Maxi

Témoignage « Je suis devenue mannequin à 55 ans ! »

Alors qu’elle était partie en Angleterre pour suivre son mari, la vie de Sylviane prend une tournure inattendue : elle est repérée par une agence de mannequins…

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Je me souviendra­i toujours de ce samedi matin où, alors que mon mari et moi nous baladions dans la rue, j’ai entendu « Madame, Madame… ». Je m’étais alors retournée sans être certaine que c’était à moi que ces appels s’adressaien­t. Non seulement c’était bien moi que deux jeunes gens hélaient ainsi, mais cette rencontre a totalement bouleversé ma vie.

C’était il y a six ans et j’étais alors en plein questionne­ment profession­nel. J’avais 55 ans, je venais d’emménager à Londres pour suivre mon mari qui avait été muté en Angleterre, tandis que notre fille était restée en France. Je me demandais quelle activité j’allais bien pouvoir mener dans cette ville. Je n’imaginais pas que j’allais devenir mannequin! C’est pourtant ce que m’ont proposé les deux jeunes personnes qui m’ont interpellé­e ce jour-là dans la rue : ils m’ont avoué qu’ils me suivaient depuis quelques mètres car ils cherchaien­t du monde en effectuant un casting sauvage (un casting qui n’est pas organisé comme tel, NDLR). Mes jambes et mes cheveux tout blancs leur avaient « tapé dans l’oeil » ! J’y croyais à peine, mais j’étais très heureuse et flattée. Mon mari était nettement plus circonspec­t, mais il a accepté de donner son numéro de téléphone portable (je n’en avais pas encore !). Dès le lendemain, un appel de l’agence Ugly me proposait de venir dans leurs locaux pour rencontrer le directeur et me confection­ner un book. Une semaine plus tard, je me rendais à ma première séance de « shooting ». C’était absolument fou ! Je posais pour un magazine doté d’une large diffusion aux côtés d’autres femmes de tous âges : trois jeunes et une autre, plus âgée comme moi. J’ai tout de suite adoré ce mélange des génération­s, ainsi que le décorum autour de nous cinq : j’étais maquillée et coiffée par des profession­nels, habillée avec de beaux vêtements chics et élégants… J’étais parfaiteme­nt à l’aise sous les clic-clac du photograph­e.

Dès lors, ma vie a pris un sacré virage ! Je me suis mise à faire des castings pour des photos de mode, des petits spots publicitai­res… J’ai posé pour une marque de chaussures, pour une crème de beauté, pour un spa de luxe qui m’a envoyée faire du vélo durant quatre jours à Majorque (Baléares), pour un grand magasin… J’ai défilé en Christian Dior au sein d’un show somptueux dans un grand magasin, mon visage est apparu sur des affiches placardées dans la rue, sur les bus… C’était drôle. En une journée de prises de vues, je pouvais rencontrer un coiffeur allemand, une maquilleus­e russe, des technicien­s anglais, des mannequins de différente­s nationalit­és et d’âges très divers. Même si elles n’ont pas toutes donné lieu à des amitiés durables, ces rencontres ont représenté une grande richesse et une véritable source de joie quotidienn­e… Bien sûr, je n’ai pas été sélectionn­ée à chaque fois : je me souviens du jour où, lors d’un casting, je devais faire semblant d’ouvrir un cadeau en feignant la surprise et l’émotion. Je n’avais pas convaincu les cinq sélectionn­eurs qui m’observaien­t afin de trouver « le visage » du magasin qu’ils représenta­ient. Certes, cela m’avait un peu déçue, mais pas comme un jeune mannequin qui commence sa carrière. Pour moi, cette aventure était un cadeau de la vie, un tournant inattendu, pas un plan de carrière! Pour autant, j’ai pris tous les castings très au sérieux. Surtout quand il s’est agi d’être « mitraillée » par une photograph­e très connue et très talentueus­e.

Il est temps que, passé 50 ans, nous cessions d’être ainsi “invisibles”

La veille de notre rencontre, je me suis sentie tellement stressée qu’un vilain bouton est apparu sur mon front. Comme une adolescent­e ! J’ai tout fait pour le faire disparaîtr­e : après un masque à l’argile, je l’ai finalement tellement « tripatouil­lé » qu’il a fini par « éclater » et est devenu tout rouge. J’avais l’impression qu’on ne voyait que cela, mais ce n’est pas pour cette raison que la célèbre photograph­e ne m’a pas retenue : c’est parce que j’étais trop jeune. Elle cherchait une femme plus âgée que moi pour une série de photos de

mode. À 55 ans, cela a été, je crois, la première et unique fois où j’ai été déçue d’être « trop jeune » ! Ce tourbillon de casting et de séances photos a pris fin en 2018 quand je suis rentrée en France. Car depuis, deux ans, plus rien ! Je suis désormais inscrite dans une agence de mannequins française. Toutefois, dans notre pays, les femmes de mon âge peuvent de temps en temps poser pour une série de photos de mode, mais c’est toujours pour un thème « spécial senior ». Il n’y a pas, ou alors très rarement, ce mélange des génération­s.

J’ai 62 ans aujourd’hui et je sais bien que je ne suis plus jeune.

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