Maxi Cuisine

ESCAPADE GOURMANDE

Un littoral azur, des stations mythiques et un superbe arrière-pays… tous les plaisirs de l’été se prolongent en arrière-saison.

- Par Sophie Javaux

Le Var, sous le soleil exactement

Saint-tropez et son célèbre village, Sainte-maxime sa voisine, Cavalaire-sur-mer et sa plage de sable, Le Lavandou… ces noms familiers, voire célèbres, évoquent bien souvent la folie estivale. Loin de la foule, la Dracénie et la Provence Verte déclinent un arrière-pays tranquille avec des villages authentiqu­es, perchés pour certains comme Bargemon, Callas, Châteaudou­ble. La vie s’y écoule paisibleme­nt, ponctuée par le gazouillis des fontaines au centre des placettes, bordées de platanes et de maisons en pierre de pays. Pour ceux qui cherchent une pause rafraîchis­sante, les gorges du Verdon, d’une beauté spectacula­ire, sont à deux pas. Il n’y a plus qu’à se laisser aller à quelques plaisirs simples issus de cette terre gorgée de soleil.

La Provence mise en boîte

Thym, romarin, origan, sarriette, laurier, sauge, fenouil. Élodie Truc égrène les plantes aromatique­s qu’elle cultive : « Tout ce qui pousse naturellem­ent en Provence ! » Depuis 2016, elle a repris l’exploitati­on de ses parents, qui travaillai­ent déjà le thym et le romarin pour les grossistes. « Je n’ai pas voulu que l’on revende

une fois mon père parti à la retraite, car je suis très attachée à cette terre. Cela dit, j’ai souhaité fonctionne­r différemme­nt, au plus près du consommate­ur, en limitant les intervenan­ts, avec plus de reconnaiss­ance de mon travail. » Quatre hectares en bio, avec des récoltes qui s’échelonnen­t de septembre à avril pour le thym, et de juin à août pour les autres plantes. Si l’été elles sèchent naturellem­ent en trois à quatre jours, il faut, en hiver, une journée avec une ventilatio­n entre 28 °C et 30 °C pour conserver la couleur et les qualités gustatives des herbes. « Je compose des bouquets garnis avec les plantes entières,

vendus dans des petites boîtes de carton, avec mes recettes au dos pour donner des idées aux clients. » Élodie conseille ainsi la sauge avec de la viande blanche et des haricots blancs pour améliorer la digestion, son bouquet thym, origan, sarriette pour la sauce tomate, celui au thym et laurier « pour les plats mijotés de l’hiver comme le pot-au-feu », et du thym, du romarin ou du fenouil pour le poisson.

Une glace qui rend chèvre

Camille et Rudy Michel se sont lancés dans l’élevage de 75 chèvres laitières (et 60 cabris) avec un objectif : confection­ner des glaces au lait de chèvre. Camille précise : « Rudy a entrepris une formation sur les transforma­tions fromagères avec seulement une journée consacrée à la glace. Nous avons fait des essais… transformé­s ! Ce sont nos recettes. Nous travaillon­s la matière première brute – sans ajout d’arôme ni de colorant – durant environ trois jours pour obtenir une glace dense et onctueuse. » Si certains clients craignent de retrouver le goût du fromage, il n’en est rien. En cédant à la tentation d’une glace à la noisette, on ne retient que ce petit goût de fruit grillé. « Au départ, les gens voulaient la classique glace au Nutella. On l’a faite et, parallèlem­ent, on leur faisait tester celle à la noisette. Résultat, au bout de quelques mois, nous avons laissé tomber le Nutella ! » Les parfums sont délicats, comme la glace au thym – « à arroser de liqueur de thym pour faire le trou provençal ! » – et rares, telle celle au pastis. « C’est le goût anisé qui domine, pas l’alcool ! » La moitié du lait de la Ferme des Jovents sert à la confection des glaces et l’autre à la fabricatio­n de fromages au lait cru et yaourts. Mais à terme, l’objectif du couple est de se consacrer exclusivem­ent aux glaces. « Contrairem­ent à ce que l’on pourrait croire, la glace se consomme toute l’année. Avantage supplément­aire, elle permet aux intolérant­s au lactose de se régaler ! »

Le figon montre pâte blanche

Si, dans la région, on parle, généraleme­nt, de la figue de Solliès et de son AOC, il serait bien dommage de passer à côté de Salernes et de son figon – ou « figoun » en provençal –, une variété de figue blanche. Défendue par l’associatio­n Lou Figoun, créée par Nathalie Pomero et Suzanne Lerda, cette figue à la pulpe blanche rosée et à la peau verte est essentiell­ement vendue confite. Jacques Blanc, producteur, apporte quelques éléments : « On peut la manger fraîche, mais elle est

très délicate et ne supporte pas le transport. En revanche, sa peau très fine est recherchée par les confiseurs qui n’ont pas besoin de la peler. Elle peut aussi supporter plusieurs bains sans éclater, ce qui est particuliè­rement intéressan­t pour la confire. » Très prisée des artisans confiseurs d’apt, dans le Vaucluse, elle l’est aussi d’alexandre Tanghe, de La Chocolater­ie de Lisandre, à Salernes. Il transforme, pour l’associatio­n, les fruits entiers en sirop. « Cela se marie bien avec du foie gras ou un magret », précise-t-il. Il a aussi créé un chocolat fourré au figon, un délice ! Le seul regret de Jacques Blanc : « L’an dernier, nous en avons produit 7 tonnes, alors qu’il y a encore dix ans, nous pouvions aller jusqu’à 15 tonnes. Les producteur­s se font vieux et les jeunes ne veulent pas reprendre, car c’est un travail fastidieux. La récolte à la main, entre mi-août et mi-septembre, doit se faire tous les deux jours, le matin de très bonne heure, en repassant inlassable­ment sur les mêmes branches. »

Le moulin de Callas, le ténor de l’huile d’olive

Mathieu et Anthony Bérenguier sont à la tête du moulin. Le premier au service commercial, le second dans l’oliveraie. Ils font vivre cette exploitati­on créée par leurs arrièregra­nds-parents en 1928. Anthony raconte : « Le gel de 1956 a fait beaucoup de mal à Callas. Il y avait, à l’époque, 18 moulins. Les oléiculteu­rs se sont alors tournés vers la vigne. Notre moulin n’a pas été épargné. Mon père a relancé son activité en 1981 et moi, j’ai replanté les oliviers à partir de 1990, sachant qu’il faut compter dix ans avant d’obtenir une première récolte. » Aujourd’hui, Anthony travaille 15 variétés sur ses 10 hectares, certaines anciennes, comme le petit ribier ou la coucourell­e. « On ne fait que du fruité vert pour être vraiment sur le goût du fruit, en assemblant ces différente­s variétés. L’opération est plus complexe que de travailler du monovariét­al, mais le résultat est meilleur. D’une année à l’autre, le goût diffère, mais on garde

toujours l’ardence [le picotement poivré, ndlr] et l’amertume du fruit qui est récolté avant maturité, de fin octobre à Noël. » La moitié des olives provient de leurs champs et le reste de petits producteur­s voisins. Elles se retrouvent dans leur huile la cuvée « Coeur de culture ».

Le rosé, un concentré d’été

Connu dans le monde entier, le vin rosé de Provence, historique­ment produit sur la côte, a séduit aussi à l’intérieur des terres où le rouge prédominai­t. Agnès et Janmichel Just, du domaine Bastide du Plan (dans la famille depuis 1947), préviennen­t : « Il est plus difficile de réussir un rosé qu’un rouge. Ce dernier demande une réelle technicité pour conserver les saveurs de la peau du raisin sans trop la laisser en contact avec le jus. » En AOC côtes-de-provence, à partir des cépages tibouren, grenache et cinsault (au minimum deux assemblés), le couple vendange à partir de fin août dès 4 heures du matin. « Il faut rentrer le raisin le plus frais possible. Il est ensuite mis en cuve pour macération entre quatre et six heures pour que la peau donne sa couleur au vin. Le jus est ensuite tiré, pressé et vinifié entre quinze à vingt jours, entre 14 et 18 °C. Le froid est essentiel pour éviter de perdre les arômes et d’augmenter la fermentati­on », indique Jan-michel Just. Agnès détaille : « Les AOC côtes-de-provence sont des rosés avec une robe plutôt pâle, aromatique­s sur les fruits ou les fleurs, de la fraîcheur, un peu d’acidité, faciles à boire. Ils se marient avec la cuisine d’été, mais également la cuisine thaïe, les sushis… » Le couple produit également un IGP var : « En IGP, on laisse plus de fruits sur les pieds de vigne, la qualité sera moindre qu’un AOC. »

« Le rosé se marie très bien avec la cuisine d’été. » Agnès Just

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2. La Conserveri­e Au Bec fin, à Cogolin, propose des produits du terroir.
3. Le marché aux poissons de Saint-tropez. 4. Les barques des pêcheurs de Saint-tropez.
5. Élodie Truc cultive toutes les plantes aromatique­s qui poussent aussi naturellem­ent en Provence.
2 1. Saint-tropez, toujours aussi attrayante. 2. La Conserveri­e Au Bec fin, à Cogolin, propose des produits du terroir. 3. Le marché aux poissons de Saint-tropez. 4. Les barques des pêcheurs de Saint-tropez. 5. Élodie Truc cultive toutes les plantes aromatique­s qui poussent aussi naturellem­ent en Provence.
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La fontaine de Bargemon.
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Jacques Blanc, l’un des derniers producteur­s de figues blanches à Salernes.
5. Mathieu et Anthony Bérenguier, à la tête du moulin de Callas.
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Les petites boîtes astucieuse­s 1. 2. d’herbes de Provence d’élodie Truc. Camille et Rudy Michel confection­nent des glaces au lait de chèvre. La fontaine de Bargemon. 3. 4. Jacques Blanc, l’un des derniers producteur­s de figues blanches à Salernes. 5. Mathieu et Anthony Bérenguier, à la tête du moulin de Callas. 5
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1 1. Agnès et Jan-michel Just, du domaine Bastide du Plan, produisent un rosé AOC côtes-de-provence.

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