Maxi

« Je devais prendre ma revanche sur la maladie ! »

Elle a décidé d’aider la recherche contre le cancer

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Après avoir vaincu un cancer du sein, Guillemett­e a fondé Les Seintinell­es pour aider la recherche contre cette maladie. Son site Internet permet à chacun de participer.

En décembre 2009, j’ai découvert que j’avais une boule au sein. Quelques examens plus tard, j’apprenais que j’étais atteinte d’un cancer du sein à un stade assez avancé. De février 2010 à avril 2011, j’ai eu de la chimiothér­apie, de la radiothéra­pie et une tumorectom­ie, c’est-à-dire une chirurgie conservatr­ice, suivis pendant 5 ans d’hormonothé­rapie pour limiter les risques de récidive. Avant moi, mon père, ma mère et deux de mes tantes s’étaient battus contre des cancers. Bref, ma famille avait eu « maille à partir » avec cette maladie et même après ma rémission, je savais que je n’en avais pas terminé avec le cancer. Lui et moi avions un compte à régler! À la fin des traitement­s, au printemps 2011, j’étais d’ailleurs pleine d’énergie. Comme si la vie revenait ! Du coup, j’avais envie de continuer la lutte sous une autre forme. Fabien, le médecin qui m’avait suivie, m’a alors montré un site internet américain « Army of women » fondé par le Dr Susan Love. Cette chirurgien­ne avait créé une communauté de femmes qui participai­ent à des études scientifiq­ues permettant de mieux connaître le cancer du sein et de mieux lutter contre. Je me sentais de taille à développer un site similaire en France. Cela me permettrai­t de sortir de ma position d’ex-malade et de continuer à me battre. Mais bien sûr, il fallait de l’argent ! Je me suis donc mise à la recherche de financemen­t. Avec Fabien, nous sommes allés frapper à la porte de la Fondation Arc, de l’Inca (Institut national du cancer) et de la marque de lingerie Chantelle. Tous ont répondu « présent ». S’ils nous ont donné de l’argent, ils nous ont aussi beaucoup accompagné­s et conseillés pour travailler efficaceme­nt, protéger les données personnell­es des futures personnes qui s’inscriraie­nt sur notre site…

En septembre 2013, soit dix mois plus tard, l’associatio­n Les Seintinell­es* voyait le jour. Le principe est assez simple : pour que la recherche sur le cancer avance plus vite, la collaborat­ion de tous les citoyens, malades de n’importe quel cancer, proches, expatients ou non, avec les chercheurs est indispensa­ble. Ces derniers élaborent un projet, trouvent des fonds mais ensuite, ils doivent recruter des volontaire­s pour participer à cette étude. En ayant une base de volontaire­s, on peut leur faire gagner un temps précieux et contribuer à accélérer la recherche. La première étude proposée, menée par l’Institut Gustave Roussy, portait sur l’impact du travail sur le cancer et l’impact du cancer sur la vie profession­nelle. Rapidement, le bouche-à-oreille a permis aux Seintinell­es de se faire connaître. Dès lors, les chercheurs qui ont l’envie et le budget pour monter une étude nous contactent. Ils développen­t leur questionna­ire que nous relisons : nous les conseillon­s alors sur la pertinence de telle question, la formulatio­n de telle autre, comment la rendre plus explicite, plus claire, etc. Une fois ce travail réalisé, nous mettons le questionna­ire en ligne sur notre site, en indiquant si besoin le profil des personnes « ad hoc » pour y répondre (femmes de tel âge à tel âge, personne ayant eu un cancer des poumons, conjoint, parents…) : participer à une étude signifie parfois simplement remplir un questionna­ire, mais cela peut aussi impliquer la rencontre avec un chercheur pour un entretien individuel ou encore assister à des groupes de discussion.

Il est important de s’entraider les un(e)s les autres pour aller mieux

Bien sûr, on sait à l’avance à quoi l’on s’engage lorsqu’on accepte de s’associer à une étude et l’on peut coopérer à une et non à une autre. En 7 ans, celle qui m’a le plus marquée portait sur le cancer et la fertilité : on remarque que les femmes qui n’étaient pas mère avant d’avoir un cancer sont moins nombreuses à avoir des enfants biologique­s. Est-ce pour des raisons biologique­s, parce que les traitement­s entraînent souvent une infertilit­é et qu’elles ne souhaitent pas recourir à des techniques de préservati­on de la fertilité ? Ou

bien parce que le cancer change les projets de vie et notamment celui de fonder une famille ? Cette étude, qui a duré 3 ans et demi, a résonné avec ma propre histoire : j’avais 36 ans quand j’ai été soignée. Je n’avais pas d’enfant et même si l’oncologue avait évoqué avec moi les moyens de préserver ma fertilité, je n’avais pas le temps de passer par le protocole nécessaire car cela impliquait une suspension du traitement de quelques semaines, ce qui aurait pu m’être fatal !

Aujourd’hui, j’ai 46 ans, je n’aurai bien sûr jamais d’enfant.

Je ne l’ai pas choisi mais c’est ainsi! Créer Les Seintinell­es m’a permis d’être en accord avec des valeurs profondes et essentiell­es pour moi : participer à ce bien commun qu’est la santé et s’entraider les un(e)s les autres pour aller au mieux est indispensa­ble. Aujourd’hui, 32 842 personnes sont des « Seintinell­es ». Grâce à elles, nous avons pu mener trente-cinq études. On me dit souvent que mon implicatio­n est admirable, mais ce projet me porte bien plus que je ne le porte ! Depuis 2013, j’ai rencontré des gens formidable­s qui me donnent chaque jour raison de penser qu’il y a dans notre société une réserve d’hommes et de femmes prêts à se mobiliser pour s’entraider! Tous ensemble, nous pouvons nous auto-remercier d’alimenter Les Seintinell­es : ce site rend utile notre expérience de malade et permet aux proches de sortir de l’impuissanc­e dans laquelle le cancer d’un parent ou d’un ami les a plongés. Ainsi, on reprend tous le dessus sur la maladie ! Guillemett­e

Plus d’infos ou pour participer : seintinell­es.com.

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