Quitter la ville pour la campagne : réussir son installation
POLLUTION, STRESS, TRANSPORTS, CHERTÉ DES LOGEMENTS… LES RAISONS DE CHANGER DE LIEU DE VIE NE MANQUENT PAS. NOMBREUX SONT LES CITADINS À FRANCHIR LE PAS. PASSEZ DU GRIS AU VERT EN ÉVITANT LES GALÈRES.
VOTRE PROJET EST-IL COMPATIBLE AVEC VOTRE DESTINATION ?
Avant de déménager, vérifiez que votre projet professionnel est en adéquation avec votre future implantation géographique, qu’elle résulte d’un coup de coeur ou d’un retour aux sources. « Dans le Gers, nous accueillons de nombreux consultants venus chercher une meilleure qualité de vie. Mais, pour décrocher des contrats, ils doivent se déplacer souvent à Toulouse, le bassin local n’offrant pas assez de débouchés », explique Audrey Fievet, animatrice du réseau Soho Solo Gers à la chambre de commerce et d’industrie (CCI) du Gers. À l’inverse, les indépendants, dont le travail ne nécessite pas ou peu de contacts avec le client (webmasters, graphistes, auteurs, informaticiens…), ont des spécificités parfaitement compatibles avec un écosystème comme le Gers. Mais, attention, « au-delà du projet professionnel, quitter la ville pour la campagne est un projet de vie à part entière », poursuit-elle. « Vivre à la campagne, c’est prendre plus souvent la voiture, mettre des bottes et rentrer son bois… On change de travail mais aussi de mode de vie », confirme Mariebéatrice Venturini-lenoir, chef du service Mission accueil Allier.
QUELLES SONT LES OPPORTUNITÉS À SAISIR EN CE MOMENT ?
Chaque région a ses particularités mais certains métiers sont très demandés dans de nombreuses zones rurales. Ce sont ceux de la santé (médecins généralistes et spécialistes…), ceux de l”artisanat, les petits commerces en quête d’un repreneur (boulangerie, cafés-bars, etc.)
« Dans le Gers, nous manquons cruellement de médecins, de techniciens de maintenance et de commerçants prêts à reprendre un point de vente », précise Audrey Fievet. Même constat dans l’allier, où « un chef d’entreprise sur deux doit être remplacé et de nombreuses offres d’emploi restent non pourvues, notamment dans l’industrie automobile et le BTP. Le secteur de la restauration rencontre également des dificultés », ajoute Mariebéatrice Venturini-lenoir.
81 % des Français pensent que vivre à la campagne représente la vie idéale. Source : sondage Ifop pour Familles rurales, 2018.
QUEL BUDGET PRÉVOIR ?
L’une des raisons qui pousse de nombreux citadins à s’installer à la campagne est le prix des loyers ou du mètre carré. « Dans l’allier, on a de très belles maisons à 300000 euros », avance Marie-béatrice Venturini-lenoir.
« Se loger en milieu rural n’est pas un problème. En outre, le budget global du ménage a plutôt tendance à diminuer car on adopte un mode de vie plus simple », complète Hélène Picot, coach en reconversion. Seul poste de dépense qui risque d’exploser, celui du transport. Une seconde voiture est souvent nécessaire et, avec des enfants, les frais d’essence grimpent vite. Pour les subventions, c’est la région, plus que les départements, qui, depuis la loi NOTRE (nouvelle organisation territoriale de la République), tient les cordons de la bourse.
En se connectant sur le portail de sa région, on trouvera toutes les informations en rapport avec les appels à projets (avec soutien financier) et les aides. Selon le secteur d’activité,
les porteurs de projet pourront également s’adresser aux chambres de commerce et d’industrie régionales et territoriales (Cci.fr), aux chambres des métiers et de l’artisanat (Artisanat.fr) ou les chambres d’agriculture (Chambres-agriculture.fr).
La plupart des départements ruraux ont créé des structures destinées à l’accueil des nouveaux arrivants, en particulier des citadins en reconversion susceptibles d’apporter savoir-faire et moyens financiers. La responsable de la Mission accueil Allier explique son rôle : « Nous sommes à l’écoute du porteur de projet et du porteur d’idée.
Le premier a déjà un plan précis. Nous l’aidons à élaborer son dossier, pour une demande d’aides, pour son installation. Le second a besoin de conseils pour mûrir son projet. »
COMMENT RÉUSSIR SON INTÉGRATION SOCIALE ?
On a beau rechercher le silence de la campagne, il peut rapidement devenir pesant… Pour y échapper, mieux vaut être entreprenant, s’intéresser aux autres, s’impliquer dans la vie du village. Les associations et les réseaux professionnels locaux constituent une bonne façon de nouer des liens sans se montrer importun. « De nombreuses localités ouvrent des espaces de coworking qui rompent l’isolement des travailleurs indépendants », observe la coach Hélène Picot, par exemple le Village Mutinerie (Village.mutinerie.org), à Saint-victorde-buthon, dans le Perche.
QUELS SONT LES ÉCUEILS ?
Le porteur de projet n’est pas à l’abri d’un imprévu: c’est l’agriculteur confronté à la sécheresse l’année de son installation, le commerce concurrencé par une grande surface, le marché prometteur qui ne l’est plus car les attentes des clients ont évolué, etc. Un porteur de projet peut aussi avoir du mal à transformer l’essai sur le terrain. « Pour un commerçant qui travaille avec une clientèle, il y a une alchimie relationnelle qui peut ne pas se faire, prévient Marie-béatrice Venturini-lenoir. Autre difficulté, la pluralité des compétences requises. Le cas typique, c’est l’excellent cuisinier qui ouvre son restaurant mais qui se révèle piètre gestionnaire. » Enfin, le problème vient parfois de l’infrastructure : connexion internet défaillante ou ligne SNCF qui ferme, « une vraie catastrophe », selon Hélène Picot. Pour autant, faut-il une solution de repli? Hélène Picot est formelle : « Non, car prévoir un plan B, c’est ne pas mettre toute son énergie au service du plan A. Il ne faut pas céder au moindre obstacle. »
Et des obstacles, il y en aura. L’herbe est peutêtre plus verte ailleurs… mais elle se mérite.