Vivre avec un parent chez soi, un véritable engagement.
VOUS SOUHAITEZ HÉBERGER L’UN DE VOS PARENTS OU GRANDS-PARENTS EN PERTE D’AUTONOMIE POUR LUI ÉVITER LA MAISON DE RETRAITE ? CETTE DÉCISION NE SE PREND PAS À LA LÉGÈRE. CONSEILS.
MESURER TOUS LES IMPACTS DE CE PROJET
Un tel changement se discute avec la personne âgée, la famille qui cohabitera avec elle et le reste de la fratrie. Pour aider le parent ou grandparent à l’accepter, dites-lui que « cette solution est envisagée avant tout pour son bien, sa sécurité. Mais aussi, pour le valoriser, faites-lui sentir qu’on prendra en compte son avis et ses habitudes », suggère la psychologue clinicienne Gaëlle Guénan.
Un conseil de famille s’impose souvent pour clarifier les conséquences du projet et éviter plus tard d’éventuelles accusations concernant les questions d’argent. « On peut au besoin faire appel à des médiateurs extérieurs, comme le médecin de famille ou encore un médiateur familial. L’objectif est de passer en revue, avec la personne concernée, tous les impacts du choix de logement : budget, organisation, vie sociale, santé, disponibilité de ceux qui souhaitent l’accueillir, proche qui pourra prendre le relais en cas d’absence… », détaille Annie de Vivie, gérontologue membre du collectif Je t’aide et fondatrice du média Agevillage. Ce conseil de
famille doit « se tenir régulièrement pour évaluer la situation en toute transparence, mettre les choses par écrit et anticiper en parlant d’autres solutions. »
Autre recommandation : projetez-vous ensemble dans cette future organisation qui bouleversera le quotidien de toute la famille. « Prenez en compte les conséquences sur la vie de chacun de ses membres. Ce changement doit être acceptable pour eux tandis que la personne accueillie, elle, ne doit pas avoir l’impression d’être une contrainte, prévient Dominique Villa, directeur général de
l’association d’aide à domicile Aid’aisne. La culture et les habitudes du proche âgé n’étant pas forcément les mêmes que celles de la famille, il faudra réfléchir à l’organisation du quotidien, comme l’heure des repas ou le choix des programmes télévisés, par exemple. »
ADAPTER LE LOGEMENT
Une fois le projet discuté, le moment est venu de réfléchir aux équipements dont la personne âgée devra disposer chez vous pour préserver
sa sécurité. Pour cela, vous pouvez faire appel à l’expertise du réseau d’associations Soliha (Solidaires pour l’habitat) si le senior accueilli y est éligible financièrement (les critères varient selon le département, mais sont souvent similaires aux barèmes de L’ANAH). Une conseillère calculera les aides les plus avantageuses auxquelles vous avez droit, et un professionnel de Soliha se rendra à votre domicile pour évaluer les besoins. Douches et toilettes adaptées, monte-escalier, main courante… «Nous faisons un état des lieux du logement et des difficultés qui peuvent être rencontrées. On pense d’abord à la salle de bains, mais d’autres endroits comme les escaliers ou le chemin emprunté la nuit pour aller aux toilettes peuvent parfois être dangereux », constate Blandine Tulasne, ergothérapeute à Soliha Isère Savoie. Ensuite, à vous de choisir un artisan pour la réalisation des travaux (il n’est pas possible de les faire soi-même). « L’équipe de Soliha vérifie le devis pour s’assurer que les aménagements correspondent à vos souhaits et que les prix sont corrects », précise l’experte. Attention, pour bénéficier d’éventuelles subventions, vos demandes doivent être déposées et acceptées par les financeurs avant le début du chantier. En résumé, anticipez-le de plusieurs mois !
PRÉSERVER L’AUTONOMIE DU PROCHE
Au-delà des travaux, il faudra essayer de recréer un chez-soi pour la personne âgée.
« On peut reprendre quelques éléments de son ancien environnement (table de chevet, commode, décoration…) pour qu’elle s’approprie mieux le nouveau et garde des repères », explique Gaëlle Guénan. Délimiter un espace propre à la personne est primordial pour qu’elle préserve son intimité et se ressource.
Pour continuer à « ce qu’elle garde une estime de soi, il est aussi important de considérer les potentialités de la personne, voir ce qu’elle est capable et/ou a envie de faire », ajoute
Dominique Villa. Les projets peuvent être simples : aller au marché, acheter le journal, choisir un bouquet de fleurs, revoir ses amis, mettre en marche la cafetière…, « l’objectif étant qu’elle ne se sente pas en échec », souligne Gaëlle Guénan. « Le logement ne doit pas se transformer en huis clos », résume Annie de Vivie, autrice du livre J’aide mon parent à vieillir debout.
S’ENTOURER DE PROFESSIONNELS
Ce n’est pas parce que vous avez décidé de vous occuper de votre parent ou grand-parent que vous devez tout mener de front. Aide à domicile, infirmière, psychologue, femme de ménage, kinésithérapeute, orthophoniste, auxiliaire de vie… Faites appel à des professionnels les plus adaptés au profil de la personne âgée et de votre famille pour éviter que l’accueil de votre proche ne constitue une charge trop lourde à porter. C’est essentiel « pour garder les bons moments, se préserver », explique Gaëlle Guénan. Par exemple, n’hésitez pas, le cas échéant, à solliciter une aide à domicile pour faire la toilette de votre parent. « Certains aidants préfèrent déléguer cette tâche quand le parent se sent mal à l’aise », rapporte l’ergothérapeute
Blandine Tulasne.
Si vous en avez les compétences, ou l’envie de vous former, rien ne vous empêche, bien sûr, de prendre à votre charge votre proche âgé, y compris de vous occuper de sa toilette. Mais comme les besoins de ce dernier évoluent, le risque est de vous
sentir dépassé. « D’où l’idée d’évaluer très régulièrement la situation, dès les six premiers mois, et de tricoter un réseau d’aides autour de votre proche pour anticiper et bénéficier de regards extérieurs », préconise Annie de Vivie.
Sachez que « le rôle de l’aide à domicile est très large : toilette, habillage, prises de repas, courses, entretien… Il ou elle peut donner des conseils sur l’alimentation ou encore
l’aménagement du domicile », explique Dominique Villa. Les services d’aide à domicile proposent de prendre le relais lors de vos absences ou vacances. Pensez aussi aux associations de soutien entre personnes aidantes. Présentes au niveau national ou local, elles organisent notamment des groupes de parole. Y participer est un bon moyen de ne pas s’isoler et de profiter des conseils de gens qui vivent la même situation.