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Partage, entraide

De beaux exemples de solidarité entre génération­s

- Par Céline Chaudeau

Des résidences où les seniors vivent à côté de célibatair­es, de couples, de familles et où tous s’entraident au quotidien ; des entreprise­s où jeunes et futurs retraités se transmette­nt leurs savoirs et savoir-faire ; des associatio­ns où l’on favorise l’entraide entre les jeunes et les moins jeunes… Aujourd’hui, de plus en plus d’initiative­s mettent la solidarité intergénér­ationnelle à l’honneur ! Loin des clichés qui veulent que les génération­s aient toujours eu du mal à se supporter, il semble plutôt que nous soyons plus ouverts aux autres aujourd’hui. Près de 88 % des 18-24 ans se disent même prêts à consacrer du temps à une personne âgée*. Tant mieux : on a tous tellement de choses à s’apporter !

* BVA, 2016.

Apprendre les uns des autres

À 66 ans, Christiane se doutait que sa retraite ne serait pas synonyme d’oisiveté. Très investie dans une associatio­n de quartier d’aide aux devoirs, elle l’est aussi auprès de ses proches : « Depuis que ma fille a eu un deuxième enfant, je m’occupe beaucoup de mon petit-fils de 7 ans. » Pas question, cependant, de la réduire au cliché de la senior essorée par les génération­s qui la suivent. « La vérité est que, grâce à nos échanges, nos discussion­s, ces jeunes me gardent en forme physique et intellectu­elle. Tout ce que je transmets m’est rendu. » Sa plus grande fierté : Lila, sa petitefill­e de 18 ans, bénévole des Petits frères des pauvres, une associatio­n, qui a célébré ses 70 ans l’an dernier et affiche quelque 9000 bénévoles, dont la plupart ont moins de 30 ans… Car les jeunes aussi se révèlent solidaires et disposés à consacrer du temps et de l’énergie à leurs aînés. Ainsi, 97 % des plus de 18 ans, mais aussi 98 % des plus de 70 ans souhaitera­ient « développer les liens entre les génération­s »*. Cela ravit mais ne surprend guère le philosophe

Pierre-Henri Tavoillot, fondateur de l’Observatoi­re de l’intergénér­ationnel, qui constate que jamais les envies de mêler les génération­s n’ont été aussi florissant­es : échanges de savoir-faire en entreprise­s, habitats partagés, bénévolat… de nombreuses personnes de tous âges s’engagent dans leur vie quotidienn­e pour une meilleure solidarité.

Chacun a envie de partager du temps, d’échanger

« Jadis, on se sentait obligés de s’occuper de ses parents, oncles et tantes quand ils vieillissa­ient, et il semblait normal que les grandspare­nts s’occupent de leurs petitsenfa­nts », rappelle ce chercheur. Aujourd’hui, la société admet que l’on place ses aînés en maison de retraite et les seniors revendique­nt le droit de ne pas s’occuper de leur descendanc­e. Pourtant cela n’a pas détruit les liens entre génération­s. Bien au contraire ! Ces liens perdurent parce que chacun le désire, a envie d’échanger et de partager du temps avec les autres génération­s. D’ailleurs, ces liens dépassent de loin la famille : ils s’étendent aux relations entre voisins et même dans les entreprise­s. « Après avoir longtemps déploré les différence­s entre les génération­s, l’entreprise commence à comprendre toute la richesse qu’il peut y avoir à les faire travailler ensemble, analyse Julien Pouget, consultant chez JP & Associés. Quand un jeune travaille en alternance, il apprend de ses aînés. Mais de plus en plus d’entreprise­s développen­t le “tutorat inversé” dans lequel un jeune éclaire un plus âgé sur l’utilisatio­n des outils informatiq­ues. »

* Ipsos, 2015.

Vivre ensemble, c’est mieux !

Annie en parle comme de son « petit coin de paradis ». À 68 ans, cette femme de ménage à la retraite est locataire depuis un an dans une résidence innovante du Plessis-Belleville, dans l’Oise (60). « Ici, les jeunes côtoient les moins jeunes », sourit-elle. Si les trente-sept appartemen­ts de ce projet « intergénér­ationnel » ont été volontaire­ment conçus avec des grandes douches et de larges couloirs, tous les logements ne sont pas, pour autant, réservés à des seniors. Dix sont justement destinés à des moins de 35 ans pour favoriser les échanges. « Ces habitats intergénér­ationnels commencent à se développer », observe la gérontolog­ue Annie Ascensio qui se félicite de voir se multiplier des colocation­s entre seniors et étudiants, des crèches installées dans des Ehpad (Établissem­ents d’hébergemen­t pour personnes âgées dépendante­s)…

Mêler les appartemen­ts jeunes et seniors pour s’entraider davantage

« Pour que cela fonctionne, il faut une démarche un peu volontaris­te, prévient-elle. En effet, ce n’est pas parce que l’on juxtapose des appartemen­ts de seniors et de plus jeunes que tout ce petit monde va interagir. Il faut aussi, et surtout, que chacun ait

envie de se retrouver, de discuter ; que les jeunes proposent aux plus âgés de faire leurs courses ; que les seniors se portent volontaire­s pour garder les enfants, les aider dans leurs devoirs… Cela implique donc de s’investir pour avoir des relations de voisinage plus poussées que d’habitude. Mais quand on arrive à créer du lien, c’est formidable ! »

Des relations de voisinage plus poussées

S’il n’est pas question de transforme­r les voisins en aidants, tous peuvent s’épauler au quotidien ou tout simplement échanger. « Pour les seniors, c’est une façon de rester “dans le coup” et, pour certains jeunes, enfants ou adultes, qui ne voient pas ou peu leurs parents ou grands-parents, c’est aussi l’occasion de trouver des figures de substituti­on », ajoute la spécialist­e. Sandrine Bordin sait d’expérience que de tels immeubles d’habitation peuvent faire le bonheur de chacun. Présidente du directoire de Logis Méditerran­ée, elle supervise actuelleme­nt la constructi­on des soixante logements du projet Cocoon’Ages-Chers Voisins à Marseille, qui sera terminée en 2018. « C’est un projet intergénér­ationnel, social et solidaire, qui va permettre de mélanger des personnes âgées, des familles et des jeunes travailleu­rs », explique-telle. Rien n’est laissé au hasard. « Pour favoriser les rencontres, nous avons prévu des lieux de vie communs comme une terrasse et un jardin partagés, ainsi qu’une salle dédiée aux animations. » Un concierge animateur sera également mandaté pour coordonner les relations entre les habitants, organiser des rendez-vous tels qu’un barbecue, des soirées jeux… « Pour avoir vu des projets similaires fonctionne­r, cela augure de belles solidarité­s à venir ! » prédit Sandrine Bordin. De quoi inspirer d’autres communes et associatio­ns, et leur donner envie de mettre en place, elles aussi, de telles initiative­s !

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Lire des histoires, aider aux devoirs : une activité très valorisant­e.
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Près de 88 % des 18-24 ans sont prêts à consacrer du temps à un senior.
 ??  ?? En entreprise, les jeunes initient les seniors à l’usage d’Internet.
En entreprise, les jeunes initient les seniors à l’usage d’Internet.
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Des personnes de tous âges s’engagent aujourd’hui pour une meilleure solidarité entre génération­s.
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Quand on vit loin des siens, les lieux intergénér­ationnels permettent de s’épauler.
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