Céder une partie de son terrain
L’OPÉRATION PEUT ÊTRE RENTABLE, SURTOUT SI LA PARCELLE EST CONSTRUCTIBLE. MAIS ELLE IMPLIQUE QUE L’ON RESPECTE CERTAINES FORMALITÉS ET ELLE EST PARFOIS LOURDEMENT TAXÉE. MODE D’EMPLOI POUR MENER À BIEN SA DÉMARCHE.
TROUVER LES INFORMATIONS POUR EN TIRER LE MEILLEUR PRIX
Interrogez d’abord des notaires ou des agents immobiliers pour mieux connaître le marché local des terrains à bâtir, savoir quelles sont vos chances de trouver un acquéreur et dans quelle fourchette de prix (voir aussi le site immobilier.statistiques.notaires.fr). Si le terrain que vous envisagez de céder est vaste, étudiez la formule la plus rentable : vendre une seule parcelle ou, au contraire, la diviser en deux. Tout dépend de la demande des acquéreurs dans votre région, de l’offre et de l’écart de prix entre le grand terrain et les deux petits.
Pour vérifier que l’opération est réalisable et savoir comment découper au mieux votre lot, consultez, s’il existe, le plan local d’urbanisme (PLU) ou la carte communale. «Vous saurez ainsi si votre terrain est constructible en totalité ou seulement partiellement car situé en partie en zone naturelle, ou ce qu’il est possible de construire dessus (emprise au sol). Vous connaîtrez également la largeur requise de l’accès depuis la route pour laisser passer les pompiers…», explique Julie Loriau, conseillère juriste à L’ADIL 41 (Agence départementale d’information sur le logement). Demandez à la mairie un certificat d’urbanisme opérationnel. À partir des informations fournies sur votre projet, ce document, disponible dans un délai de deux mois, précise si l’opération envisagée est réalisable sur votre terrain. Mieux, il fige les règles d’urbanisme applicables à la parcelle pour les dix-huit mois à venir : même si elles sont modifiées par la commune dans l’intervalle, votre terrain ne sera pas immédiatement concerné. Il est donc utile de pouvoir montrer ce certificat d’urbanisme aux candidats acquéreurs, pour les rassurer sur ce qu’ils pourront construire s’ils achètent le lot.
« Relisez également votre titre de propriété pour
voir s’il existe des servitudes sur votre terrain, comme un droit de passage des voisins, ou s’il a été prévu avec d’anciens propriétaires l’interdiction de construire au-delà d’une certaine hauteur, par exemple », conseille Gervais Doligez, géomètre-expert en Normandie et président de la commission Urbanisme à l’ordre des géomètres-experts. Enfin, renseignez-vous sur les risques éventuellement identifiés pour votre parcelle (inondation, avalanche, etc.), qui sont détaillés dans l’annexe du PLU s’il est récent. À défaut, l’information est disponible auprès de la Dreal (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) et sur son site internet. Si vous êtes perdu, le géomètre-expert qui interviendra dans votre opération peut mener ces recherches préalables pour vous et vous aider dans la conception de votre projet.
PESER LES INCONVÉNIENTS DE LA VENTE
Si une maison se construit juste à côté, la vôtre risque de perdre une partie de sa valeur et vous subirez peut-être de nouvelles nuisances : bruit, perte d’ensoleillement, de Le vendeur qui cède une partie de son terrain doit penser à se protéger pour préserver au mieux la valeur de la parcelle qu’il conservera ou de sa maison, si elle est construite dessus.
Il peut par exemple négocier avec l’acquéreur que la maison qui sera bâtie sur la nouvelle parcelle ne dépasse pas une certaine hauteur ou ne se situe pas trop près de sa propre demeure.
Ces conditions, si l’acheteur les accepte, doivent figurer dans la promesse ou le compromis de vente. Il est de la même façon indispensable de fixer à l’acheteur un délai maximal pour demander le permis de construire. En effet, l’obtention du permis est presque toujours une condition suspensive à la réalisation de la vente. Si l’acheteur tarde trop, le vendeur est pénalisé, obligé d’attendre sans pouvoir percevoir l’argent. Précisez aussi notamment dans cet avantcontrat à qui incombera l’entretien de la clôture qui sépare les deux parcelles.
vue, etc. Le jeu n’en vaut pas toujours la chandelle, d’autant que le gain retiré de la vente du terrain sera parfois plus faible que vous ne l’espériez. « En effet, même si votre résidence principale est installée sur la parcelle que vous souhaitez scinder, vous aurez à régler l’impôt sur la plus-value
sur le terrain vendu », précise Julie Loriau. Vous n’en êtes exonéré que dans certains cas, notamment si vous en êtes propriétaire depuis plus de vingt-deux ans ou si son prix est inférieur à 15 000 euros. Des abattements, variables selon le nombre d’années de détention au-delà de la cinquième, seront appliqués sur le montant de cette plus-value. Le reliquat, après abattement, sera taxé au taux de 19 %. S’y ajouteront les prélèvements sociaux, sauf si vous êtes propriétaire du terrain depuis plus de trente ans. En 2017, ils sont calculés au taux de 15,5 % sur la plus-value (sur laquelle s’appliquent là aussi différents abattements selon le nombre d’années au cours desquelles vous avez été propriétaire du bien).
« De plus, si le terrain que vous vendez est devenu constructible grâce à un changement du PLU après que vous l’avez acheté, vous devrez régler une taxe comprise entre 5 % et 10 % sur la plus-value réalisée », explique Pierre Lemée, notaire à Pont-l’évêque. Dans certaines communes, une autre taxe, égale à 10 % de la plus-value, est appliquée en sus. Pour calculer approximativement le poids de la fiscalité selon la date d’acquisition de votre terrain, renseignez-vous auprès de L’ADIL la plus proche de chez vous ou auprès de votre notaire. Enfin, la division d’un terrain engendre des frais (voir encadré page précédente), qui viennent aussi grever la rentabilité de l’opération.
FAIRE APPEL À UN GÉOMÈTRE-EXPERT
Si vous décidez de passer à l’acte, le recours à un professionnel sera indispensable pour fixer indiscutablement la limite entre votre terrain et ceux des voisins, ou avec
la route, afin qu’il n’y ait aucune contestation
possible concernant la parcelle vendue. « Cela se passe en général à l’amiable, en discutant si besoin avec les voisins, et en identifiant les limites du terrain à l’aide de bornes ou des éléments naturels (haies, cours d’eau, etc.). Un procès-verbal de délimitation est ainsi établi », précise Gervais Doligez. Et si trouver un accord s’avère impossible ? « Il faut dresser un procès-verbal de carence, afin que le propriétaire puisse demander à la justice de
fixer les limites du terrain », répond l’expert.
OBTENIR LES AUTORISATIONS ADMINISTRATIVES
Dans la grande majorité des cas, si vous cédez juste une parcelle, sans créer d’équipements communs (route, etc.), il vous suffit de déposer auprès de la commune une déclaration préalable de division foncière à l’aide du formulaire Cerfa n° 13702*05.
Vous y joindrez un plan indiquant la façon dont vous envisagez de découper la nouvelle parcelle, avec les éventuelles canalisations, servitudes, etc. Ce plan doit être coté en trois dimensions : la demande est donc généralement faite par un géomètre-expert. Sans réponse de la mairie dans un délai d’un mois, votre demande est réputée tacitement acceptée. Il reste simplement à placer un panneau pendant deux mois sur le terrain pour expliquer la division envisagée. Les tiers (voisins…) ont en effet deux mois pour engager un recours, et le préfet, trois mois pour s’opposer au projet.
« En revanche, les formalités sont plus complexes si vous créez un lotissement ou si votre terrain se trouve aux abords d’un site remarquable ou d’un monument historique », avertit Gervais Doligez. Vous devez en effet déposer une demande de permis d’aménager, dans laquelle vous devrez plus précisément détailler ce que votre éventuel acquéreur pourra être libre de faire sur la parcelle cédée. Le dossier nécessite, selon les cas, le concours d’un paysagiste, d’un urbaniste, d’un architecte… et il est le plus souvent constitué par un géomètre-expert. Vous devez attendre la réponse de la mairie avant de passer à l’action. Et attention, en cas de non-réponse de sa part, cela équivaut à un
refus. L’architecte des Bâtiments de France pourra également donner son avis sur
l’opération. « Enfin, si vous aménagez un terrain de plus de 2 500 m2 pour créer un lotissement, l’intervention d’un architecte est désormais obligatoire pour le permis d’aménager », précise Julie Loriau. Cette dépense supplémentaire s’élève à environ 1 000 euros.
INSCRIRE LA NOUVELLE PARCELLE AU CADASTRE
Une fois l’autorisation obtenue, le géomètre peut matérialiser sur le terrain la séparation entre la nouvelle parcelle et votre propriété, et la faire enregistrer au cadastre.
« Il faut demander aux services fiscaux de créer deux numéros cadastraux, un pour chacune des parcelles. C’est indispensable avant de signer la vente définitive chez le notaire », indique Gervais Doligez. Cette division cadastrale est une démarche à confier obligatoirement au géomètre-expert.