Travail de nuit : quelles protections ?
LES SALARIÉS QUI OFFICIENT RÉGULIÈREMENT DE NUIT SONT DEUX FOIS PLUS NOMBREUX QU’IL Y A VINGT ANS. LE CODE DU TRAVAIL LES PROTÈGE MALGRÉ DIFFÉRENTS RÉGIMES DÉROGATOIRES.
La nuit n’est pas la même pour tous
De 21 h au plus tôt à 7 h du matin au plus tard : ce sont les accords d’entreprise ou, à défaut, les conventions collectives qui bornent la nuit, en sachant que tout travail effectué au cours d’une période d’au moins neuf heures consécutives qui inclut la phase de minuit à 5h est intégralement considéré comme de nuit (article L. 3122-2 du Code du travail). « Mais la loi prévoit des dérogations, comme pour le spectacle vivant », précise Dahlia Arfi-elkaïm, avocate associée du cabinet JDB Avocats à Paris. « Dans ces métiers, comme pour ceux des médias et des discothèques, les horaires de nuit se situent donc entre minuit et 7 h.» La loi Macron de 2015 a aussi permis de reculer le début de la période de nuit jusqu’à minuit dans les magasins des zones touristiques internationales. « Or, lorsque le début de la période de travail est fixé au-delà de 22 h, la période de nuit est d’au moins sept heures consécutives, comprenant l’intervalle entre minuit et 7 h», précise l’avocate.
Pas forcément toutes les nuits
Oeuvrer trois heures entre 21 h et 7 h du matin deux fois par semaine suffit à être considéré comme travailleur de nuit, tout comme effectuer un certain nombre d’heures entre 21 h et 7 h pendant douze mois consécutifs (270 heures en l’absence d’accord d’entreprise ou de convention collective).
Pas de compensation financière obligatoire
« Le Code du travail prévoit que tout travail de nuit doit bénéficier d’une contrepartie, mais elle n’est pas forcément financière note Dahlia Arfi-elkaïm. Il peut s’agir d’un repos compensateur, solution qui rencontre généralement la faveur des employeurs. » Anne Pasquier, hôtesse de l’air chez Air France, témoigne : « Pour un long- courrier, si nous volons de nuit à l’aller et au retour, notre temps de repos en escale atteint quarante-huit heures au lieu de vingt-quatre, quand on vole de jour.» Lorsqu’elle existe, la compensation financière est déterminée par l’accord d’entreprise ou la convention collective. Dans la sécurité, une majoration de 10 % du taux horaire minimum conventionnel est ainsi prévue. En 2014, la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) estimait que les travailleurs de nuit réguliers touchaient en moyenne
8,1 % de plus que les salariés travaillant le même nombre d’heures de jour (3,6 % pour un travail de nuit occasionnel).
Davantage de suivi médical
Les travailleurs de nuit restent mieux suivis par la médecine du travail. Depuis la loi El Khomri, à moins que le médecin ou le salarié ne demande une plus grande régularité, trois ans maximum peuvent s’écouler entre deux visites d’information et de prévention (contre cinq pour les autres). Dormir cinq à six heures seulement, en partie le jour, est bien vécu par certains. D’autres ne le supporteront jamais. « On sait au bout de trois mois si la personne va tenir ou pas », intervient Sylvie Royant-parola, médecin spécialiste du sommeil et présidente du réseau
Morphée. « Le salarié qui a des insomnies, qui n’arrive pas à récupérer, doit rapidement revenir à un travail de jour. À défaut, le risque de pathologie est réel : le nombre de dépressions parmi les travailleurs de nuit est 2,5 fois supérieur à la moyenne. »
Des droits liés à la pénibilité
Reconnu comme l’un des dix facteurs de pénibilité par la même loi El Khomri, le travail de nuit permet de cumuler quatre «points pénibilité» par an au minimum. Chaque point donne droit à vingt-cinq heures de formation. Dix points peuvent être convertis en un trimestre de travail à mi-temps sans perte de salaire ou un trimestre de retraite supplémentaire. Renseignements au 09 71 10 36 82 ou sur preventionpenibilite.fr.