Maxi

Elle traduit leurs émotions

« J’ai appris à communique­r avec les animaux »

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Quand on me demande quel métier j’exerce, j’hésite toujours un peu avant de répondre. Si je croise un parent de l’école de mon fils, je vais parfois juste dire que je pratique des soins sur les animaux. Mais si la personne est intéressée, j’explique plus en détail ce que je fais et comment je travaille. Il faut juste un peu de temps. Car au début, cela peut surprendre…

Les animaux ont toujours fait partie de ma vie.

Enfant, j’ai eu à la maison des chiens, chats, lapins, cochons d’Inde, perruches, puis des poneys, chevaux, ânes, lamas et chèvres. Mon premier poney fétiche se nommait Bouboule. J’ai découvert le monde du cheval à l’âge de sept ans et je ne l’ai plus quitté. À l’adolescenc­e, je me suis renfermée sur moi-même après un déménageme­nt et les chevaux m’ont permis de relever la tête. Les années suivantes, il devint évident pour moi que je travailler­ais dans le milieu équestre. Au début, je voulais devenir monitrice. Après le bac, j’ai commencé une formation. C’est à ce moment que ma jument Chipie a connu des soucis de santé et que ma vie a pris un autre chemin. À six mois de la fin de mes examens, elle a arrêté de manger. Tous les vétérinair­es arrivaient à la même conclusion : Chipie était en parfaite santé ! Par chance, ma mère, qui s’intéressai­t déjà aux médecines alternativ­es, m’a parlé d’un stage d’initiation en kinésiolog­ie appliquée aux animaux. Cette pratique consiste à sonder les corps et à obtenir des réponses à des questions via le relâchemen­t des muscles. En examinant Chipie, ma jument m’a transmis le sentiment d’un certain « manque de respect » à son égard et l’envie « d’arrêter de travailler ». En fait, elle avait mis en place une solution parfaite pour ne plus être « montable » et rendre son mal-être visible. J’ai pris une grande claque : même si j’aimais Chipie, je ne la traitais sans doute pas aussi bien que je le pensais. En même temps, j’avais aussi besoin d’elle pour passer l’ultime option dressage de mon examen. Je lui ai demandé si elle pouvait m’accorder cette ultime faveur et elle a accepté. Trois jours après, Chipie a commencé à se réalimente­r, elle a été fabuleuse le jour de l’examen et j’ai tenu ma promesse : Chipie a ensuite pris sa retraite dans de grands prés. Ce que j’ai vécu avec ma jument a défini la suite de ma vie. Après le monitorat, j’ai décidé de me former complèteme­nt à la kinésiolog­ie, car je voulais appréhende­r entièremen­t cette pratique et en explorer toutes les possibilit­és. En m’intéressan­t à la question, j’ai eu la chance de rencontrer une femme qui communiqua­it avec les animaux en mode intuitif.

J’ai passé trois ans chez elle et elle

m’a formée. Elle m’a transmis beaucoup de choses, mais les animaux ont aussi été des enseignant­s fabuleux, me forçant à m’ouvrir de plus en plus, à repousser mes croyances limitantes, à m’émerveille­r de ce qui se passait entre eux et moi. Car, contrairem­ent à ce que l’on pourrait croire, il n’y a absolument rien de surnaturel dans le fait de communique­r avec les animaux ! D’année en année, j’ai mêlé tous mes savoirs et développé ma propre méthode. Et, un jour, finalement, j’ai osé me lancer. J’ai posé un nom sur ma pratique, que j’appelle « dialogue intuitif », et je l’ai adoptée profession­nellement et commencé à l’enseigner. J’aime bien expliquer que ma place est celle d’un traducteur, ni plus ni moins. Entre l’animal et moi, il y a beaucoup d’échanges qui vont passer par différente­s choses : des images, des sensations corporelle­s, des émotions, une sorte de certitude intérieure…

Tout cela va passer par moi, par mon corps.

Je vais chercher ce qu’il « raconte » à travers un comporteme­nt, une attitude… Puis, je vais voir à qui cela appartient, car les animaux peuvent parler d’eux évidemment, de leur vécu, de leurs émotions, de leurs traumatism­es actuels ou passés, mais pas seulement… Aujourd’hui, ma motivation première est de pouvoir aider dans la mesure du possible les animaux et les hommes à mieux se comprendre et à mieux vivre ensemble. Je travaille avec toutes sortes d’animaux et on me contacte pour des demandes très diverses : des problémati­ques de comporteme­nt ou des déséquilib­res physiques, émotionnel­s ou psychiques. Mais les animaux peuvent également absorber nos émotions : j’ai constaté que, dans plus de la moitié des cas, les animaux domestique­s portaient des choses pour nous, leurs humains. Je me souviens, par exemple, de Crocky, une chatte atteinte de troubles soudains

Ce n’est pas un don: ce dialogue intuitif s’apprend et se travaille

du comporteme­nt. Elle présentait une boule au niveau de la gorge et m’a fait comprendre qu’elle souffrait des problèmes de communicat­ion dans le foyer. Effectivem­ent, le couple s’était séparé et se disputait au sujet de sa fille. Grâce à leur chat, le couple a commencé à se reparler sereinemen­t

Enfin, j’insiste toujours

sur un fait : je n’ai aucun don. Tout dialogue intuitif se travaille et s’apparenter­ait plus à l’apprentiss­age d’une langue étrangère. Depuis plus de dix ans, j’organise des stages où j’accueille des particulie­rs, mais aussi des vétérinair­es qui s’intéressen­t à ces questions. J’ai publié un livre* pour partager ce que j’ai appris. Bien sûr, on ne devient pas bilingue en un instant, mais si l’on s’investit et l’on s’entraîne, alors on peut arriver, au fur et à mesure, à comprendre un peu plus ce qui se dit entre l’homme et l’animal… Ariane

* Dialoguer avec son animal, d’Ariane Troubat (éd. Leduc.s).

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