si tu perds aux billes, au pire tu les récupères en filant trois bonbons en échange et c’est réglé. » Adolescent, il se passionne pour l’autobiogra­phie Mars du Suisse Fritz Zorn qui, atteint d’un cancer à 32 ans, « se met à découvrir et à ressentir la vie parce qu’il sait qu’il va la quitter».

3

URGENCE Après avoir stagné à 3/20 de moyenne en classe de terminale, il bûche les deux derniers mois à la bibliothèq­ue et obtient son bac du premier coup. «J’aime travailler dans l’urgence. Pour le jeu, c’est pareil, je travaille beaucoup mais je ne me prépare pas trop à l’avance pour éviter de perdre la spontanéit­é.» Aucun problème donc pour enchaîner l’an dernier, à une semaine d’intervalle, les tournages d’Été 85 et Comédie humaine de Xavier Giannoli, d’après Balzac, dont il tient le rôle-titre.

4

CARTE BLEUE Fils d’un professeur de théâtre et d’une mère comptable, il reconnaît avoir eu « une enfance parfaite » : d’un côté le goût pour l’art, de l’autre le pragmatism­e. Aujourd’hui, il a confié la gestion de son argent à sa mère : « Je n’ai même pas de carte bleue à mon nom. Quand j’ai trop dépensé, je sais qu’il faut que je me restreigne jusqu’à la fin du mois. Je rejoins le metteur en scène David Clavel quand il dit : “Les meilleurs acteurs sont les plus économes.” Il y a un vrai discours derrière tout ça car dans ce monde capitalist­e, épargner permet de choisir ses projets.»

5

QUAI BRANLY Il y a trois ans, il achète sur leboncoin.fr sa première moto, une Yamaha XSR700 rouge sang. «À cette époque, je n’avais pas encore le permis, ça m’a forcé à le passer en trois semaines. Mais huit mois plus tard, je l’ai plantée dans un virage quai Branly, à Paris. J’ai vraiment abusé d’elle, je bombardais sur la route.» Très vite, il remonte en selle et fait un peu plus attention. Sans avoir eu vent de sa passion, François Ozon lui offre le rôle d’un motard: « Il y a même deux ou trois scènes où David, mon personnage, ne parle que de choses techniques, d’accélérati­on et de vitesse.»

6

FLORENT En colocation avec Stefan Crepon, le geek pacemaker de la série Le bureau des légendes, il croit au talent de ses amis qu’il considère comme une « famille ». Parmi eux: Théo Christine

(qui incarnera JoeyStarr dans Suprêmes, d’Audrey Estrougo, le biopic sur NTM), Nadia Tereszkiew­icz, « la nouvelle Anna Karina» (Seules les bêtes, de Dominik Moll) ou encore Sami Outalbali (la série Sex education sur Netflix)… La plupart se sont rencontrés au Cours Florent, dont il garde un excellent souvenir: «Un de mes professeur­s, Cyril Anrep, est devenu mon coach pour le cinéma.»

7

SENTIMENTS Aujourd’hui, il privilégie son travail à une relation amoureuse stable: « Je crois que le couple à 20 ans est une perte de temps. Je vis des aventures. » En jouant le rôle d’un garçon bisexuel dans Été 85, il est avant tout fier d’avoir tourné une histoire d’amour universel: «On s’en fiche que ce soit deux hommes ou un homme et une femme qui s’embrassent, ce qui compte, c’est les sentiments dans la veine des Call me by your name de Luca Guadagnino,

120 battements par minute de Robin Campillo ou Plaire, aimer et courir vite de Christophe Honoré. »

(*) Avec aussi Félix Lefebvre, Valeria Bruni Tedeschi, Isabelle Nanty, Melvil Poupaud… En salles depuis le 14 juillet.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France