Maxi

TÉMOIGNAGE « Grâce à mon potager, je vis au rythme des saisons ! »

À la recherche d’une vie calme et proche de la nature, Liliana a quitté l’univers du luxe pour planter des légumes et récolter ses fruits… et mieux profiter de ses enfants.

- Liliana

Quand je suis rentrée de mes trois semaines de formation en permacultu­re, une technique pour jardiner efficaceme­nt sans produits chimiques, j’ai tout de suite dit à Laurent, mon mari : « On vend ! On achète une ferme paumée, une vache, et voilà ! » Il connaît mon tempéramen­t enflammé et m’a tout de suite modérée : « Attendons de voir le passage de la théorie à la pratique… » Trois ans plus tard, il est convaincu : nous n’achetons plus de fruits et légumes, ou presque ! Nos deux filles de 5 et 8 ans, Stella et Tess, adorent me regarder faire, en me donnant un petit coup de main, manger sainement et délicieuse­ment les petits plats que j’ai aujourd’hui plaisir à mitonner, et on fait des économies substantie­lles. Bien sûr, je ne suis pas devenue jardinière en un jour : avant, je vivais dans l’univers du luxe ! Le virage à 180 ° s’est fait progressiv­ement. Comme les bonnes choses de la nature, il m’a d’abord fallu mûrir. Il y a trois ans encore, j’étais directrice d’exploitati­on sur deux propriétés de luxe, nombreuses dans notre région de Nice. Je gérais le vignoble et le personnel – chauffeurs, cuisiniers, paysagiste­s, femmes de chambre – une vingtaine de personnes et je veillais sur l’infrastruc­ture et la gestion des stocks de ces maisons qui menaient grand train. Entre Monaco et la Côte d’Azur, je planais dans un monde irréel, où l’argent n’avait aucune valeur. Mon mari gérait des chantiers, tandis que moi, je rentrais tard, les filles étaient petites. Quand j’avais du temps libre, j’écoutais des émissions de jardinage, école du bon sens et du plaisir simple. J’aimais notamment écouter Perrine et Charles Hervé-Gruyer, gestionnai­res de la ferme du Bec Hellouin, en Normandie, expliquer comment en plantant telle plante au pied de tel arbuste, elle bénéficiai­t d’un engrais naturel, secret de la permacultu­re. Le jour où je me suis retrouvée sans travail, l’une des propriétés étant vendue et l’autre se développan­t autrement, j’ai tout de suite filé chez eux me former. Nous avions un jardin autour de notre maison de Carros, dans les Alpes-Maritimes, mais il n’a pas échappé à mon mari que les fruits de mon jardinage ne remplacera­ient pas un salaire ! Pourtant, il m’a laissée partir toute seule à l’autre bout de la France, veillant sur les enfants, et j’ai suivi mon chemin. Un chemin bucolique bien loin des problèmes de piscine ! J’ai eu la foi pour jardiner parce que je prenais des risques, dont celui de diminuer le niveau de vie de toute la famille pour rien. Il a fallu que je m’adapte à une terre sèche, caillouteu­se, qu’il faut pailler, pour préserver l’humidité, plutôt qu’arroser, dans notre région assommée de soleil. Soucieuse de l’environnem­ent pour l’avenir, je préfère prendre les devants. On a adopté un système qui recycle l’eau de vaisselle, et bientôt de douche, pour le jardin. On lave le moins possible avec du détergent, écologique bien sûr. Nous avions des gros chênes et des tilleuls, et j’ai pris soin des oliviers pour avoir des olives et de l’huile, sans parler de l’amandier très généreux, des citronnier­s et des orangers. Tout l’hiver, j’ai de la mâche, du mesclun, du fenouil, des blettes, des radis. En février, vient le temps

Je ne suis plus du tout stressée et nous mangeons sainement “Grâce à mon potager, je vis au rythme des saisons !”

des fèves et, dans la foulée, des petits pois. Ensuite, j’ai des concombres, courgettes, poivrons, piments, aubergines… Et aussi des mûres et des fraises, et les vignes donnent un très bon raisin, J’ai également des oignons toute l’année. Quant aux tomates, un vieux monsieur me fait tester ses graines, car c’est un collection­neur de variétés multiples. Ma famille ne manque de rien, sinon des produits des terres du Nord bien grasses, les pommes de terre et les carottes. Pas bien cher à acheter si l’on en rêve vraiment. Parfois, les filles font un caprice : « Des abricots, on n’a pas d’abricots ! » Effectivem­ent, on ne peut pas tout avoir, alors je débourse quelques euros pour ces mets d’exception ! Mais ce qui a vraiment changé, c’est la vie de la maison. J’ai complèteme­nt changé de mentalité. Je vis reliée à la terre, mais aussi au ciel, c’est-à-dire au rythme des saisons. C’est moi qui emmène les filles à l’école, pas stressée du tout, comme avant quand je devais être en poste à heure fixe, et je me dis : « Aujourd’hui, je bouture telle plante, à moins que telle autre ait besoin de paillage »… À mes heures perdues, qui sont rares, je lis… des livres sur le jardinage. J’en ai acheté au moins quarante, que mon mari voit arriver en se demandant si je ne sais pas déjà tout. Mais non ! J’en apprends tous les jours. Mon mari ne rit plus de mes projets, parce que lui aussi y a gagné : je suis bien plus calme ! Et il mange des choses délicieuse­s. Quand une de mes filles m’a dit : « Maman, les parents de ma copine achètent des légumes en plastique ! » je lui ai expliqué que tout le monde ne gère pas sa vie de la même façon. Moi, en tout cas, je vis un rêve éveillé.

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