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Confier la société à l’un de ses enfants de son vivant

Vous décidez de préparer votre succession en donnant sans attendre votre société ou votre entreprise individuel­le à l’un de vos enfants. Nos conseils pour réussir cette opération.

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L’ÉCUEIL À ÉVITER

Si vous n’anticipez pas la transmissi­on, l’enfant à qui vous destinez l’entreprise devra acquitter des droits de succession importants à votre décès. La donation associée à d’autres dispositif­s fiscaux fait considérab­lement baisser la note et garantit la pérennité de l’entreprise. Veillez cependant à ne pas vous démunir au moment de la retraite, surtout si l’entreprise est votre bien principal.

LES SOLUTIONS

Le pacte Dutreil. Du nom du ministre du Commerce qui l’a fait voter en 2003, ce dispositif facilite la transmissi­on des entreprise­s familiales grâce à un abattement de 75 % sur la valeur taxable, lors d’une donation.

« Cet avantage est tellement important qu’il est indispensa­ble de le proposer aux dirigeants d’une entreprise individuel­le ou d’une société », estime David Mennetret, notaire et conseil d’entreprise, président de l’institut notarial des entreprise­s et des sociétés. Quatre conditions sont nécessaire­s :

1. Vous devez détenir votre entreprise depuis au moins deux ans. Dans le cas d’une société, l’engagement de conservati­on des titres, de deux ans également, doit porter sur au moins 17 % des droits financiers et 34 % des droits de vote. Il doit être écrit et signé avec le ou les autres associés, d’où son nom d’engagement collectif. À noter : la loi de finances 2019 autorise l’engagement collectif pour une société unipersonn­elle (ou pour une EURL).

2. Votre héritier, ou chacun d’eux, doit s’engager à conserver l’entreprise ou les titres de la société pendant au moins quatre ans. C’est l’engagement individuel.

3. Le signataire, ou l’un des signataire­s, de l’engagement individuel doit exercer une fonction de direction de l’entreprise durant les trois années suivant la transmissi­on.

4. Deux attestatio­ns doivent être adressées à l’administra­tion fiscale, l’une établie le jour de la donation, l’autre au terme des obligation­s de détention, soit six ans après la donation (pour les sociétés). Ce n’est pas une simple formalité : « Un oubli remet en cause la totalité de l’avantage fiscal », selon David Mennetret.

La donation simple. Si la valeur de votre entreprise est assez élevée, vous pouvez en plus effectuer une donation simple. En effet, l’abattement consenti pour une donation à un enfant (100 000 euros) se cumule avec l’abattement de 75 % du pacte Dutreil.

Exemple : Votre entreprise est estimée à un montant de 500 000 euros.

Base taxable après l’abattement Dutreil :

125 000 euros.

Base taxable après l’abattement relatif à la donation : 125 000 € − 100 000 € =

25 000 €.

Droits de succession à payer (20 % pour un enfant) : 25 000 € × 0,20 = 5 000 €.

Droits à payer après avoir soustrait 1 806 € portant sur la tranche comprise entre

15 932 € et 552 324 € :

5 000 € − 1 806 € = 3 194 €.

Si vous avez moins de 70 ans et que vous transmette­z l’entreprise en pleine propriété, votre enfant bénéficie d’une réduction de 50 % des droits de donation. Au bout du compte, ils s’élèveront donc à 1 597 euros.

La donation combinée à la vente. En présence de plusieurs enfants, et si vous disposez de plusieurs biens, vous pouvez effectuer plusieurs donations, par exemple,

BON À SAVOIR // Si vous décédez avant d’avoir conclu le pacte Dutreil, l’engagement collectif peut être considéré comme réputé acquis. Votre enfant signe alors un engagement individuel de conservati­on de l’entreprise ou des titres, pour une durée de quatre ans.

l’entreprise à l’un, un appartemen­t à l’autre. Que faire si leur valeur diffère ? « Le donateur vend la moitié de l’entreprise à l’enfant qui la reprend, distribue le produit de la vente à l’autre héritier et donne la moitié de l’entreprise à l’enfant qui la reprend », explique Olivier Nioche, directeur de la région Grand-ouest chez Grant Thornton, président de l’ordre des experts-comptables de la région Centre. S’il s’agit d’une entreprise individuel­le, celle-ci n’est pas divisible : au préalable, il sera nécessaire de la transforme­r en société.

Attention, en cas de donation simple, chaque bien attribué est réévalué au moment de la succession. Il peut donc être préférable de faire une donation-partage (voir p. 70). La donation combinée à la vente peut également être envisagée, même sans autres enfants, pour vous assurer des revenus à votre retraite si celle-ci n’est pas suffisante.

La donation en nue-propriété. Donner à votre enfant la nue-propriété de l’entreprise et garder l’usufruit est un autre moyen de vous préserver. À condition, bien sûr, que le chiffre d’affaires soit suffisant pour assurer à la fois vos revenus et ceux de votre enfant. Cette opération nécessite un démembreme­nt, effectué par un acte notarial. Elle n’est pas possible pour une entreprise individuel­le, à moins de la transforme­r en société.

Combinée à un pacte Dutreil, elle se révèle très avantageus­e car l’abattement de 75 % s’applique sur la valeur de l’entreprise en nue-propriété, moindre qu’en pleine propriété.

Exemple : Votre entreprise est estimée avoir une valeur de 500 000 euros.

Vous avez moins de 71 ans, l’abattement pour usufruit est de 40 %. La valeur en nue-propriété s’élève donc à 300 000 euros. Base taxable après abattement Dutreil :

300 000 € − (300 000 € × 0,75) = 75 000 €. Base taxable après abattement donation : 75 000 € − 100 000 € = − 25 000 €. Le démembreme­nt prend fin à votre décès. À ce moment-là, le nu-propriétai­re devient le propriétai­re de l’entreprise, sans droits de succession à payer et libre de la vendre.

LES PRÉCAUTION­S À PRENDRE

Reprendre les rênes d’une entreprise ne s’improvise pas. Il faut prendre le temps d’y préparer votre enfant.

COMBIEN ÇA COÛTE ?

Les honoraires pour l’établissem­ent d’un pacte Dutreil sont libres. Ils varient de 1 000 euros à plusieurs milliers d’euros en fonction de la prestation (simple rédaction d’acte jusqu’à évaluation de l’entreprise et validation). Le coût d’une donation est de 1,5 % en moyenne de la valeur du bien.

À QUEL ÂGE S’EN PRÉOCCUPER ?

De l’avis des experts-comptables, le bon moment est cinq ans avant le départ envisagé du chef d’entreprise.

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