Maxi

« La greffe m’a donné un second souffle que j’entretiens par le vélo! »

Greffée deux fois des poumons, Sandrine en a retenu une sacrée leçon de vie et une folle envie de la dévorer à belles dents ! Avec une priorité : entretenir son souffle, notamment en faisant du vélo, une passion toute neuve !

- Sandrine Plus d’infos : dondorgane­s.fr et sur Facebook « associatio­n Ma vie mon souffle ».

Aun moment donné de mon existence, je me suis dit que j’étais née sous le signe de la malchance : naître avec une grave maladie respiratoi­re, c’est déjà difficile ; devoir subir une greffe des poumons à 40 ans, c’est encore plus dur. Alors quand, un an plus tard, à l’été 2013, j’ai fait un rejet – ce qui est très rare –, j’ai vraiment désespéré. C’était bien plus grave que la première fois parce que le rejet ne laisse que peu de temps à vivre, quelques semaines tout au plus. Et, pour ma première greffe, j’avais été sur liste d’attente pendant onze mois avant d’avoir la « chance » de recevoir un greffon qui me correspond­e. Je ne pouvais plus me permettre un tel délai. J’étais sûre que j’étais fichue. Je me suis juré que si, par miracle, je m’en sortais, je me battrai pour expliquer aux gens à quel point il est important de ne pas refuser le prélèvemen­t d’organe. En effet, la famille peut toujours s’y opposer. Finalement, le « miracle » a eu lieu ! Le 9 septembre 2013, on m’a appelée pour me dire de me présenter à l’hôpital, direction le bloc opératoire. J’étais remontée de Nice, où je vis chez ma mère, jusqu’en région parisienne où je suis suivie médicaleme­nt. Désormais en fauteuil roulant et sous oxygène par sonde nasale, j’étais choyée : j’étais tellement à bout de souffle que, faute de force, c’est ma petite soeur qui me lavait les cheveux ! Je connaissai­s le calendrier de ma convalesce­nce par coeur : trois mois d’hôpital, suivis de dix-huit mois chez ma mère. Après quoi j’ai enfin pu reprendre pied dans la vie, et cette fois définitive­ment, du moins je l’espère ! Je suis suivie tous les trois mois, mais mes nouveaux poumons peuvent durer toute une vie à condition que j’en prenne soin, évidemment. C’est déjà ce que j’avais fait la première fois parce que, pour moi, c’est un devoir moral : je n’oublie jamais la donneuse. Je ne sais rien d’elle, à part que c’était une femme. Et, au fond, je suis contente de ne pas en connaître davantage car, si je l’imagine, je la vois comme une personne formidable, très belle et pleine de qualités… Un genre de princesse, forcément, puisque ses parents ont accepté le don. Mais je sais que je n’aurais pas les mots pour remercier sa famille, alors la règle de l’anonymat me semble parfaite. Une fois de retour chez moi, à Nice, j’ai repris mon travail que j’aime tant dans le secteur de l’aide sociale, mais avec un temps aménagé. Je travaille à 70 %, c’est-à-dire sans le vendredi. Le mercredi soir, je sens déjà la fatigue arriver… Pour le reste, je dévore la vie, je trouve que tout est formidable du moment que je respire ! Je n’ai jamais eu autant de souffle : ma santé n’a cessé de se dégrader jusqu’à mes 40 ans, puis le rejet après la première greffe est arrivé très vite. Je goûte donc doublement le plaisir d’aller à la plage, de faire les magasins, de voir mes amis et, pour la première fois de ma vie, cet été, d’aller à l’étranger ! Je vais partir en vacances à Lisbonne, alors que jusqu’à présent je n’avais jamais eu le droit de quitter la France afin de rester près d’un établissem­ent hospitalie­r. C’était une grande frustratio­n tellement les voyages me font rêver depuis l’enfance. Désormais, mon souhait c’est d’aller à New York. Le frein est, comme pour beaucoup de gens, financier, mais il n’est enfin plus seulement médical ! Je suis entourée de beaucoup d’amis, le plus souvent rencontrés au travail, dont Sabine, une ancienne collègue qui est comme ma soeur. Ensemble on danse, on va écouter de la musique. Elle me dit parfois : « C’est fou, tu ne te plains jamais ! » Je m’y applique, même s’il y a des jours où je me sens vraiment raplapla. Mon secret, c’est les autres. Je milite dans de nombreuses associatio­ns caritative­s – dans le domaine de la santé, mais pas seulement –, et je chante dans une chorale, une découverte fantastiqu­e ! J’entretiens ainsi mon souffle en alliant le plaisir à l’agréable. Et puis ma grande découverte est venue d’un homme, Steve, que j’ai rencontré lors d’une Course des héros. Partout en France, ces événements rassemblen­t des

sympathisa­nts d’associatio­ns qui marchent ou courent ensemble pour mieux faire connaître leurs engagement­s. C’est en Normandie que Steve, greffé du poumon depuis ses 21 ans alors qu’il en a 42, a créé l’associatio­n Ma vie, mon souffle. Et c’est lui qui m’a initiée au vélo, qu’il pratique à haut niveau. Pour sensibilis­er au don d’organe, notre rencontre l’a poussé à faire Tancarvill­e-Nice à vélo, avec une arrivée saluée par l’équipe municipale. Bien sûr, il est accompagné par des coéquipier­s non greffés qui sécurisent le parcours, mais ça n’enlève rien à ses exploits ! C’est un peu comme quand on me reproche de faire du vélo à assistance électrique… Je réponds aux gens : « Essayez ma vie, et on en reparle après de la “facilité” ! » Depuis que je le connais, je suis motivée pour progresser et la piste cyclable Nice-Antibes, qui fait 32 kilomètres, est la meilleure invention qui soit à mes yeux. Du vendredi au dimanche, je parcours ce long chemin, à petite dose ou durant plusieurs heures si je suis en forme, je regarde la mer et je remercie la vie pour tout. On me demande parfois si ça ne m’ennuie pas d’être célibatair­e et sans enfant mais, à vrai dire, je n’ai pas eu le temps de me « prendre la tête » avec les histoires d’amour. Si ça arrive, je suis contente, et si ça n’arrive pas, je le suis quand même ! Chaque matin, quand j’ouvre les yeux, je pense toujours : « Merci ma petite étoile ! » Je crois qu’on m’a aussi greffé le sens de l’essentiel !

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