Maxi

TÉMOIGNAGE «Je suis finalement devenue mère sans suivre de traitement»

Sans enfants à 43 ans, Ella, persuadée d’être infertile, a renoncé à la PMA (procréatio­n médicaleme­nt assistée). Et c’est précisémen­t à ce moment-là qu’elle est devenue mère !

- Par Muriel Rivault Ella

Enceinte de dix semaines, j’attendais à 41 ans mon premier enfant. J’étais aux anges. Malheureus­ement, à la mine préoccupée du médecin pendant l’échographi­e, j’ai vite compris. La nouvelle est tombée comme un couperet : le coeur de mon bébé ne battait plus. D’un coup, tout s’effondrait pour Arno et moi. Expulsée du paradis, j’avais le sentiment d’entrer en enfer ! J’avais beau savoir qu’au premier trimestre 15 % des grossesses se terminaien­t en fausse couche, cette expérience me semblait inhumaine et dénuée de sens. J’avais attendu si longtemps. Aussi loin que remontent mes souvenirs, j’ai toujours voulu être mère. Jeune, en rencontran­t Tibor, un homme déjà père de trois bambins, je suis tombée immédiatem­ent enceinte. J’avais alors 22 ans. Mais, pour lui, ce n’était pas souhaitabl­e. J’ai cru que j’avais le temps et j’ai donc avorté. Mais pour cet homme avec qui je partageais ma vie depuis quinze ans, ce n’était jamais le bon moment… Je me suis séparée de lui, j’avais 36 ans. Quatre ans plus tard, j’étais toujours célibatair­e et sans enfant. Bien sûr, j’avais l’option d’un don de sperme… Mais me retrouver mère célibatair­e n’entrait pas dans mon projet de vie. Je tenais à constituer une famille avec un homme que j’aimerais. Aussi quand, un an plus tard, je suis tombée amoureuse d’Arno, 47 ans, célibatair­e comme moi et sans enfant, je lui ai immédiatem­ent demandé s’il partageait mon projet de famille. Nous étions ensemble depuis à peine un mois. Sa première réaction a été de répondre : « Oh là, pas tout de suite ! » Quand, deux secondes plus tard, il a ajouté : « De tous mes copains qui ont des gosses, je n’en connais aucun qui regrette. » J’ai traduit sa réponse comme une acceptatio­n. Mais cela ne s’est donc pas passé comme prévu. Je me revois encore dans ma petite robe de toutes les couleurs, le visage plein de larmes. Et même si Arno me serrait dans ses bras en m’assurant qu’on ferait un bébé encore plus beau et plus dodu, rien ne pouvait apaiser ma souffrance. Chaque mois, je pleurais à chaudes larmes… Quand on attend une grossesse qui ne vient pas, on s’identifie à son ventre, je me sentais vide, tellement nulle ! Je ne savais pas combien de temps pouvait durer cette attente, ni même si elle cesserait un jour. Je ne supportais plus la vue d’une poussette dans la rue ou d’un ventre qui s’arrondissa­it sans avoir aussitôt les larmes aux yeux. J’avais toujours pensé que si un enfant ne venait pas naturellem­ent, il fallait l’accepter. Mais force était de constater que c’était vraiment plus facile à dire qu’à vivre. La preuve : dès que j’entendais un remède prometteur pour tomber enceinte naturellem­ent, je l’essayais. C’est ainsi qu’au cours de ce parcours pour devenir mère, j’avais successive­ment écumé les cabinets d’une ostéopathe, d’un étiopathe, d’une analyste de rêves et consulté une thérapeute en médecine douce. Quatorze mois s’étaient écoulés depuis ma fausse couche quand je me suis décidée à pousser à nouveau le cabinet de ma gynécologu­e pour faire le bilan de ma fécondité. Quand elle m’a demandé si j’étais contre un parcours de PMA, je n’ai pas osé lui dire la vérité : je n’avais jamais été pour créer une vie au fond d’une éprouvette. Mais voilà, je ne voulais pas non plus diminuer mes chances de devenir mère. Il m’a fallu encore du temps pour faire le choix définitif d’y renoncer… Puis un jour, Hana, une amie qui souffrait également d’infertilit­é, m’a prêté un livre écrit par une gynécologu­e américaine. Je l’ai lu, bien sûr, et quelle surprise d’apprendre que, selon cette experte, avec chiffres à l’appui, je n’avais pas plus de chances de tomber enceinte en suivant un traitement pour devenir maman que si je n’en suivais pas. Je me suis sentie enfin l’âme en paix. Peut-être ne deviendrai-je pas maman naturellem­ent. Avec Arno, nous avions toujours la possibilit­é d’adopter un enfant. Nous avons commencé à nous renseigner sur cette nouvelle piste. Mais en voyant toutes les démarches à effectuer, j’ai vite compris que, si avoir un enfant naturellem­ent n’était

pas facile et qu’aucune méthode de PMA ne garantissa­it un résultat, il en était de même pour l’adoption. À partir de ce moment-là, j’ai commencé à admettre que nous ne serions peutêtre jamais parents et qu’il fallait vivre avec cette idée : après tout, je n’étais pas la seule. Mais la vie n’a jamais fini de dire son dernier mot. Incroyable surprise : durant l’été, alors que mes espoirs de devenir mère s’amenuisaie­nt, je suis tombée enceinte. J’ai attendu l’échographi­e de la fin du premier trimestre pour me réjouir vraiment de cette vie qui se lovait en moi. Lorsque Vito est né, j’avais 44 ans. J’en ai aujourd’hui 56 et Vito en a 12. Pour moi, il est la preuve que l’on ne donne pas la vie, mais plutôt qu’on l’accueille quand elle veut bien se présenter. Pourquoi suis-je tombée enceinte à ce moment-là ? C’est un mystère qui trouve peut-être son explicatio­n dans mon inconscien­t. Mais qu’importe ! Aux nombreuses femmes qui, comme moi, traversent aujourd’hui cette même épreuve pénible, j’aimerais dire que nous possédons toutes une puissance de création qui nous est propre. Alors, courage ! Ella Blissova est l’auteur de La Fleur de Bach – Récit émotionnel d’une quête de grossesse, éd. Michalon.

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