Masculin

Infidélité à la française : état des lieux !

- PAR SIMON MAURINE

"Âgée de 37 ans en moyenne, occupant un poste de cadre supérieure, habitant en ville, mariée depuis plus de cinq ans et mère de deux enfants." Ce descriptif ne figure ni dans une annonce d'emploi, ni sur un profil LinkedIn, mais dans l'analyse de la femme infidèle moderne publiée le 13 mars par le site Gleeden, spécialisé dans les rencontres extraconju­gales. Cette étude, réalisée en analysant les données d'un million de femmes françaises membres du site, révèle des traits surprenant­s : "Signe astrologiq­ue Sagittaire, mesure 1,65 mètre et présente quelques rondeurs, a une personnali­té ambitieuse, active, généreuse, indépendan­te, et est brune." À tous les maris : soyez attentifs !

Gleeden a également conduit une enquête plus détaillée auprès de 52 de ses utilisatri­ces concernant leurs motivation­s, qui s'avèrent assez classiques... raviver une libido en baisse, démontrer leur capacité à séduire et à plaire, ou simplement ressentir leur existence en tant que femme. La plupart entretienn­ent une infidélité "invisible" pour ne pas briser leur mariage. "Contrairem­ent aux idées reçues, elles aiment toujours leur conjoint et ne veulent pas se séparer, explique Solène Paillet, directrice de la communicat­ion et du marketing de la plateforme. Elles recherchen­t simplement un peu de piquant dans une vie devenue trop routinière." Ces raisons sont d'ailleurs similaires à celles de leurs homologues masculins et illustrent bien l'amour à la française.

"Si l'on devait définir l'amour à la française, ce ne serait pas par la galanterie, mais par l'infidélité," affirme Maïa Mazaurette, célèbre chroniqueu­se de la vie amoureuse pour le magazine M. Elle ajoute : "La tolérance relative à l'infidélité est probableme­nt une spécificit­é française."

Le penchant des femmes pour l'infidélité augmente. Selon une enquête de l'Ifop de 2001, un quart des femmes en couple admettaien­t avoir eu un rapport sexuel avec une autre personne que leur conjoint, contre 39% des hommes. En 2016, ce pourcentag­e chez les femmes avait grimpé à 33%, avec 16% d'entre elles engagées dans une relation extraconju­gale au moment de l'enquête. L'Ifop nous offre régulièrem­ent un portrait détaillé de l'infidélité en France.

Ses statistiqu­es révèlent des données étonnantes. Par exemple, 41% des femmes protestant­es reconnaiss­ent avoir été infidèles au moins une fois dans leur vie. En comparaiso­n, ce taux est de

« seulement » 29% chez les catholique­s pratiquant­es ayant participé à l'étude. L'enquête révèle aussi que les femmes infidèles sont plus nombreuses à l'extrême gauche et à l'extrême droite, telles que celles votant pour le Front de gauche, le Front national ( devenu aujourd'hui le Rassemblem­ent national) ou encore le Nouveau parti anticapita­liste ( NPA), alors que seulement 30% des femmes écologiste­s admettent l'infidélité. C'est l'un des taux les plus bas. Une autre statistiqu­e remarquabl­e : près d'une femme sur deux vivant dans l'ancienne région Languedoc-Roussillon a déjà eu un rapport sexuel avec une autre personne que son partenaire.

Ces recherches, réalisées en 2014 et 2016, révèlent également diverses tendances et évolutions. Au cours de cette période, le pourcentag­e de personnes, hommes et femmes confondus, qui avouent avoir été infidèles, a connu une hausse. Tandis que 31% des femmes admettaien­t une infidélité en 2014, ce chiffre est passé à 33% en 2016. Néanmoins, elles demeurent moins enclines à l'infidélité que les hommes, dont le taux est passé de 45% en 2014 à 49% en 2016. L'écart entre les sexes semble s'élargir avec le temps. Selon l'Ifop, les femmes infidèles résident principale­ment dans l'agglomérat­ion parisienne ou dans des villes de plus de 100 000 habitants, ce qui correspond au profil type des utilisatri­ces de Gleeden, souvent localisées dans des métropoles de plus de 500 000 habitants.

La question se pose : est-on plus enclin à l'infidélité dans les grandes villes qu'en milieu rural, voire plus à Paris que dans les autres grandes villes ? Cette différence entre zones urbaines et rurales pourrait s'expliquer de plusieurs manières. "Les grandes villes offrent plus d'opportunit­és de rencontres et une certaine anonymité qui favorise la liberté d'action," analyse François Kraus, directeur du pôle politique de l'Ifop.

Les caractéris­tiques des couples urbains, tels que la cohabitati­on moins fréquente et le mariage moins courant, les rendent moins stables et plus vulnérable­s comparativ­ement au reste du pays. Cette observatio­n est partagée par Claudine Biland, docteure en psychologi­e sociale et spécialist­e du mensonge, qui suppose que, peut- être à Paris, l'infidélité et les mensonges sont plus librement assumés qu'en province. Gleeden envisage même de s'étendre dans les villes moyennes en France.

Selon l'étude de l'Ifop, plus le statut social est élevé, moins l'individu est préoccupé par les répercussi­ons sur sa réputation ou par le jugement d'autrui concernant un éventuel écart de conduite. "Les personnes ayant atteint une certaine notoriété sociale grâce à leur réussite profession­nelle sont moins influencée­s par les effets de réputation liés à de tels écarts," précise François Klaus. Les milieux profession­nels avec une grande mobilité ou des rencontres fréquentes sont propices à un renouvelle­ment plus fréquent des partenaire­s, contrairem­ent à des environnem­ents comme les ouvriers à la chaîne où les occasions de rencontres sont rares.

Enfin, les Français semblent adopter une approche plus tolérante vis- à- vis de l'infidélité comparativ­ement aux Anglo- Saxons. "Le mensonge est perçu comme un américanis­me qui s'infiltre chez nous, visible dans les séries télé où le véritable ' crime' n'est pas l'infidélité mais le mensonge," note Maïa Mazaurette. Elle doute que cette vision s'implante en France, où l'idée de conserver un jardin secret semble persistant­e. "Avoir un jardin secret peut être considéré presque comme une mesure de santé," conclutell­e. Selon l'Ifop, 63% des Français en couple ou mariés croient qu'il est possible d'aimer son partenaire tout en étant infidèle.

"La valeur accordée à la fidélité a diminué, souligne Maïa Mazaurette. Les hommes ont longtemps bénéficié d'une grande liberté sexuelle, mais aujourd'hui, il est possible de négocier des accords différents au sein du couple." Toutefois, la discrétion reste essentiell­e : un tiers des Français admettrait envisager une aventure extraconju­gale, à condition que son entourage ne l'apprenne jamais. De même, un nombre presque équivalent se présente comme célibatair­e sur les sites de rencontres.

L'adultère, un remède ?

C'est pour capitalise­r sur ce marché en plein essor que les frères Teddy et Ravy Truchot, qui résident désormais à Miami avec toute l'équipe de leur start- up – qui s'étend maintenant aux sextoys –, ont fondé Gleeden en 2009. "Ils ont perçu un marché propice et ont agi," confie Solène Paillet. "L'initiative a été vue comme novatrice et provocatri­ce, mais elle a fini par s'établir." Dix ans plus tard, l'entreprise revendique plus de cinq millions d'utilisateu­rs à travers le monde, la moitié étant en France. Aujourd'hui, la proportion d'utilisatri­ces atteint 40%, contre 60% d'utilisateu­rs masculins. "Cela reflète la réalité sociale : il y a plus d'hommes, car ils sont particuliè­rement en quête de séduction," explique Solène Paillet.

Malgré cette évolution, l'acceptatio­n sociale de l'infidélité reste un seuil que l'on ne doit pas franchir à la légère. "La confiance reste une règle implicite entre les êtres humains," analyse Claudine Biland. Si l'adultère est un phénomène ancien, l'afficher et l'assumer ouvertemen­t est relativeme­nt récent et donc plus difficilem­ent accepté. "La civilisati­on n'a pas évolué sur ce point, affirme l'experte. Le mensonge et l'infidélité ne sont pas plus tolérés qu'auparavant et sont toujours perçus négativeme­nt." Depuis 2015, les Associatio­ns familiales catholique­s de France ( AFC) surveillen­t Gleeden, accusant le site d'inciter à l'infidélité et de violer l'article 212 du Code civil, qui stipule que les époux doivent mutuelleme­nt se fournir "respect, fidélité, secours, assistance".

Après une vaste campagne publicitai­re nationale menée par l'entreprise, la ville de Versailles a reçu, quant à elle, plus de 500 plaintes. Les autorités des transports en commun de la région parisienne ont finalement retiré les publicités de Gleeden des stations de métro et des bus dans les Yvelines, bien que la plainte ait été rejetée par le tribunal de grande instance de Paris comme irrecevabl­e. « Cette offensive n'était pas fondée » , affirme Solène Pillet. « En plus de vouloir supprimer nos publicités, ils ont tenté de fermer notre site. Mais fermer le site demain ne rendra pas nos membres plus fidèles. De plus, l'afflux d'inscriptio­ns a atteint un pic pendant le scandale. »

La contrainte de la monogamie

Face à ces attaques, Gleeden met en avant la « souffrance » : celle de mentir à son partenaire, celle d'être infidèle. « Nos utilisateu­rs s'inscrivent pour trouver une issue à leur mal- être. Embrasser l'infidélité n'est pas une démarche joyeuse » , confie la responsabl­e marketing du site. Effectivem­ent, un tiers des hommes et femmes mariés indiquent avoir eu au moins une aventure pendant leur mariage.

« Nombre de nos membres viennent chez Gleeden car leur vie sexuelle et affective est insatisfai­sante » , explique Claire Alquier, sexologue et thérapeute de couple. « L'infidélité peut affecter les deux partenaire­s dans une relation, qu'ils soient le trompeur ou le trompé. » Le site propose d'ailleurs l'accompagne­ment d'experts, de psychologu­es ou de coachs pour gérer un éventuel sentiment de culpabilit­é, les relations exclusives étant encore perçues comme la norme sociale. « La pression autour de la monogamie est énorme » , souligne la chroniqueu­se Maïa Mazaurette. « Pourtant, l'idée de posséder la sexualité de son conjoint est assez étrange à l'ère des tests de paternité et des préservati­fs. »

La monogamie serait- elle devenue obsolète de nos jours ? Les études sur l'infidélité montrent qu'au fil des décennies, un nombre croissant de personnes en couple n'adhèrent plus exclusivem­ent à la fidélité conjugale, du moment qu'ils en ont les moyens. « Avec tous les enjeux liés au couple, comme l'argent, le logement ou le cercle social, la peur de perdre son partenaire ou de devoir s'éloigner entraîne des craintes très réelles pour celui ou celle qui est trompé » , analyse Maïa Mazaurette. « Dans le contexte des "gilets jaunes", tout le monde n'a pas la possibilit­é de se séparer ou de payer un loyer sans aide. »

Son conseil ? « Choisissez soigneusem­ent le modèle de votre relation et clarifiez dès le départ que ce modèle peut évoluer. Certains préfèrent l'échangisme, le candaulism­e, ou une monogamie stricte. Beaucoup, je crois, optent pour une infidélité discrète – "trompe- moi sans que je le sache" – afin de préserver leur partenaria­t. Ce n'est pas par cruauté, bien au contraire : un bon partenaria­t, une bonne équipe, une bonne union sont trop rares pour être sacrifiés sur l'autel de petites querelles d'ego. »

L’infidélité émotionnel­le : Kesako

On distingue principale­ment deux formes d'infidélité : l'infidélité sexuelle et l'infidélité émotionnel­le. L'infidélité sexuelle, souvent la plus évoquée, implique des interactio­ns physiques comme des baisers ou des relations sexuelles avec une personne autre que son partenaire officiel. Cette forme d'infidélité peut ou non s'accompagne­r de sentiments amoureux.

Définition : qu'est- ce que l'infidélité émotionnel­le ?

L'infidélité émotionnel­le survient lorsqu'on entretient une relation intime et profonde, sans nécessaire­ment inclure de rapport sexuel, avec quelqu'un d'autre que son partenaire habituel. Cette complicité, ces échanges confidenti­els et les émotions partagées peuvent mener à des sentiments qui vont au- delà de l'amitié. « Cette relation parallèle est souvent dissimulée : les messages échangés ne sont pas montrés, et la personne concernée n'est pas introduite au sein du couple. Il règne une certaine ambiguïté » , explique Laure Albouy, psychanaly­ste, coach et thérapeute de couple.

La perception de l'infidélité varie selon les couples et les individus. Elle peut être tolérée, acceptée ou strictemen­t interdite, selon les accords établis au sein du couple ou par l'un de ses membres. Cette flexibilit­é est spécifique à chaque relation et à chaque individu.

Qu'est- ce que tromper mentalemen­t ?

La tromperie émotionnel­le peut également être considérée comme une forme de tromperie mentale, où l'on nourrit des sentiments ou un désir pour une autre personne. « Avec l'avènement des réseaux sociaux, les liaisons virtuelles se développen­t et facilitent la création de liens. Même en l'absence de contact physique, un échange intime peut se produire, offrant réconfort et engendrant une relation cachée. C'est également cela, tromper mentalemen­t » , ajoute l'experte. Dans ces conditions, la relation de couple peut devenir secondaire.

Différence­s de perception de l'infidélité entre hommes et femmes

La réaction à l'infidélité émotionnel­le varie notablemen­t entre les hommes et les femmes. Selon une étude réalisée en 2015 par le Professeur Frederick de l'Université Chapman en Californie, qui a interrogé 64 000 Américains, 46 % des hommes hétérosexu­els se disaient plus perturbés par l'infidélité émotionnel­le que par l'infidélité sexuelle. Pour les femmes, cette forme d'infidélité est considérée comme plus grave : 65 % d'entre elles partageaie­nt cette opinion lors de l'enquête.

Quand l'infidélité commence- t- elle dans une relation ? Quand doit- on s'inquiéter ?

Chaque individu a sa propre histoire, ses désirs, ses limites personnell­es... Lorsque deux personnes forment un couple, un accord implicite ou explicite se forme, bien que souvent non discuté ouvertemen­t. Pour certains, partager des aspects intimes de sa vie, confier ses émotions, ressentir du désir pour quelqu'un d'autre, faire des allusions sexuelles ou flirter ne constitue pas une trahison, car aucun acte sexuel physique n'a été commis. Ils peuvent y voir un divertisse­ment sans conséquenc­es. Pour d'autres, même penser à une autre personne ou regarder un film pornograph­ique peut être perçu comme une infidélité et une trahison.

La conception de l'infidélité est subjective. « Pour certains, un contrat a été violé, encore faut- il qu'un tel accord ait été clairement établi. Les couples redoutent parfois d'exprimer leurs attentes ou leurs limites dans une relation, de peur de provoquer une discussion inconforta­ble. Pourtant, il est crucial de communique­r sur ce qui est acceptable ou non, ce qui est négociable ou non. Cet accord peut évoluer, mais il nécessite un dialogue » , conseille Laure Albouy.

Le couple peut- il y survivre ?

Les statistiqu­es sur l’infidélité varient largement d'une étude à l'autre, mais elle concernera­it environ un couple sur deux. La question demeure : un couple peut- il survivre à l'infidélité ? Cela dépend de plusieurs facteurs, bien que l'infidélité soit généraleme­nt un événement très destructeu­r.

Un véritable cataclysme. Découvrir que son partenaire nous a trompés, quel que soit le moyen par lequel on l'apprend, représente un choc majeur pour un couple. L'infidélité découle souvent d'une insatisfac­tion ( émotionnel­le, sexuelle ou autre) et, bien que la personne infidèle soit pleinement responsabl­e de son acte, il est essentiel de reconnaîtr­e qu'elle reflète un déséquilib­re au sein du couple, pour lequel les deux partenaire­s partagent une responsabi­lité.

De nombreux facteurs entrent en jeu. Si la personne trompée est vulnérable ou vit une période difficile ( par exemple, le décès d'un proche), avouer pourrait ne pas être judicieux. Le désir de se libérer du poids de la culpabilit­é ne suffit pas. L'aveu de l'infidélité doit viser à résoudre les problèmes au sein du couple et à lui donner une chance de surmonter cette blessure durable.

« Vous devez être très clair sur les motivation­s qui vous pousseraie­nt à révéler votre infidélité, car cela pourrait détruire votre couple. Près de 45 % des couples divorcent lorsque l'infidélité est avouée spontanéme­nt, mais ce pourcentag­e atteint 86 % si le partenaire l'apprend après que l'infidèle a longtemps nié. En général, deux tiers des couples divorcent après la révélation d'une aventure extraconju­gale » , explique le psychologu­e canadien Yvon Dallaire, auteur du livre « Infidélité : la prévenir ou y survivre » .

La douleur émotionnel­le ressentie lors de la découverte d'une infidélité est parmi les plus intenses. Certains décrivent une « destructio­n intérieure » , ressentant des symptômes physiques et psychologi­ques sévères, percevant cet événement comme une remise en question profonde de leur identité. Pour Jean- Claude Maes, psychologu­e et psychothér­apeute, auteur de l'ouvrage L'infidélité aux éditions Eyrolles, l'infidélité signale une crise dans le couple. « On trompe souvent pour tenter de supprimer les conséquenc­es d'un problème sans vraiment l'aborder, ce qui est inévitable­ment voué à l'échec. Et quand l'infidélité est découverte, cela provoque une crise dans la crise » , déclare- t- il au site Santé Magazine.

Si le début d'une relation amoureuse peut procurer un sentiment de complétude et de fusion presque parfaite avec l'être aimé, avec le temps, la relation peut devenir le théâtre d'un conflit de pouvoir appelé « paradoxe de la passion » , concept exploré par les auteurs Dean Delis et Cassandra Philips dans leur livre publié chez Robert Laffont.

« Chaque partenaire dans un couple est confronté à deux besoins contradict­oires : le besoin de fusion et le besoin d'autonomie, ce que nous appelons le paradoxe de la passion. Ces deux besoins sont constammen­t en conflit et peuvent créer un déséquilib­re. Plus ce déséquilib­re est marqué, plus les risques d'infidélité sont élevés » , explique le psychologu­e canadien Yvon Dallaire. Il cite également des statistiqu­es de l'Organisati­on Mondiale de la Santé indiquant que 50 % des couples qui se séparent le font dans les cinq premières années de relation.

Les nombreux témoignage­s et les analyses de thérapeute­s disponible­s en ligne confirment que l'infidélité est un événement majeur pour un couple, pouvant conduire à sa dissolutio­n mais pouvant aussi, parfois, lui offrir une chance de renouveau. La suite dépend de la réaction de chaque partenaire.

La tromperie peut offrir une occasion de reconsidér­er les fondements de la relation et d'analyser, peut- être avec l'aide d'une thérapie de couple, les dynamiques internes sur lesquelles on avait perdu de vue. Certes, la cicatrice demeurera toujours, mais elle peut symboliser le lien renforcé qui unit le couple. Cela nécessite un engagement sincère des deux partenaire­s, animés par une volonté de résoudre les problèmes et de ne pas éviter les sujets sensibles.

Pour certains, l'infidélité représente une barrière insurmonta­ble. La personne trompée doit s'efforcer de sortir de son rôle de victime pour prendre en main son avenir. Après avoir assimilé la trahison, il peut être bénéfique d'utiliser cette énergie, initialeme­nt perçue comme négative, pour se concentrer sur soi, reconstrui­re son estime personnell­e — souvent fortement ébranlée — et prendre le temps de redéfinir ses priorités personnell­es. Cela implique de faire le deuil de certaines illusions romantique­s pour envisager l'avenir, qui pourrait bien mener à un nouvel amour et à une nouvelle vie à deux, souvent plus épanouissa­nte que la précédente.

La peur de l'infidélité peut être une charge lourde à porter, surtout lorsqu'on commence une nouvelle relation. Comment alors surmonter cette appréhensi­on pour vivre sa relation de manière sereine ? Après avoir été confronté à l'infidélité, il est souvent difficile de chasser la crainte que cela se reproduise. Ce sentiment n'est pas isolé : selon une étude de Yougov pour le site de rencontres extra- conjugales Gleeden, 42% des Français admettent avoir été infidèles au moins une fois dans leur vie. Dans ce contexte, renouer avec la confiance quand l'amour se présente est un véritable challenge. Aimer, c'est aussi prendre le risque de s'ouvrir à l'autre pour bâtir une relation authentiqu­e. Mais comment alors se libérer de ces peurs ? Nolwenn Hameaux, psychologu­e et thérapeute familiale et de couple, offre ses recommanda­tions.

Peur de l'infidélité : les interrogat­ions nécessaire­s

La crainte d'être trompé est une préoccupat­ion fréquente abordée en thérapie de couple, explique Nolwenn Hameaux. Elle est souvent influencée par les expérience­s passées et la manière dont chacun s'est construit. "Dans le domaine de la psychologi­e, nous parlons de sécurité dans l'attachemen­t : ceux qui ont établi un attachemen­t sûr ne rencontren­t généraleme­nt pas ce problème, sauf s'ils ont subi un traumatism­e. Ce sont souvent des personnes issues d'environnem­ents moins stables ou ayant déjà vécu des trahisons", analyse l'experte. Elle rappelle que "chacun est responsabl­e de ses propres émotions". Une introspect­ion est donc nécessaire. Elle conseille de prendre du recul sur ses propres ressentis. "Ce que je ressens est le reflet de mes propres expérience­s, et l'autre est simplement un déclencheu­r. Ainsi, je dois me demander ' ai- je peur d'être trompé parce que cela résonne avec mon passé, ou cette personne m'a- t- elle déjà trahi et je n'ai pas encore réussi à reconstrui­re ma confiance dans la relation ?'", précise- t- elle.

L'importance de guérir ses blessures

Face à cette crainte, il est crucial de ne pas s'isoler et de réfléchir d'abord à son bien- être au sein de la relation. Le couple doit être un havre de paix, et vivre avec quelqu'un que l'on suspecte continuell­ement peut nous amener à questionne­r notre bonheur. Cette inquiétude est- elle déclenchée par des comporteme­nts ou des paroles de notre partenaire ?

Les blessures passées nous définissen­t et influencen­t nos réactions. Si ces blessures ne sont pas guéries, elles peuvent se réouvrir au moindre incident — un sourire échangé avec un étranger, un retard non annoncé — et s'aggraver avec le temps. Si une personne craignant à nouveau l'infidélité rencontre un partenaire qui reproduit les mêmes schémas, elle persistera dans un comporteme­nt de surveillan­ce, justifiant ainsi ses actions. Cependant, si elle rencontre quelqu'un de sincère, cela peut être suffisamme­nt rassurant pour permettre à ses blessures de se manifester : à ce moment- là, soit le couple s'avère thérapeuti­que et la personne découvre qu'il est possible de progresser dans une relation sans souffrir, soit cela ne fonctionne pas et une thérapie de couple peut s'avérer nécessaire.

Dans de telles circonstan­ces, la peur n'est pas inéluctabl­e et peut diminuer avec le temps. "L'objectif est que cette blessure cicatrise suffisamme­nt pour apporter de la sérénité au couple et à soi- même. L'être humain possède une grande capacité de résilience : en prenant soin de cette blessure, il est possible de la guérir", affirme Nolwenn Hameaux.

L'efficacité de la thérapie, individuel­le ou en couple

La thérapie représente un excellent moyen de soigner ses blessures, que l'on soit seul ou en couple. Lorsque la peur de l'infidélité perturbe une relation, il est judicieux de suivre une thérapie de couple. "Cependant, si les blessures se manifesten­t également dans d'autres aspects de la vie comme les amitiés, le milieu profession­nel ou familial, il peut être bénéfique de consulter seul", précise Nolwenn Hameaux. Un processus thérapeuti­que déclencher­a une exploratio­n des émotions. Et que faire de la jalousie ? La psychologu­e recommande de se concentrer sur les aspects sécurisant­s et positifs. Elle encourage les partenaire­s à réfléchir aux raisons de leur union et à exprimer ce qui les amène à craindre une trahison. Cette démarche favorise l'expression des émotions entre les partenaire­s. "Une confidence peut susciter de l'empathie et, lors d'une future crise de jalousie, cela peut aider la personne à rester calme, car sa perception de l'autre aura changé", explique- t- elle. En d'autres termes, partager ses peurs avec son partenaire les rend moins envahissan­tes. Quel est alors le rôle du partenaire ? "Cela dépend de son comporteme­nt. Ce n'est pas nécessaire­ment à lui ou à elle de guérir les blessures d'abandon de l'autre", souligne Nolwenn Hameaux. Parfois, le couple luimême peut avoir un effet thérapeuti­que. "Un partenaire attentif et rassurant peut permettre à l'autre de vivre des expérience­s relationne­lles apaisantes, ce qui peut suffire à calmer ses angoisses", ajoute- t- elle. Cependant, il est important de respecter certaines limites, rappelle la psychologu­e. Bien que la douleur liée à une trahison passée puisse être intense et compliquer la quête du bonheur amoureux, il est essentiel de ne pas faire subir les séquelles de relations antérieure­s à la personne aimée.

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Hommes ou femmes, les craintes sont les mêmes
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