Sobriété & exemplarité Une collectivité à énergie positive
Avant la loi de transition énergétique pour la croissance verte d’août 2015, les initiatives en ce sens tenaient du volontarisme. La contrainte législative pousse désormais collectivités et privés à atteindre l’exemplarité en matière de développement durable, comme le prouve le Département de La Réunion qui franchit un nouveau cap (vert) avec son projet Négawatt.
Sur le papier, cela paraît plutôt simple : maîtrise de la consommation énergétique pour la collectivité du Département de La Réunion via un plan sur cinq ans, 2018-2023, voté dans les détails à la dernière commission permanente de novembre 2019. Mais à y regarder de plus près, il s’agit pour l’institution d’un réel défi, à la hauteur des enjeux (économique et sociologique) du réchauffement climatique, actuel.
Pour l’institution de Cyrille Melchior, la difficulté vient de son patrimoine, “400 sites répartis sur l’ensemble du territoire, pour 750.000 mètres carrés de surface et une consommation électrique de 22 Gigas Wh, soit une facture d’électricité de de 4 millions € par an” précise Idriss Ingar, chargé de mission Climat Énergie pour le Département de La Réunion. À la lecture des chiffres, il est aisé de comprendre pourquoi la collectivité cherche à maîtriser sa consommation d’énergie et donc son coût.
Pourtant, “la thématique énergétique et environnementale n’est pas nouvelle” rappelle Idriss Ingar, “en 2010 le département avait lancé un schéma directeur de l’énergie et en 2013 un plan climat énergie”. L’agent territorial n’oublie pas ainsi d’insister sur le fait que bien avant la loi de transition énergétique pour la croissance verte d’août 2015, le Département s’était inscrit dans une démarche volontariste de changer de paradigme.
C’est le nouveau président de Département, Cyrille Melchior, succédant à Nassimah Dindar en décembre 2017, qui relancera avec ferveur un plan dont le but est de diminuer, drastiquement, l’impact carbone de la collectivité. Ce plan comporte ainsi 3 axes, le projet Négawatt qui vise à une sobriété énergétique totale, un volet sur les transports propres qui a pour objectif 20% de la flotte, et un autre sur la biodiversité qui doit voir la plantation de 1 million d’arbres d’ici cinq ans.
“Le Département s’est engagé à devenir une collectivité à énergie positive” affirme Idriss Ingar, “à compenser l’impact carbone par une production équivalente d’énergie renouvelable qu’on restitue au réseau” poursuit-il. Mais l’annonce est une chose, la pratique en est une autre. Comment parvenir à créer 22 Gigas Wh ? “Justement, l’idée n’est pas de produire 22 Gigas Wh. En tout cas le raisonnement n’est pas celui-ci” assure le chargé de mission.
Si le Département ne compte pas développer une branche R&D afin d’innover dans le but de parvenir à ses objectifs, “parce que les solutions existent et qu’il n’y a rien à inventer”, la collectivité compte bien créer une révolution à son échelle : celle des usages. “La plus grande partie du travail sera de travailler l’humain, de responsabiliser les quelque 5.000 agents, individuellement” reprend Idriss Ingar. La démarche est sociologique, avant d’être technique, cette dernière n’étant qu’un moyen, pas la finalité.
Climatisation, éclairage, mutualisation, etc. “la première partie, – et la plus importante, c’est celle-ci, celle de la sobriété énergétique” insiste Idriss Ingar. À ne pas confondre avec l’efficacité énergétique (qui arrive en deuxième phase du plan Négawatt). La sobriété énergétique est un concept politique visant à la diminution des consommations d’énergies par des changements de mode de vie et des transformations sociétales. D’ailleurs, pour construire ce plan Négawat, le Département de La Réunion se fait accompagner par l’association éponyme (lire encadré).
Dans un second temps, la collectivité s’appliquera à l’efficacité énergétique en adoptant les systèmes les plus performants et les plus économiques, avant de compenser en produisant de l’énergie renouvelable. “Je le répète, l’objectif n’est pas de produire 22 Gigas Wh et de dire on compense, mais bien de changer les habitudes, les modes de consommation” répète Idriss Ingar.
Si dans la pratique il est aisé de comprendre pourquoi le plan s’étale sur cinq ans, dans les faits le Département n’a pas attendu pour lancer les appels à projets pour la production d’énergie renouvelable. Comme cela est déjà le cas pour 23 collèges, dont le Département a la responsabilité, l’idée est de mettre à disposition le patrimoine de la collectivité pour y installer des centrales solaires photovoltaïques connectées au réseau électrique.
Par cette démarche, le Département dit s’engager également économiquement auprès du territoire de La Réunion. “C’est une façon de soutenir le tissu économique, via des investissements. Ce n’est plus seulement des subventions, mais une réelle économie de marché qui se met en place”.
NÉGAWATT ET LA SOBRIÉTÉ ÉNERGÉTIQUE , C’EST QUOI ?