C’EST D’ACTUALITÉ Et si l’on s’acceptait telle que l’on est ?
En septembre dernier, des groupes de haute couture français ont signé une charte pour lutter contre l’extrême maigreur des mannequins. De quoi nous inciter à cesser de nous battre contre nos kilos superflus.
Aforce d’entendre parler de régimes miracles, de voir en permanence des corps jeunes et maigres sur des affiches publicitaires, beaucoup d’entre nous peuvent tomber dans une quête de minceur qui vire à l’obsession ! D’autant que, en même temps, on nous bombarde d’infos sur les risques du surpoids. Certes, entre maigreur et surpoids, il y a un juste milieu, mais il n’est pas si simple à trouver ! En attendant, même s’il est désormais démontré que les privations sont mauvaises quand on veut perdre du poids, il est difficile de ne pas succomber aux sirènes du dernier régime à la mode. Heureusement, de plus en plus de voix s’élèvent pour revendiquer le droit d’être bien dans son corps, quelle que soit sa silhouette.
Un poids qui nous obsède souvent sans raison ! Aujourd’hui, en France, six femmes sur dix déclarent vouloir maigrir !
Et pourtant, les Françaises sont les plus minces d’Europe ! (selon l’Étude internationale sur les idéaux de minceur, 2013). « Beaucoup de femmes commencent un régime alors qu’elles n’en ont pas besoin, affirme Ariane Grumbach*, diététicienne. Elles ont l’impression d’être trop grosses car elles ne ressemblent pas aux
mannequins et comédiennes très maigres qui sont aujourd’hui mises en avant comme des modèles de beauté féminine. Pourtant, 95 % des régimes échouent car ils impliquent de se priver d’aliments et créent ainsi des frustrations. » Or, personne ne peut se priver longtemps sans craquer. Ces femmes entrent alors dans l’engrenage des régimes à répétition, qui fonctionnent de moins en moins bien car leur poids fait le yo-yo : elles maigrissent, puis mangent à nouveau normalement et reprennent alors plus de kilos qu’elles n’en ont perdus, car leur corps s’habitue aux privations et stocke toujours plus. Pourtant, depuis de nombreuses années, différents régimes se succèdent : au début des années 2010, le régime hyperprotéiné, qui consiste à manger principalement de la viande, faisait fureur, puis ce fut la mode du manger cru, ensuite du régime dissocié (un jour on mange des laitages, le lendemain des légumes…). « Cela fait quarante ans que l’on subit ces dogmes, dénonce Laurence Haurat**, psychologue nutritionniste. Tous ont engendré beaucoup de souffrances chez les femmes car, quand elles ne perdent pas le poids désiré, elles culpabilisent. Or, toutes les femmes ne réagissent pas de la même façon face aux régimes : la méthode qui permet à l’une de mincir ne fonctionne pas sur l’autre. » Outre les régimes, les discours publicitaires sur l’alimentation – « Mangez cinq fruits et légumes par jour », « Mangez, bougez ! » – donnent parfois l’impression qu’il suffit de « bien » se nourrir pour garder la ligne et que, si l’on est ronde, c’est parce qu’on mange mal et n’importe comment. « Je n’arrive pas à être mince comme je le souhaiterais, confirme Sylvie, vendeuse, 52 ans. Pourtant je bouge, je fais attention à ce que je mange… Mais rien n’y fait. Comme si mes efforts étaient sans cesse insuffisants ou que je manquais de volonté. » Pourtant, la très grande majorité d’entre nous savons que certains régimes peuvent être nocifs. Mais les habitudes ont la vie dure. « La plupart de mes patientes viennent me voir parce qu’elles n’en peuvent plus des régimes et, paradoxalement, elles veulent perdre du poids ! », constate Laurence Haurat. Pour permettre aux femmes de s’accepter, quelle que soit leur silhouette, certaines marques sont engagées depuis longtemps contre le stéréotype de la femme très mince. Particulièrement connus pour cela, les cosmétiques Dove, mais aussi la lingerie Aerie n’utilisent plus de mannequins pour leurs campagnes publicitaires, mais des femmes avec leurs rondeurs et leurs imperfections.
* Auteure de La gourmandise ne fait pas grossir (éd. Carnets Nord). Plus d’infos sur arianegrumbach.com. ** Coauteure, avec Annabelle Demouron, de Ex-fan des régimes (éd. de La Martinière). Plus d’infos sur laurencehaurat.fr.
On peut manger sans se priver ! Entre les régimes particulièrement stricts et les conseils alimentaires totalement contradictoires, on finit par ne plus savoir quoi faire ni comment manger.
Et si la solution pour atteindre le poids que l’on désire était d’arrêter de se martyriser ? « J’aide les femmes à s’accepter comme elles sont », explique Laurence Haurat. Comment ? En leur apprenant à être à l’écoute de leurs sensations de faim et de satiété. En effet, quand on mange sans se restreindre, on sort de l’engrenage infernal du poids « yo-yo », avec ses grandes phases de privation et ses moments où l’on craque. « Pour transformer durablement ses comportements alimentaires, il faut sortir de la frustration, explique Ariane Grumbach. Il est donc important de manger ce que l’on aime à la quantité que l’on souhaite. » En effet, les femmes qui souhaitent perdre du poids pensent constamment à la nourriture : elles se demandent sans cesse ce qu’elles peuvent manger ou pas, à quel moment, combien de calories elles ont pris lors de tel repas, combien elles en ont perdu et, au final, elles finissent par oublier le plaisir de manger. C’est ainsi que se crée en supplément un énorme stress autour de la nourriture, or le stress contribue à faire grossir. Pour casser ce cercle vicieux et en finir avec l’obsession de la ligne, il faut parfois envisager un travail psychologique : a-t-on toujours vu sa mère au régime et, de ce fait, considère-t-on inconsciemment qu’une vraie femme doit contrôler le nombre de calories qu’elle ingère ? A-t-on eu des remarques lorsque l’on était enfant sur sa silhouette ? Réfléchir à tout cela permet peu à peu de faire la paix avec la nourriture. Et c’est souvent ensuite, lorsque l’on n’a plus peur de grossir et que l’on mange ce que l’on aime, que l’on se met à trouver des habitudes alimentaires qui correspondent à notre personnalité – un petit carré de chocolat par jour, parce que c’est bon ! – et à notre métabolisme. Et là, comme par miracle, on mincit durablement !