Arrêt maladie : vos droits et vos obligations
INDEMNISATION, CONTRÔLE MÉDICAL, RETOUR EN ENTREPRISE… UN ARRÊT DE TRAVAIL EST SOUMIS À DES FORMALITÉS QUE VOUS DEVEZ RESPECTER. CE QU’IL FAUT SAVOIR POUR ENTREPRENDRE LES BONNES DÉMARCHES.
À LA SURVENANCE DE L’ARRÊT
Courbatures et fièvre, dos bloqué… Impossible de vous rendre au travail aujourd’hui. Votre médecin traitant, généraliste ou spécialiste, vous délivre un arrêt de travail, si besoin est. Le même médecin, ou un autre, pourra prolonger l’arrêt initial, le cas échéant.
Dès lors, il faut avertir votre employeur de votre absence, sans délai et par tout moyen, sous peine d’être sanctionné.
Pour éviter tout contentieux ultérieur, David
Métin, avocat de salariés, préconise « un courriel avec accusé de réception ou un courrier
recommandé avec accusé de réception » plutôt qu’un simple coup de fil. Mais rien n’oblige à dévoiler la nature du problème de santé qui vous tient éloigné de votre lieu de travail. Dans les quarante-huit heures, vous devez adresser les volets 1 et 2 de votre certificat d’arrêt de travail à votre caisse d’assurance-maladie. Votre médecin peut aussi le lui transmettre par internet, grâce à votre carte Vitale. Vous devez envoyer le volet 3 à votre employeur, dans le même délai (ou éventuellement dans un délai prévu par votre convention collective). Attention, un retard peut supprimer ou réduire le versement des indemnités par l’assurancemaladie et votre employeur. Une blessure ou une hospitalisation d’urgence vous ont empêché de respecter ces délais? « Les cas de force majeure sont reconnus, assure David Métin, et peuvent être expliqués dans un courrier recommandé avec AR. »
Le montant des indemnités.
Pour percevoir des indemnités journalières de Sécurité sociale (IJSS), il faut avoir travaillé au moins 150 heures dans les trois mois précédant l’arrêt de travail ou cotisé sur un salaire au moins égal à 1015 fois le smic horaire (soit 10028,20 euros bruts en 2018) au cours des six mois précédents. Ces indemnités peuvent être versées pendant 360 jours appréciés sur une période de trois ans, ou pendant trois ans en cas d’affection de longue durée (ALD). Les IJSS sont égales à 50 % du salaire journalier et plafonnées en général à 44,34 euros en 2018. Elles peuvent être complétées par l’employeur (voir l’encadré).
PENDANT L’ARRÊT
L’arrêt suspend l’exécution du contrat de travail et rompt ainsi tout lien de subordination. L’employeur ne peut donc exiger aucune
contribution d’un salarié à l’activité de
l’entreprise. « Ce dernier peut refuser par exemple d’appeler des clients depuis chez lui, précise David Métin. À l’inverse, certains salariés demandent à continuer de travailler pour ne pas prendre de retard : l’employeur ou le supérieur hiérarchique doit s’y opposer. » Certains choisissent même de couper les accès au réseau professionnel, afin que cette obligation soit respectée. « Néanmoins, un salarié en arrêt est tenu de communiquer des codes d’accès à un serveur partagé, des informations nécessaires à la poursuite de l’activité d’un service, des dossiers… complète Laurent Beljean, avocat pour employeurs.
La jurisprudence considère un refus comme fautif car il contrevient à l’obligation de loyauté
vis-à-vis de l’employeur. » Quant aux outils de travail – voiture, ordinateur, smartphone –, un employeur peut demander à les récupérer durant l’arrêt, sauf s’ils sont utilisés également à titre personnel et qualifiés d’avantages en
nature. Par ailleurs, il vous est impossible d’exercer grand nombre d’activités, rémunérées ou non. Une jurisprudence de la Sécurité sociale de 2017 élargit le champ des interdictions à toute occupation « non expressément admise par le médecin du travail », comme des activités de conseiller municipal et associatives. Les IJSS peuvent alors être supprimées. Du côté de l’employeur, et pour les juridictions prud’homales, il ne s’agit pas forcément d’une faute autorisant un blâme ou un licenciement. « Là encore, c’est la question de l’obligation de loyauté qui sera posée », précise David Métin.
Les sorties: interdites ou autorisées
Dans le cadre d’un arrêt de travail, les sorties peuvent être interdites ou autorisées par votre médecin. Dans ce dernier cas, des horaires obligatoires de présence au domicile entre
9 h et 11 h et entre 14 h et 16 h doivent être respectés, y compris les week-ends et jours fériés. Par exception justifiée médicalement, votre médecin peut vous permettre de sortir de votre domicile sans restriction : il s’agit dans ce cas de « sorties libres », et plus seulement de « sorties autorisées ». Impossible néanmoins de quitter votre département, pour quelques jours au vert ou pour des raisons familiales sans prévenir votre caisse d’assurance maladie (CPAM) et obtenir son accord (sous quinze jours).
Celle-ci est habilitée à réaliser des contrôles à votre domicile aux horaires de présence prévus par l’arrêt. Elle peut aussi convoquer le salarié en arrêt. De son côté, l’employeur peut demander à une société spécialisée
de contrôler son salarié s’il lui verse une indemnité complémentaire. En cas de nonprésentation à la convocation de la CPAM, d’absence au domicile aux horaires prévus, d’arrêt non justifié, l’assurance-maladie peut réduire ou arrêter le versement des
IJSS. Voire, après convocation, demander une reprise du travail. En cas de désaccord, vous pouvez demander à bénéficier d’une expertise médicale. De la même façon, l’employeur peut suspendre l’indemnité complémentaire. Mais il n’est pas autorisé à prendre d’autres sanctions, comme un blâme ou un licenciement.
AU RETOUR DU SALARIÉ
Au terme d’un arrêt de trente jours ou plus, une visite médicale est obligatoirement assurée par la médecine du travail, au moins huit jours avant la reprise. Le médecin du travail délivre un avis d’aptitude au poste ou un avis d’aptitude avec réserves pour lesquelles il demande des adaptations du poste, ou encore il envisage un reclassement. Un temps partiel thérapeutique, demandé par le médecin traitant, accepté par le médecin du travail et discuté avec l’employeur, peut être mis en place. Il est partiellement pris en charge par l’assurance-maladie. « Le télétravail pour motif thérapeutique est de plus en plus prescrit,
signale David Métin, notamment dans les cas d’arrêts liés au harcèlement moral ou à un burn-out. Mais pour que la mesure s’applique, il faut que l’entreprise dispose d’un accord collectif qui cadre l’exercice du télétravail. »
LICENCIEMENT : POSSIBLE MAIS ENCADRÉ
L’état de santé ne peut être la cause d’un licenciement, qui sera jugé discriminatoire. « La jurisprudence définit plutôt des conséquences de l’état de santé sur le
fonctionnement de l’entreprise », explique Laurent Beljean. L’employeur qui veut se séparer d’un salarié en raison de ses arrêts doit démontrer les perturbations liées à son absence sur le fonctionnement de l’entreprise ou, depuis une jurisprudence de l’année dernière, sur le fonctionnement d’un « service essentiel » pour l’entreprise.
Il doit aussi procéder à un recrutement en contrat à durée indéterminée à une date proche du licenciement, sur le même poste. En cas d’inaptitude au poste constatée par le médecin du travail, l’employeur doit justifier de son impossibilité à reclasser le salarié.
Attention, une faute grave peut être imputée au salarié en arrêt qui n’aurait pas respecté ses obligations de loyauté, par exemple en travaillant pour un concurrent, ou qui aurait négligé de prévenir de ses absences pour raison de santé. Enfin, en cas de motif économique, un salarié en arrêt peut être licencié au même titre que les autres salariés présents dans l’entreprise.