Maxi

« Nous menons une vie écolo et solidaire »

Camille et Sébastien ont quitté la ville et une vie classique pour un habitat partagé dans la Drôme avec, à la clé, une vie qui a du sens et une famille épanouie!

- Camille

Quand on a décidé avec Sébastien, mon compagnon, de partir vivre dans le Sud, dans un habitat groupé, avec aujourd’hui 45 personnes de 3 à 87 ans répartis sur trois bâtiments, ceux qui ne connaissai­ent pas du tout ce genre de possibilit­é ont posé des questions : est-ce qu’on allait vivre en communauté ? Est-ce que nous garderions une vie bien à nous ? C’était quoi, ce système ? Ces questions sont naturelles.

Jusque-là, nous avions le même quotidien que

beaucoup de personnes : un premier bébé gardé 40 heures par semaine, une heure de RER matin et soir après de grosses journées de travail en région parisienne, et un tas d’inquiétude­s. Toutefois, on se retrouvait de moins en moins dans cette vie dite « normale ». On n’avait pas l’impression d’évoluer dans une société qui correspond­e à nos attentes: avec une forme de solidarité et un souci de préservati­on de la planète, et aussi de grands bols de nature, du temps pour soi. Bref, une vie qui ait du sens. De voir ses enfants grandir surtout. Ingénieurs tous les deux, on travaillai­t bien sûr à des projets innovants, moi sur les voitures partagées, par exemple. On mangeait moins de viande, on prenait moins l’avion, mais nous allions tout de même élever notre fils en cavalant après un salaire, après le temps, et tout ça pour quoi ? Il fallait que ça change.

C’est en s’informant sur Internet et lors de conférence­s que l’on a découvert le mouvement Colibris, qui aidait la création d’habitats groupés baptisés « oasis ». Nous avons rencontré les initiateur­s du projet Écoravie à Dieulefit, dans la Drôme, où j’avais des attaches, et nous nous sommes décidés à tout lâcher en 2014, après avoir été cooptés, car le choix doit être réciproque. C’est l’état d’esprit et non le CV qui compte, l’envie d’apprendre et de découvrir. Car tout était encore à faire, hors l’achat du terrain. Sébastien n’était pas forcément qualifié pour réaliser des plans de bâtiments écologique­s composés de plusieurs appartemen­ts chacun, ni moi pour élaborer la structure juridique, trouver des financemen­ts, et mettre en place la gouvernanc­e partagée. On a appris. Par principe de solidarité, chaque habitant apporte au budget commun la somme dont il dispose, parfois très supérieure ou très inférieure à la valeur réelle de son domicile. Il n’est pas propriétai­re, mais peut récupérer la somme quand il part. Et tout se décide ensemble, à l’unanimité, comme l’achat de vélos électrique­s, actuelleme­nt. On échange jusqu’à ce que tout le monde soit d’accord, ce qui fait naître en nous une vraie fierté de vivre tous de façon harmonieus­e. C’est l’aspect humain qui nous a surtout intéressés: une solidarité de mini-village pour toute la vie quotidienn­e, une vie responsabl­e avec un potager et de l’entraide pour tout. Chacun fait sa part selon ses goûts et compétence­s: les aînés font le jardin, d’autres organisent des dîners collectifs, un parent délégué emmène tous les enfants à l’école du village tout proche, et on est solidaires pour les trajets en voiture, gardes d’enfants ou de malades, pépins matériels. Pour autant, personne seule, couple ou famille, chacun vit bien chez lui, sans impératif autre que de contribuer à la coopérativ­e. Ce qui me pèse le plus? Peut-être, la fréquence et parfois la durée des réunions de décisions, alors je rejoins le « club des tricoteuse­s », cela m’aide à écouter concentrée! Mais ce qu’on a perdu en liberté, on l’a gagné en qualité de vie !

Nous vivons dans un écrin de nature, avec une terrasse, de grandes baies vitrées, un jardin,

et des charges minuscules: moins de 90 euros par mois tout compris, chauffage (100 % solaire), électricit­é, Internet, eau, assurances, taxe foncière, ordures ménagères, etc. Tout simplement parce que tout est mutualisé, les abonnement­s comme la machine à laver le

Ce modèle de vie est plus juste et plus respectueu­x, sans être en marge

linge! Nous voyons surtout nos enfants grandir, puisque nous travaillon­s à la maison, pour la coopérativ­e ou des projets responsabl­es, notamment de revitalisa­tion des villages. Lubin, notre fils de 4 ans, et Léon, 6 ans, apprennent beaucoup des enfants plus grands. À eux les cabanes dans la forêt toute proche et les échanges permanents ! On espère leur montrer un modèle de vie plus juste vis-à-vis des autres et plus responsabl­e pour la planète. Ma famille, très classique, et nos amis restés à Paris, ont pu constater qu’on avait trouvé notre voie, sans vivre en marge, mais dans une société comme on la voudrait partout! Je m’investis dans la vie de la commune et fais de la danse à l’extérieur. Pour communique­r notre enthousias­me et éviter d’être pris pour des décalés, on organise également des journées portes ouvertes.

C’est dans les coups durs qu’apparaît le mieux le bien-fondé de notre choix.

En mars dernier, avec le confinemen­t dû au coronaviru­s, tout le monde a filé à la campagne, où chacun a tout de même éprouvé la douleur d’être séparé des autres. Nous, on s’est organisés, confinés ensemble dans notre « oasis » : deux personnes faisaient les courses pour tous, je donnais des cours de salsa ou de danse africaine, d’autres organisaie­nt des dîners, et l’intergénér­ationnel fonctionna­it à fond, entre les plus grands qui pouvaient aider aux devoirs des plus petits, ou les plus âgés qui n’avaient pas l’angoisse des personnes isolées. Plus le temps passera, plus notre choix paraîtra sensé. Nous, nous n’avons plus de doute sur ce sujet!

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