Petits commerces, logements, animations…
Nos centres-villes reprennent enfin vie !
Depuis plusieurs décennies, nos villes, petites et moyennes, ont vu leurs centres se dévitaliser. En cause : l’engouement pour l’habitat en périphérie urbaine, la généralisation de l’usage de la voiture compliquant les déplacements dans les coeurs de ville, et l’essor du commerce en ligne qui a fait du tort aux petites boutiques. Pourtant, les magasins de proximité ont été plébiscités ces derniers mois, et de nombreux commerçants, habitants et élus se mobilisent afin de dynamiser nos centres-villes. Il est temps de les redécouvrir.
Le retour des commerces
Qui n’a pas été attristé par les rideaux fermés de nombreuses boutiques en plein coeur de nos
villes ? En France, le taux de boutiques vides est passé de 7,2 % en 2012 à 12 % en 2018. Dès septembre 2017, des maires réunis dans l’association « Centre-ville en mouvement » ont tiré la sonnette d’alarme. Depuis, le plan de sauvetage « Action Coeur de Ville » revitalise 222 villes moyennes, telles Valenciennes, Cahors ou Rodez. Outre des subventions pour restaurer le patrimoine, les rues et les habitations de centres-villes, la fédération « boutiques à l’essai » propose à celles et ceux qui souhaitent ouvrir un commerce de tester leur projet au sein d’une boutique pilote pendant plusieurs mois. Durant 3 ans, les futurs commerçants bénéficient d’un loyer réduit et d’un accompagnement avant et après l’ouverture : chaque mois, un spécialiste s’assure que
le repreneur ne rencontre pas de difficultés et, en cas de problème (manque de clients, approvisionnement…), la fédération l’aide à le résoudre. Et ça fonctionne ! « 90 % des commerces qui ont ouvert depuis le début de ce programme sont toujours en activité », affirme Olivier Bourdon, directeur de la fédération. D’ici fin 2020, le plan « Petites Villes de demain » proposera aux villes de moins de 20000 habitants, telles Uzès ou Saint-Flour, le même type d’accompagnement afin de faire revenir les commerces. Le mouvement est tel qu’une nouvelle profession a vu le jour : manager de centre-ville ! Sa mission : développer et promouvoir le commerce dans le coeur des villes en organisant des animations (semaine commerciale, braderie avec lot à gagner et à retirer en boutique…) pour faire connaître les petits magasins mais aussi en ciblant les besoins des habitants grâce à des questionnaires leur permettant d’exprimer leurs envies et leurs besoins… Car, pour qu’un commerce soit pérenne, il doit correspondre à une attente. Ainsi, le concours « Ma ville a un incroyable commerce », coorganisé par l’agence Auxilia et Leboncoin, propose aux municipalités de créer un événement dès lors qu’un local commercial est vacant. Des aspirants repreneurs postulent en envoyant un dossier de projet de reprise à la mairie, qui opère alors une première sélection. Les heureux sélectionnés viennent ensuite présenter leur projet aux habitants, qui votent pour le candidat qui les séduit le plus. Le gagnant emporte le local et bénéficie d’aides afin de lancer son commerce. En 2019, dix villes ont organisé ce concours, ce qui a permis la mise en place de dix commerces, et même plus. « L’ouverture d’une boutique génère celle d’au moins 5 autres par la suite », rappelle Olivier Bourdon. Un effet « boule de neige » bien salutaire pour nos coeurs de villes !
Un environnement agréable
Mais outre les commerces, les centres-villes ont besoin d’être
habités. Pour attirer les populations, de nombreuses municipalités ont décidé de rafraîchir les logements existants. Ainsi, à Cahors, un programme de rénovation prévoit d’agrandir les appartements, afin de mieux correspondre aux besoins actuels. À Bayonne, cette politique a fait ses preuves : désormais, le centreville compte 5 000 habitants supplémentaires grâce à une restauration systématique des logements.
Mais embellir le patrimoine existant pour mieux rendre les centresvilles attractifs, c’est aussi piétonniser les rues, recréer des endroits agréables… Ainsi, à Châteauroux, la place Gambetta, qui était devenue un grand parking, a retrouvé sa vocation initiale de lieu de vie, avec une promenade arborée en son centre et des brumisateurs urbains pour se rafraîchir en été. À La Ciotat, des citoyens ont même pu s’impliquer dans le renouveau de leur centre-ville : ainsi, Simone, 57 ans, qui avec ses voisins, a décidé de peindre des boîtes de conserve de toutes les couleurs et d’y disposer des plantations sur leurs balcons, afin de redonner une âme à leur rue et inviter les piétons à s’y balader. Encore faut-il rendre les coeurs de ville facilement accessibles : à Dijon, la mairie a choisi d’implanter un tramway qui n’entre pas dans le centre mais en fait le tour pour mieux le desservir. De même, à Bayonne, des parkings relais ont été créés et des navettes électriques permettent d’arriver jusqu’au coeur. Dans ces deux villes, les rues du centre sont devenues piétonnes, permettant aux badauds de se promener et de faire du « lèchevitrines » tranquillement.
Des services indispensables
« N’oublions pas qu’à l’origine, les coeurs de nos villes sont des
lieux de vie et d’échange. Il faut leur redonner cette fonction et permettre à ceux qui viennent en ville de se croiser et se rencontrer », indique Olivier Razemon, auteur de Comment la France a tué ses villes. Aller à son cours de gym, au cinéma, au restaurant, chez le médecin ou à l’école pour y chercher les enfants… autant d’activités qui ont été excentrées les unes des autres, et pour beaucoup, en périphérie. Il est temps de les ramener dans le centre ! Ainsi, nombreuses sont les villes qui envisagent désormais de construire des halles en leur coeur, afin de réimplanter des activités de proximité, qu’elles soient commerciales, comme les ventes de produits locaux, ou culturelles, à l’instar d’expositions, de concerts… À Cahors, la mairie a décidé de créer un complexe cinématographique en centreville, tandis que Strasbourg travaille sur la réimplantation des médecins qui avaient quitté l’hyper-centre en leur proposant des locaux adaptés. Quant à Dieppe, la ville a choisi de rénover son hôpital, situé dans son centre historique, au lieu de l’excentrer. Cette initiative a permis de maintenir la présence des 3000 personnes qui y travaillent. Désormais, ces salariés mais également les visiteurs animent chaque jour le centre-ville : ils font leurs courses, achètent des fleurs et des chocolats pour les malades qu’ils viennent voir, vont au restaurant… bref, font vivre ces commerces.