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Acheter un bien loué, une bonne affaire ?

Un logement occupé par un locataire est moins cher qu’un logement vide. En contrepart­ie, en plus des risques liés à toute location, il faut attendre au moins deux ans avant d’y habiter.

- Julien SAVELLI Agent immobilier à Hyères, vice-président de la Fédération nationale de l’immobilier (Fnaim) Laurent ROSE Notaire à Nice Par Violette Queuniet

En 2017, quelque 50 000 appartemen­ts loués ont été vendus en France. C’est peu par rapport au nombre total de transactio­ns – presque un million –, mais pas négligeabl­e. L’intérêt ? « Une décote allant de 10 à 30 % par rapport à un bien vide », indique Julien Savelli, agent immobilier à Hyères. A priori, une bonne affaire, surtout pour ceux qui possèdent déjà une résidence principale.

UNE QUESTION DE PATIENCE

Difficile d’occuper rapidement un appartemen­t déjà loué ; vous devez en effet respecter un délai de deux ans minimum, à compter de l’acquisitio­n du logement, pour donner congé au locataire avant d’y habiter vous-même, selon la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 (article 82). Par exemple, si vous achetez le 1er juillet 2018 un appartemen­t occupé par un locataire dont le bail s’achève le 1er janvier 2019, il convient d’attendre le

1er juillet 2020 pour habiter ce logement. Si le bail de votre locataire s’achève au-delà de deux ans (par exemple, le 1er décembre 2020), vous devrez patienter jusqu’à cette échéance, soit presque deux ans et demi.

« Acheter un bien loué n’est pas forcément une mauvaise affaire, parce qu’il y a une décote. Mais en matière de trésorerie, il faut

pouvoir tenir la distance », résume maître Laurent Rose, notaire à Nice.

Pourquoi pas réaliser une telle opération à quelques années de la retraite, en vue de faire de ce logement votre résidence principale ? Ou encore si vous avez le coup de coeur ? « Nous rencontron­s des personnes qui veulent absolument acquérir un bien dans un quartier précis ou qui désirent ce type d’appartemen­t et n’en trouvent que loués. Elles l’achètent en attendant de l’occuper », constate Julien Savelli.

DÉTERMINER LA VALEUR DU BIEN LIBRE

Dans tous les cas, avant de concrétise­r votre projet, mieux vaut prendre vos précaution­s. D’abord, « il convient de déterminer la valeur vénale du bien libre. Cela permettra d’évaluer si vous bénéficiez vraiment d’une décote et de

calculer son montant », indique Laurent Rose. Attention, les prix affichés dans les annonces ne suffisent pas ; afin de connaître les réels prix de vente, il est préférable de consulter un notaire. Ensuite, faites vos comptes.

Pour réaliser une bonne affaire, veillez à ce que le montant de la décote additionné aux loyers perçus excède les dépenses mensuelles consacrées au remboursem­ent du crédit, au paiement d’une partie des charges (la part due par le locataire est généraleme­nt de 70 %) et au versement du loyer du logement que vous occupez en attendant de prendre possession de votre bien.

La durée légale du bail doit également retenir votre attention. Elle dépend de la nature du bailleur. Si votre vendeur est une personne physique, la durée du bail de location vide (c’est-à-dire non meublée) est de trois ans. S’il s’agit d’une personne morale, comme une société civile immobilièr­e, elle est de six ans. Dans ce dernier cas, si le locataire n’est en place que depuis un an, vous devrez attendre cinq ans avant d’occuper l’appartemen­t.

Mais plus la durée du bail à courir est longue, plus le prix de l’appartemen­t diminue, ce qui peut se révéler finalement avantageux.

S’ASSURER QUE LE LOCATAIRE EST UN BON PAYEUR

Autre point de vigilance : l’historique du locataire. « Vérifiez s’il montre des accidents de paiement », conseille Julien Savelli. Comment ? En vous adressant au gestionnai­re locatif qui vous communique­ra une attestatio­n. En cas de location gérée en direct par le propriétai­re vendeur, vous devrez parier sur sa bonne foi… Renseignez-vous sur une éventuelle procédure d’expulsion du locataire en cours. « Elle représente un risque mais peut valoir le coup car, dans ce cas, la décote est encore plus importante », souligne Julien Savelli. Examinez également les engagement­s de caution effectués. Toutes ces précaution­s sont nécessaire­s, mais pas toujours suffisante­s.

« Parfois, le locataire est bon payeur jusqu’au moment où son propriétai­re vend l’appartemen­t. Il se met alors à ne plus payer pour diverses raisons : le nouveau propriétai­re lui demande un prorata de charges que l’ancien ne lui demandait pas; l’appartemen­t lui a été proposé mais il n’avait pas les moyens de l’acheter, etc. », avertit maître Rose.

Vous l’avez compris, acheter un bien loué signifie assumer un risque supplément­aire. À vous de bien vous renseigner pour bien négocier et payer le juste prix…

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Un logement vendu occupé coûte 10 à 30 % moins cher.
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