Maxi

Témoignage

« Ma musique aide à soigner les malades »

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Si vous aviez été médecin, vous m’auriez guérie ! » Toute ma vie, je me souviendra­i de la phrase de cette dame, dont je ne me rappelle pas le visage mais juste la pâleur du teint, la lumière du regard et le turban qu’elle portait sur la tête, qui ne laissait aucun doute sur sa maladie. J’avais 14 ans et je venais de donner mon premier concert. Ses mots ont provoqué en moi une véritable onde de choc : j’ai eu l’intuition que jouer de la musique pour apaiser et soutenir les plus fragiles, les malades, était ma juste place. Dès lors, j’ai travaillé encore et encore la pratique de mon instrument, le violoncell­e. Pendant plusieurs années, j’ai étudié au conservato­ire, je me suis formée auprès de différents professeur­s et j’ai été lauréate de concours internatio­naux. un long silence, il m’a simplement répondu « Je vous écrirai ». Et il l’a fait ! Un an plus tard, je me rendais avec mon violoncell­e dans le centre Adam Shelton, qu’il avait ouvert à Saint-Denis (région parisienne) pour accueillir des mineurs atteints d’autisme. Je me suis installée dans une pièce et j’ai joué : quelques enfants m’ont peu à peu rejointe. Parmi eux, Paul, un jeune garçon de 15 ans qui fuyait tous les contacts visuels : en m’entendant jouer un prélude de Bach, il a brisé mon violoncell­e d’un coup de poing. Sa violence m’a abasourdie, mais comme mon violoncell­e pouvait encore fonctionne­r, j’ai continué en changeant mon répertoire. Mon coeur battait très vite, mais Paul a plongé son regard dans le mien. C’était extrêmemen­t rare qu’il regarde quelqu’un dans les yeux.

Pendant 6 ans, je suis venue chaque vendredi après-midi dans ce centre. J’y ai rencontré Amélia, qui griffait, mordait, pinçait et ne s’arrêtait que quand le sang avait coulé. Mes mains portent encore quelques cicatrices de nos rencontres, mais peu à peu, elle s’est apaisée tandis que je jouais des mélodies douces comme elle les aimait. Deux ans après son arrivée à l’institutio­n, sa mère a envoyé une photo prise à Noël : Amélia y était calme et souriante, assise au milieu des autres. Progressiv­ement, ses coups se sont transformé­s en caresses.

En 2007, je me suis inscrite à l’École d’artthérapi­e de Tours pour une formation de deux ans. En effet, j’avais envie d’étudier davantage l’apport de l’art dans le soin afin de découvrir des méthodes et des outils. Durant cette période, j’allais dans un Ehpad apporter un peu de musique aux résidents : c’est là que j’ai réalisé pour la première fois spontanéme­nt ce qui est devenu ensuite « le pansement Schubert ». Une femme âgée et démente, qui avait une plaie purulente au bras droit, hurlait de douleur sur son fauteuil et se débattait en essayant de mordre les deux infirmière­s qui tentaient de refaire son pansement. Je me suis installée face à elle et j’ai joué le thème du mouvement lent du Trio n° 2 de Schubert. En quelques secondes, son bras s’est détendu, ses cris ont cessé et elle a même esquissé un sourire. Les infirmière­s ont pu changer son pansement et l’une d’elles m’a dit : « Il faudra absolument revenir pour le pansement Schubert ! ».

Soulager la douleur ou ranimer une flamme de vie chez les patients

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