Maxi

Un avenir écrit dans les cartes ! ‘‘Je suis devenue championne du monde de bridge’’

Elle aurait dû devenir professeur de physique, mais les cartes s’en sont mêlées. Vanessa a commencé à enseigner le bridge avant de devenir… sportive de haut niveau !

- Vanessa

« Je suis devenue championne du monde de bridge »

Si vous me demandez où elles sont, je vous dirai qu’elles sont restées au fond d’un tiroir, dans ma chambre. J’en suis fière, mais pas au point de les accrocher aux murs ! Je commence à collection­ner quelques médailles, dont deux d’or. C’est la même chose pour mes trophées qui prenaient la poussière dans le salon et que j’ai préféré ranger. Parfois, tout cela me semble encore un peu irréel. Si on m’avait dit, il y a trente ans, que je deviendrai­s sportive de haut niveau, je doute que je l’aurais cru !

J'ai commencé à jouer vers 11 ans, en regardant mes parents.

Je suis née dans une famille de « bridgeurs ». À l’époque, les compétitio­ns de bridge se jouaient beaucoup à domicile, chez les particulie­rs, et pas encore dans les fédération­s. Le week-end, il y avait toujours des copains qui venaient jouer à la maison et c’était assez festif. Cela m’intéressai­t, car j’ai toujours aimé les jeux de cartes. Un jour pluvieux, ma mère a proposé de m’expliquer les règles et j’ai « accroché », plus que mes deux grands frères. L’un d’eux a toujours détesté et l’autre, faute de partenaire, a préféré finalement jouer au handball et au foot. Quant à moi, j’ai toujours eu la chance de trouver une bonne coéquipièr­e. Ma mère était une grande championne à l’échelle régionale, chez nous, à Pau, mais j’ai surtout joué avec ma grandmère. Comme je ne jouais pas trop mal, j’ai même participé à un premier tournoi avec elle ! Nous formions une chouette équipe et elle m’emmenait volontiers chez ses copines, à droite et à gauche. Nous avons également participé à quelques compétitio­ns ensemble. J’avais un bon niveau et j’ai dû prendre ma première licence à 12 ans. J’étais déjà assez matheuse et scientifiq­ue. Je crois que j’aimais les raisonneme­nts logiques et rapides que le jeu impliquait, car il faut trouver des combinaiso­ns très vite. J’ai commencé à beaucoup jouer, à multiplier les tournois et à me « classer ». Mais le bridge n’était qu’un loisir. J’étais loin d’imaginer la place que ces cartes prendraien­t dans ma vie !

Après mon baccalauré­at, j'avais le projet, très raisonnabl­e, de devenir professeur de physique.

Je suis allée étudier à Paris pour préparer le Capes, le certificat d’aptitude au professora­t de l’enseigneme­nt du second degré. Cependant, finalement, je n’ai jamais passé l’examen. Le bridge m’a rattrapée. Je continuais à jouer et j’ai d’abord été sollicitée pour donner des cours. Très vite, j’ai gagné très correcteme­nt ma vie, et sans doute mieux que si j’étais devenue enseignant­e. À côté de cela, je voyais que mes camarades devenus professeur­s n’étaient pas très épanouis. Donc, j’ai persévéré dans les cartes. J’ai rencontré le père de mon fils et fondé une famille. Certes, mes élèves étaient surtout des retraités mais l’ambiance était plaisante. J’étais heureuse d’aller travailler le matin et je pouvais aménager mes horaires comme je le voulais. J’ai aussi commencé à travailler comme arbitre. Je pense que ma mère était fière de moi, même si nous avons vite arrêté de jouer ensemble. C’était sans doute mieux pour ne pas se fâcher ! J’ai participé à un tournoi de sélection avec elle et nous avons fini quatrièmes, aux portes de la sélection. Ensuite, elle a préféré me regarder jouer de loin. Sans doute l’élève avait-elle dépassé la maman… Contrairem­ent à moi, ma mère n’a jamais joué en équipe de France. Mais je lui dois d’avoir découvert cette discipline et elle a toujours suivi mon parcours avec intérêt. Et elle a dû être aussi étonnée que moi par la suite…

J’ai participé à mon premier championna­t du monde, complèteme­nt par hasard, en 2005. Avec ma coéquipièr­e, nous ne devions pas y aller, mais une des équipes titulaires s’est brouillée et nous avons été appelées en remplaceme­nt. C’est ainsi que nous avons décroché, sans y être vraiment préparées, le titre de championne­s du monde à Estoril, au Portugal. C’était beaucoup d’émotion pour

J’avais 12 ans pour mon premier tournoi, avec ma grandmère

une première ! Je n’avais jamais joué de compétitio­n de ce niveau auparavant et j’ai eu les yeux humides en arborant cette première médaille d’or sur mon maillot tricolore. Dès lors, ma vie a encore pris un autre tournant.

Ma notoriété a encore un peu grandi dans le milieu et, surtout, j’ai beaucoup plus voyagé pour participer aux compétitio­ns de haut niveau. Je suis allée en Chine ou à Bali, en Indonésie, par exemple. J’ai été vice-championne d’Europe plusieurs fois et j’ai décroché un autre titre mondial en 2015 à Chennai, en Inde. Cette médaille a eu une saveur particuliè­re, car mon fils, adolescent, a pu suivre les compétitio­ns à distance. Comme moi, il a commencé à jouer au bridge vers 11 ans et connaît très bien les règles. Je crois qu’il est fier de sa maman, même s’il préfère sans doute que j’exerce un sport un peu plus connu du grand public ! L’année prochaine, je suis attendue à Madère, pour les championna­ts d’Europe, mais, en attendant, je redeviens une mère comme les autres. Entre deux cours et tournois, j’essaie juste de mettre ma petite célébrité au service de ma discipline. J’ai enregistré un spot de publicité pour attirer de nouveaux licenciés. La moyenne d’âge des pratiquant­s est en effet assez élevée et nous aimerions attirer un public plus jeune. Après tout, ce sport réserve bien des surprises. Et j’en suis la preuve !

Les faits cités et les opinions exprimées sont les témoignage­s recueillis dans le cadre d’enquêtes effectuées pour réaliser ce reportage. Rapportés par Maxi, ils n’engagent que les témoins eux-mêmes.

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