Emprunter après 60 ans, c’est possible
ACTIFS OU RETRAITÉS, DE PLUS EN PLUS DE SENIORS RECOURENT AU CRÉDIT POUR FINANCER LEURS PROJETS. RESTE UN OBSTACLE À FRANCHIR: TROUVER UNE ASSURANCE DE PRÊT POUR LES CRÉDITS IMMOBILIERS.
Non, la vie ne s’arrête pas une fois la soixantaine atteinte. Bien au contraire, les seniors multiplient les projets, et même les accélèrent : acquisition d’une résidence secondaire pour réunir la famille, nouveau logement mieux adapté au futur grand âge (avec ascenseur ou de plain-pied, douche à l’italienne, etc.), investissement immobilier qui enrichit le patrimoine ou aide les enfants… Afin de
transformer ces désirs en réalité, un coup de pouce financier est souvent nécessaire. Nombre de Français pensent, à tort, que passé un certain âge, il n’est plus possible d’emprunter. Les banques octroient des prêts aux seniors et le font même de plus en plus fréquemment. Chez le courtier La Centrale de financement, par exemple, les 55-65 ans représentent près de 10 % des dossiers suivis, soit une augmentation de 10 % en deux ans.
DES ARGUMENTS QUI SÉDUISENT LES BANQUES
Beaucoup de soixantenaires bénéficient d’un pouvoir d’achat confortable et stable – fini le risque de chômage, notamment – et d’une capacité de remboursement non négligeable dans la mesure où le prêt immobilier de leur logement a souvent été totalement remboursé. Ils ont aussi des économies. « Or, à l’heure où les taux de crédit restent faibles, notamment les crédits immobiliers, mieux vaut emprunter que de piocher dans son assurance-vie ou dans d’autres produits d’épargne, dit Philippe Taboret, directeur général adjoint de la société de courtage en prêts Cafpi. Et ce, même si les rendements des placements sont aujourd’hui un peu décevants, car il faut tabler sur de meilleurs résultats dans les années à venir. » Des petits crédits à la consommation comme des crédits immobiliers plus importants sont donc accordés aux seniors tant qu’ils restent assurables.
PAS D’EMPRUNT IMMOBILIER SANS ASSURANCE DE PRÊT
En matière de crédit immobilier, c’est l’assurance emprunteur qui risque de poser des difficultés aux candidats les plus âgés. « Avant de se lancer dans un projet d’acquisition nécessitant
un financement extérieur, la première chose à faire est de vérifier si l’on est assurable et à
quel prix », prévient d’emblée Philippe Taboret. Généralement, les assureurs couvrent les prêts immobiliers jusqu’aux 85 ans de l’emprunteur. À 60 ans, on peut donc espérer un crédit sur vingt-cinq ans et à 75 ans, un crédit sur dix ans. L’assurance crédit immobilier obligatoire couvre systématiquement trois risques : décès, invalidité et incapacité de travail. Pour la perte d’activité (chômage), on choisit de s’assurer ou non. Il va sans dire qu’à la retraite, les couvertures incapacité de travail et perte d’activité sont inutiles. Si on est encore actif, l’assurance chômage cesse d’être nécessaire à partir de 60 ans puisqu’un salarié remercié
à cet âge bénéficie d’une couverture par
Pôle emploi plus longue, permettant souvent de faire la jonction avec la mise en place des droits à la retraite.
SURCOÛT ET QUESTIONNAIRE MÉDICAL APPROFONDI
Malgré une couverture moindre (décès et invalidité seulement), compte tenu des risques de santé accrus, l’assurance de prêt immobilier des seniors reste chère. À 60 ans, elle peut augmenter le taux de crédit de 1 % du capital emprunté, contre 0,15 à 0,20 % entre 28 et 30 ans ou 0,35 % à 0,40 % pour les moins de 50 ans. Jusqu’à 60 ans et jusqu’à 200 000 euros empruntés, l’assureur se contente des réponses du client à un simple questionnaire sur son état de santé.
Pour des sommes supérieures ou pour un âge plus avancé, il appliquera une procédure plus invasive, avec un formulaire d’une cinquantaine de questions, voire un examen médical poussé, avec prise de sang, pratiqué dans un cabinet agréé par ses soins. En cas de graves ennuis de santé, la convention Aeras permet de garder sous silence certaines pathologies graves mais guéries ou d’éviter les surprimes, alors qu’auparavant elles empêchaient totalement d’être assurés, donc d’emprunter (voir encadré ci-dessous). Des associations de malades aident également à trouver des solutions en cas de refus d’assurance par les circuits traditionnels (France-assos-santé.org et 01 53 62 40 30).
DES CRÉDITS DE COURTE DURÉE À BON TAUX
Les seniors, comme les plus jeunes, peuvent, profiter aujourd’hui de taux de crédit très attractifs, à 1 % hors assurance, par
exemple. D’autant plus qu’ils empruntent généralement sur des durées plus courtes. En effet, plus on emprunte sur de longues durées, plus le taux monte. Et parce qu’à cette période de la vie il n’est pas rare que les seniors aient des produits d’épargne et que leur capacité de remboursement soit confortable – en fin de carrière, notamment pour les fonctionnaires, les salaires sont au maximum –, ils ont par ailleurs, une capacité de négociation avec leur banquier plus importante. « Attention, cependant, les taux étant très bas, à 1 % par exemple, il est difficile, voire impossible à l’heure actuelle, de négocier les frais de dossier qui s’élèvent généralement à 1 % de l’emprunt, avec des plafonds variables selon les établissements, entre 550 euros et 1 000 euros », prévient Philippe Taboret.
DES PRÊTS SUR MESURE
Les seniors peuvent adosser leur prêt à un produit financier, comme une assurancevie, ce qui leur permet d’éviter les frais d’hypothèque, soit 2 à 2,5 %, économisant ainsi 2 000 à 2 500 euros pour un prêt de
100 000 euros. En contrepartie, le placement étant gagé, ils ne pourront pas y toucher avant la fin du remboursement, en tout cas pas à l’équivalent de la somme restant à rembourser. Les seniors qui empruntent à 60 ans, alors qu’ils perçoivent encore des ressources de leur travail, peuvent demander à moduler leur prêt, avec des mensualités plus fortes au début et moins élevées au moment de la retraite. « Tout est négociable, explique Philippe Taboret. Un crédit avec deux paliers, voire trois, est tout à fait envisageable. »