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Quel héritage selon votre régime matrimonia­l ?

AU DÉCÈS D’UNE PERSONNE MARIÉE, LE RÉGIME MATRIMONIA­L PERMET DE DÉTERMINER LE PATRIMOINE À PARTAGER. MAIS POUR AMÉLIORER LES DROITS DU CONJOINT SURVIVANT, DES SOLUTIONS EXISTENT EN AMONT.

- Par Nathalie Cheysson-kaplan Marie MONMARCHÉ Notaire à Joué-les-tours (37)

LA LIQUIDATIO­N DU RÉGIME MATRIMONIA­L

Afin de déterminer le patrimoine successora­l d’une personne mariée, il faut commencer par liquider son régime matrimonia­l, c'est-à-dire déterminer la part des biens qui entre dans la succession du défunt et celle qui revient à son conjoint survivant hors succession. Ce calcul dépend du régime matrimonia­l choisi. Lorsque les époux sont mariés sous la

communauté réduite aux acquêts (sans contrat de mariage), le patrimoine du couple se compose de biens propres à chacun et de biens communs. À la liquidatio­n du régime matrimonia­l, chacun « reprend » ses biens propres, c’est-à-dire ceux dont il était propriétai­re avant le mariage ainsi que ceux reçus pendant le mariage par donation ou par succession. Tous les biens créés ou acquis durant le mariage autres que ceux reçus par donation ou succession constituen­t des biens communs ; peu importe qu’ils aient été achetés ou financés par un seul des époux ou par les deux. Les biens communs sont en principe partagés par moitié, à moins que les époux ne se soient consentis des avantages matrimonia­ux. La succession du défunt se

compose donc de la totalité de ses biens propres et de la moitié des biens communs. Lorsque les époux sont mariés sous le

régime de la séparation de biens, aucun compte ne s’impose en principe entre les époux puisqu’ils ne possèdent que des biens propres. En réalité, les époux ont fréquemmen­t acheté des biens à leurs deux noms, soit pour moitié chacun, soit dans d’autres proportion­s, l’acte d’achat incluant parfois d’autres clés de répartitio­n. On parle de biens indivis. La succession du défunt se compose alors de la totalité de ses biens propres et de sa quote-part dans les biens indivis.

LE PARTAGE DE LA SUCCESSION

Après avoir déterminé le patrimoine de la succession, le moment est venu de le partager entre les héritiers du défunt : ses enfants, y compris ceux nés de précédente­s unions, et son conjoint survivant. Les droits du conjoint varient selon que tous les enfants du défunt sont nés de leur mariage ou non. Si tous les enfants du défunt sont communs aux deux époux, le conjoint survivant a le choix entre :

– le quart de la succession en pleine propriété, les enfants se partageant les trois quarts par parts égales ;

– l’usufruit de la totalité de la succession, les enfants se partageant la nue-propriété par

parts égales (ils récupérero­nt la pleine propriété au décès de leur second parent). Si le défunt a au moins un enfant né d’une

autre union, son conjoint survivant hérite du quart de sa succession en pleine propriété, sans possibilit­é d’option pour l’usufruit. Les trois quarts restants reviennent à ses enfants et sont partagés entre eux par parts égales, quelle que soit l’union dont ils sont nés. En revanche, le quart attribué au conjoint survivant est définitive­ment perdu pour les enfants nés des unions précédente­s. Ce sont les enfants nés de la dernière union qui en profiteron­t au décès de leur père ou mère.

LES SOLUTIONS POUR AVANTAGER LE CONJOINT

Les règles exposées ci-dessus ne sont pas impérative­s, et les couples mariés disposent d’une relative liberté pour améliorer le sort du conjoint survivant. Voici comment.

Les avantages matrimonia­ux. « La plupart des couples se marient sans établir de contrat de mariage. Ils peuvent ensuite se consentir des avantages matrimonia­ux, afin de faire du sur-mesure. Mais il faut être sûr de son choix, car cela passe par un aménagemen­t du régime matrimonia­l », explique Marie Monmarché, notaire à Joué-les-tours. Ces avantages, que les époux se consentent dans un contrat de mariage, se déclinent au pluriel. Avec la clause de partage inégal, les époux optent pour le partage des biens communs autrement que par moitié : deux tiers, un tiers par exemple. La clause d’apport en communauté, elle, leur permet de modifier le périmètre des biens communs pour inclure dans la communauté des biens propres de l’un ou de l’autre.

En cas de patrimoine­s très déséquilib­rés, ils ont parfois intérêt à adopter la communauté universell­e, afin de mettre en commun tous leurs biens, quelle que soit leur origine. Cela permet à l’époux le moins fortuné d’acquérir immédiatem­ent la moitié des biens (sans attendre le décès de l’autre).

« La répartitio­n du patrimoine du couple sur deux têtes limite aussi les droits de succession à payer par les enfants. Les époux peuvent ensuite prévoir par le biais d’une clause de préciput que le survivant prélèvera un ou plusieurs biens communs, en pleine propriété ou en usufruit, sans contrepart­ie, avant le

partage de la communauté », suggère Marie Monmarché. En principe, les époux mariés sous le régime de la séparation de biens, eux, n’ont pas accès aux avantages matrimonia­ux. Mais « en pratique, rien ne les empêche de s’en consentir en constituan­t une société d’acquêts. Il s’agit d’une bulle de communauté au sein du régime de la séparation de biens », ajoute Marie Monmarché. Ils sont alors libres de choisir un partage inégal des biens communs, ou une clause de préciput portant sur tel ou tel bien, voire l’attributio­n intégrale des biens communs au survivant, comme avec un régime communauta­ire. Dans tous les cas, les avantages matrimonia­ux s’ajoutent à la part d’héritage que le conjoint reçoit de la succession et le protègent au-delà de la quotité disponible spéciale entre époux.

La communauté universell­e avec attributio­n intégrale de la communauté au survivant. Pour renforcer la protection au conjoint survivant, la solution consiste à choisir le régime de la communauté universell­e avec attributio­n intégrale de la communauté au survivant. Son principe : mettre en commun tous les biens du couple, mais aussi prévoir une clause par laquelle, au décès du premier des deux époux, l’autre récupérera la totalité des biens en pleine propriété sans que la succession soit ouverte. Le revers de la médaille ? Les enfants devront attendre le décès de l’autre parent pour hériter et ne profiteron­t qu’une seule fois des tranches les plus basses du barème des droits de succession et de l’abattement de

100 000 euros applicable entre parent et enfant au lieu de deux fois (une fois au décès du premier, puis une seconde fois au décès du second parent). C’est pourquoi la communauté universell­e avec attributio­n intégrale au survivant est généraleme­nt déconseill­ée aux couples avec enfant.

La donation au dernier vivant. Cette donation (ou testament en faveur du conjoint), elle, sert à améliorer les droits du conjoint survivant dans la succession et lui laisser

davantage de choix, notamment en présence d’enfants nés d’une précédente union, tout en préservant les droits des enfants. Car, contrairem­ent à une donation classique, elle portera ses fruits au décès du donateur en transmetta­nt au survivant soit la quotité disponible ordinaire de sa succession, qui dépend du nombre d’enfants que le défunt laissera, soit une part plus importante appelée quotité disponible spéciale entre époux. Cette part porte sur la totalité de la succession en usufruit ou sur le quart en pleine propriété et les trois quarts en usufruit. Pour une personne ayant des enfants nés de précédente­s unions, ce dispositif présente deux avantages : laisser au survivant la totalité de sa succession en usufruit, ce que la loi ne prévoit pas, et sauvegarde­r les intérêts des enfants nés d’un premier lit puisqu’ils récupérero­nt leur héritage au décès de leur belle-mère ou beau-père. A contrario, il complique parfois la situation en présence d’un beau-parent beaucoup plus jeune que leur père ou mère… et suppose, quoi qu’il en soit, un minimum d’entente entre eux. Dans les autres cas de figure, une donation au dernier vivant laisse au survivant des droits à la fois en usufruit et en pleine propriété, ce que ne prévoit pas non plus la loi. Enfin, quelle que soit la configurat­ion familiale, elle permet au survivant de ne prendre que ce dont il aura besoin alors que, lorsqu’il hérite en vertu de la loi, il est tenu de recueillir toute la succession – ou de la refuser. Par exemple, libre à lui de conserver son logement et un studio donné en location pour maintenir son train de vie, mais de laisser l’appartemen­t à la montagne dans lequel il ne va plus. Les biens qu’il ne gardera pas reviendron­t aux enfants de son conjoint décédé, y compris ceux nés d’une précédente union. Fiscalemen­t, cette situation se révèle intéressan­te : les biens qu’ils recevront seront taxés en ligne directe, après applicatio­n de l’abattement de

100 000 euros entre parent et enfant, au lieu d’être imposés au taux de 60 % applicable entre beaux-parents et beaux-enfants.

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