Serrurerie, plomberie : que faire en cas d’urgence ?
ÉVIER BOUCHÉ, ◊PORTE QUI CLAQUE… L’INTERVENTION RAPIDE D’UN PROFESSIONNEL À DOMICILE EST INÉVITABLE. CONDUITE À TENIR POUR LIMITER LES ABUS DE DÉPANNEURS PARFOIS PEU SCRUPULEUX.
La panique est souvent mauvaise conseillère. Les escrocs qui sévissent dans le secteur du dépannage à domicile (plombier, serrurier, chauffagiste, électricien) en profitent pour facturer à prix d’or des prestations souvent inutiles, quand ils ne les provoquent pas eux-mêmes ! « En 2016, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a enregistré près de 9 000 plaintes dans ce domaine, soit deux fois plus que pour les opérateurs téléphoniques et trois fois plus que pour les garagistes, pointe Vincent Designolle, directeur de cabinet de l’institution. Nos enquêtes de terrain corroborent le ressenti des particuliers, avec un taux d’infraction élevé (53,6 % des entreprises en 2015). Nous observons aussi le développement de pratiques délibérément frauduleuses, avec des entreprises éphémères qui échappent à tout contrôle. Face à ce fléau, qui induit des pratiques commerciales trompeuses, voire agressives, et limite considérablement les possibilités de recours, nous avons lancé la campagne Faites-vous dépanner, pas arnaquer ! » Voici les bases et les astuces des experts de Dossier familial pour limiter les risques d’arnaque.
AUTANT QUE POSSIBLE, SORTIR DE L’URGENCE
Par exemple, en dormant à l’hôtel ou chez un proche, au lieu d’appeler un serrurier ou une société multidépannage en pleine nuit. Idem pour les fuites. « Une fois la situation sécurisée (voir encadré p. 23), rares sont les cas où le dépannage ne peut pas attendre quelques
heures, analyse Guillaume Huser, président de Homeserve France, spécialiste des services d’assistance et de réparation pour la maison qui a lancé en septembre dernier le site
internet Depannetmoi.fr. Sortir de l’urgence permet de procéder aux travaux posément, de jour et en semaine, en prenant le temps de ne faire réparer que ce qui est utile à l’instant T, et ainsi d’abaisser le coût de l’intervention. »
NE PAS APPELER LE PREMIER NUMÉRO VENU
Ne contactez jamais le numéro qui figure entre celui des pompiers et celui de la police sur des cartes à l’allure officielle distribuées dans les
En prenant le temps, j’ai économisé 1 000 euros
Il y a quelques mois, le locataire de mon appartement, en banlieue parisienne, me signale une fuite au ballon d’eau chaude. Je trouve un plombier sur Internet. Le site avait une bonne apparence. Le plombier se rend sur place pour un diagnostic et m’annonce qu’il faut changer le ballon. Le devis s’élève à 1 200 euros ! Je lui demande un petit temps de réflexion et pianote sur Internet. Sur Myplombier.com, mon interlocuteur me demande de lui envoyer une photo. Verdict : pour lui, inutile de changer le ballon, il suffit de remplacer une pièce, et son devis s’élève à 191 euros. Je rappelle immédiatement l’artisan, toujours sur place, et annule son intervention. Bilan : 1 009 euros économisés. Six mois après la réparation, l’ancien ballon ronronne comme au premier jour !
boîtes aux lettres ou affichées dans les halls d’immeuble. Attention aux autocollants opportunément visibles sur les gouttières et les rideaux de fer. Si vous utilisez Internet, fuyez les sites qui apparaissent tout en haut des moteurs de recherche et annuaires. « Seuls des escrocs peuvent payer le prix fort pour remonter en tête des résultats quand les internautes tapent serrure + urgence + le nom d’un quartier
ou d’une ville », commente Frédéric Colin, directeur général de Fichet. Plus grave, derrière certaines officines multidépannages domiciliées à l’étranger, le grand banditisme tire parfois les ficelles. S’il n’y a personne alentour pour vous aiguiller vers un artisan de confiance, vous pouvez passer par l’une des plateformes Internet ou applications présentées dans le tableau (voir p. 21). À moins d’être rebuté par ces Uber du dépannage à domicile… Dans ce cas, sachez que, depuis le
1er avril dernier, tous les professionnels doivent afficher leurs tarifs dans leurs locaux et sur leur site internet (arrêté du 24 janvier 2017).
EXIGER UN DEVIS ET LE DÉCORTIQUER
Si vous passez par une plateforme, vous obtiendrez immédiatement un devis en ligne. En tout état de cause, avant tous travaux, le professionnel doit vous remettre un devis détaillé, et ce, dès le premier euro (arrêté du 24 janvier 2017, modifié par l’arrêté du 28 février 2017, applicable depuis le 1er avril 2017). Il doit comporter notamment la nature des réparations, la dénomination, la quantité, le prix unitaire et son unité (le taux horaire de la main-d’oeuvre, etc.) pour chaque prestation, ainsi que les frais de déplacement, s’ils existent. Dans tous les cas, ne donnez jamais votre feu vert sans un devis en main. Et ne payez rien avant la fin des travaux.
RESTER SUR SES GARDES PENDANT L’INTERVENTION
Casse de matériel, vol… pas question de laisser le professionnel sans surveillance. « Certains n’hésitent pas à défoncer les portes comme des cambrioleurs pour vous facturer une prestation
à 2 500 euros et plus », dénonce par exemple Stive Jaoui, patron de SJ Bâtiment et adhérent chez Helloartisan.com. Parallèlement, renseignez-vous sur ce type d’incident et sa solution sur Internet, afin de ne pas vous laisser abuser. Ainsi, dans la plupart des cas, une porte claquée sans tour de clé peut être ouverte à l’aide d’une simple radiographie. Un dépannage qui, sauf mauvaise surprise, ne devrait donc pas coûter plus de 150 euros.
NE PAS ENGAGER D’AUTRES TRAVAUX À CHAUD
Une fois l’urgence traitée, donnez-vous le temps de la réflexion pour engager des travaux plus importants. Cela vous permettra de faire jouer la concurrence et de ménager vos finances. Si le dépanneur vous propose des travaux et pièces de rechange qui ne sont pas strictement nécessaires au traitement de votre urgence, vous bénéficiez de la protection de la réglementation sur le démarchage à domicile. En clair, vous ne devez rien payer pendant sept jours et vous disposez d’un délai de
rétractation de quatorze jours, à compter de la conclusion du contrat (articles L. 221-10 et 221-18 du Code de la consommation). Certains professionnels peu scrupuleux vous incitent à signer pour des travaux en vous promettant un remboursement par votre assurance. C’est souvent faux. Pour en avoir le coeur net, une seule solution : contactez votre assureur et ne signez rien sans son accord préalable.
SE DÉFENDRE SI LA FACTURE EXPLOSE TOUT DE MÊME
Face à un professionnel de bonne foi, tentez de trouver un accord amiable pour régler le litige. D’abord, en le contactant directement et en lui écrivant en recommandé avec avis de réception. Ensuite, en saisissant le médiateur de la consommation dont il relève et dont les coordonnées doivent figurer sur son site, son devis et sa facture. En cas d’échec ou si l’entreprise paraît frauduleuse, saisissez la DGCCRF par l’intermédiaire de son site (economie.gouv.fr /courrier/4219) ou localement (coordonnées sur economie.gouv.fr /dgccrf/ coordonnees-des-ddpp-et-ddcspp). Parallèlement, vous pouvez porter plainte auprès de la gendarmerie ou de la police.