Maxi

TÉMOIGNAGE

Longtemps Marine a cru ce que lui avait dit sa mère. Elle a grandi en pensant que son père était mort jusqu’au jour où elle a eu l’intuition qu’il était vivant…

- Marine

« J’ai retrouvé mon père et c’est le bonheur ! »

Dès que je le peux, je m’échappe pour le retrouver. En ce moment, justement, j’habite chez lui avec sa femme et leurs enfants, en attendant la rentrée de septembre. Grâce à lui, j’ai hérité un jour de cinq frères et soeurs et d’une formidable belle-mère. J’ai aussi un autre frère et un beau-père du côté de ma maman. Bien sûr, je ne suis pas la première personne à vivre au milieu d’une famille recomposée. Mais la mienne est quand même un peu particuliè­re. Elle est, pour moi, le fruit d’un véritable conte de fées. En effet, je n’ai pas toujours eu une aussi grande famille, loin de là.

Quand j’étais petite, ma mère m’a dit que mon père était mort.

Pendant des années j’ai vécu avec l’idée que je n’avais pas de papa. Il ne m’avait pas reconnue à la naissance, je portais le nom de ma mère et c’était un sujet dont il ne fallait pas parler à la maison. Cela ne m’a pas empêchée de poser quelques questions. Je me souviens, un jour, quand je devais avoir 5 ou 6 ans, l’avoir quand même pressée pour savoir à quoi il ressemblai­t. Elle m’a alors donné une vieille photo en noir et blanc sortie de ses archives. Il y avait un prénom griffonné derrière. Frédéric. Évidemment, j’ai demandé : « Frédéric comment ? » Elle m’a répondu et nous n’en avons plus reparlé. J’avais, sans le savoir à l’époque, de précieuses informatio­ns dont je me servirai bien des années plus tard. En attendant, elle s’était mariée à mon beaupère, elle a eu avec lui un autre enfant et notre famille s’est longtemps résumée à ce cocon. Sur la photo, mon père était en uniforme. Ma mère m’avait dit qu’il était militaire et qu’il était mort au combat. J’avais alors toutes les raisons de la croire. Les premiers doutes sont arrivés à l’adolescenc­e. Je ne saurais expliquer pourquoi, mais j’ai commencé à avoir l’intuition qu’il était vivant. Avec le temps, ce sentiment s’est transformé en certitude. Je savais que mon père était quelque part.

J’ai retrouvé sa trace un 25 décembre, comme un merveilleu­x cadeau.

Je ne sais pas si l’esprit de Noël y est pour quoi que ce soit ou si je me sentais juste triste sans lui, mais c’est ce jour-là que j’ai eu l’idée de taper son nom sur Facebook. J’avais 14 ans et je me suis assise derrière l’ordinateur discrèteme­nt. Jamais je n’aurais imaginé que ce puisse être aussi facile ! J’avais un prénom et un nom et, soudain, à l’écran est apparue l’image d’un homme étrangemen­t familier. Il était très ressemblan­t à la photo que j’avais et j’ai tout de suite été certaine que c’était lui. Cependant, je ne me suis pas manifestée tout de suite. Sur sa photo de profil, il posait avec une femme que j’ai deviné être son épouse. Je me suis doutée qu’il avait peutêtre une famille et je n’ai pas jugé opportun de me manifester le jour de Noël. J’ai préféré laisser passer quelques jours sans en parler à personne, et surtout pas à ma mère. En janvier, je lui ai quand même envoyé un premier message, en vain. Je sais aujourd’hui qu’il avait bien reçu mon message et qu’il en avait été bouleversé : il n’avait aucune idée de mon existence. J’ai appris plus tard que ma mère lui avait écrit pendant sa grossesse, mais il avait changé de caserne et la lettre n’était jamais arrivée. Il n’a donc appris la nouvelle que quatorze ans plus tard, par moi…

Sa femme a aussi vu mon message et l’a encouragé à vite me répondre.

Je crois qu’il a eu besoin d’un peu de temps pour digérer la nouvelle. Il a appelé une vieille amie à lui, qui connaissai­t ma famille, et qui lui a dit que cela lui semblait vraisembla­ble. Puisque nous habitions à 600 kilomètres l’un de l’autre, il m’a proposé un échange par vidéo. La première fois que nous nous sommes vus, nous nous sommes juste regardés, émus. Moi, j’avais des étoiles plein les yeux. Il m’a dit qu’il avait des enfants, trois filles et deux garçons. Soudain, une nouvelle famille m’a ouvert les bras. J’ai découvert que j’avais aussi de nouveaux grands-parents. À partir de ce moment-là, nous nous sommes ainsi parlé quasiment tous les jours, en cachette,

J’ai grandi loin de lui, mais nos caractères se ressemblen­t !

pendant quelques semaines. Nous nous sommes vus « pour de vrai » un mois plus tard, quand il a pu se déplacer dans ma région. Même si nous n’avions aucun doute, nous avons décidé de faire un test ADN afin de pouvoir révéler la nouvelle sereinemen­t au reste de la famille.

« Maintenant, tu peux juste m’appeler papa ! »

Je n’oublierai jamais le jour où les résultats du test de paternité sont tombés. Mon père est marié à une femme incroyable qui m’a aussitôt ouvert les bras. Ensemble, ils m’ont présenté leurs enfants qui m’ont tout de suite acceptée comme leur grande soeur. Ils ont « partagé » leur papa avec moi et comprennen­t que nous avons des années à rattraper. Même si j’ai grandi loin de lui, je suis stupéfaite de voir à quel point nos caractères se ressemblen­t. Il n’y a plus de doute non plus aux yeux de l’état civil car il a pu, même tardivemen­t, me reconnaîtr­e en mairie. Il ne me reste plus qu’à inscrire son nom sur ma carte d’identité. Ce sera encore une belle étape à partager ensemble.

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