Les marchés boursiers
sont globalement orientés à la baisse depuis le 1er janvier 2016. de nombreuses craintes persistent. les investisseurs particuliers ne doivent pas céder à la panique et privilégier les secteurs les plus solides pour délaisser les plus incertains, comme le
Depuis le début de l’année, rien ne va plus. L’indice phare de la Bourse de Paris, le CAC 40, a dégringolé jusqu’à faire irruption à plusieurs reprises sous la barre des 4.000 points. Le manque de confiance des investisseurs est patent. Après une année 2015 en dents de scie, mais qui a néanmoins vu le CAC 40 évoluer au-dessus des 5.000 points au printemps et pendant une bonne partie de l’été, 2016 s’annonce très incertain. Plusieurs experts s’accordent à dire que les marchés pourraient remonter au deuxième semestre. Mais la tempête ne semble pour le moment pas terminée. Si le CAC 40 a progressé de 8,53% au total l’an passé, il s’affiche à la clôture de la Bourse, le 26 février 2016, en baisse de près de 7% depuis le 31 décembre 2015. Face à une telle évolution, quelle attitude les investisseurs particuliers doivent-ils adopter ?
DES CRAINTES en PARTIE IRRATIONNELLES
Dans ce genre de circonstances, la première chose à faire est de ne pas céder à la panique. Et donc de ne pas vendre toutes ses actions si vous en possédez déjà. D’autant que « les craintes actuelles sont en partie irrationnelles » , estime Christopher Dembik. Selon l’économiste qui travaille pour la banque d’investissement Saxo Bank, « nous ne sommes pas dans une crise systémique ». La configuration n’est pas la même qu’en 2008, lorsque les marchés mondiaux subissaient la crise des subprimes. Si des risques pèsent aujourd’hui sur les marchés, comme la récession économique de la Chine ou la chute des cours du pétrole autour de 30 dollars le baril de Brent, ils peuvent être relativisés. Interprétée comme le prélude d’un fort ralentissement de la croissance mondiale, la baisse des prix du pétrole est néanmoins favorable aux entreprises consommatrices de matières premières, comme les compagnies aériennes. En outre, « le passé récent fait croire que le prix normal du baril se situe autour de 100 dollars, souligne Paul Jackson, économiste britannique chez le gestionnaire d’actifs Source. Mais si on regarde sur le long terme, ce n’est pas le cas » , ajoute-t-il. Il n’y a donc pas de raison de s’inquiéter selon lui. Quant à la Chine, les marchés européens ont fortement chuté en réagissant à la décélération de son économie. La croissance du pays a atteint en 2015 son rythme le plus faible depuis un quart de siècle, à 6,9%. Ce chiffre reste néanmoins élevé. Surtout, certaines valeurs
sont encore peu exposées à la deuxième économie mondiale et bénéficient d’autres sources de croissance.
le MARCHÉ européen possède le Meilleur potentiel
Les sociétés commercialisant des produits de luxe ne sont à ce titre pas un bon exemple. Il ne semble pas pertinent d’investir aujourd’hui dans ce secteur. C’est en tout cas l’avis de Christopher Dembik : « Le luxe est dans une période de transition. Il s’est beaucoup trop concentré sur le marché chinois qui est en phase de ralentissement et il a délaissé les consommateurs européens. Les résultats des entreprises de luxe sont encore bons mais ils devraient se dégrader de plus en plus. » À l’inverse, les valeurs européennes et françaises moins portées sur l’exportation et plus centrées sur l’europe présentent un potentiel intéressant, alors que la zone euro montre des signes de reprise. La croissance économique s’accélère très doucement. Elle s’est élevée à 1,1% en France en 2015 et à 1,5% dans l’ensemble de la zone. « D’un point de vue conjoncturel, l’europe est sans doute la zone la plus intéressante pour les investisseurs, par rapport à des pays émergents en pleine tourmente et un marché américain qui bénéficie d’une croissance solide mais qui est déjà très bien valorisé » , estime Jean-françois Bay, directeur général de Morningstar France, société d’analyse de performances de fonds. Selon lui, il vaut donc mieux éviter de « rentrer » sur les marchés émergents, qui sont dans une phase d’ajustement, et ne pas investir non plus dans des actions américaines ou en réduire la part au sein de son portefeuille. La situation risque de se compliquer en 2016 aux Etats-unis, la Réserve fédérale américaine (Fed) tendant à freiner sa politique accommodante mise en place suite à la crise des subprimes, avec la perspective d’une hausse de ses taux.
privilégier les valeurs OFFRANT De la VISIBILITÉ
Si les actions européennes apparaissent comme l’investissement le plus judicieux, encore faut-il bien choisir les titres d’entreprises. Les secteurs pétrolier et parapétrolier, auxquels appartiennent notamment les groupes Total et Technip, souffrent d’un grand manque de visibilité. « Il y a un risque de faillite très important qui peut affecter à long terme des valeurs cotées. C’est pourquoi je me désengagerais complètement de ce secteur » , conseille Christopher Dembik. La capacité à offrir de la visibilité sur les mois et années à venir est un facteur essentiel, sur lequel insiste également Jean-françois Bay. « Aujourd’hui, il est un peu trop tôt pour faire des paris sur les valeurs cycliques [très corrélées à la conjoncture économique, ndlr]. C’est beaucoup trop risqué et volatile. Dans un contexte difficile et une période de bouleversement, il y a une prime à la visibilité », considère-t-il. Le directeur général de Morningstar France préconise de placer ses deniers dans des sociétés disposant d’un avantage concurrentiel et d’un pricing power, autrement dit qui peuvent se permettre d’augmenter leurs prix sans perdre de clients du fait de leur position dominante sur le marché. Il suggère également de favoriser les entreprises qui évoluent dans un secteur avec des barrières à l’entrée (investissements lourds pour démarrer l’activité), telles que les groupes de télécommunications. Ainsi que des sociétés donc l’activité dépend de la signature de contrats. « Je préfère des groupes comme Airbus et Air Liquide qui ont des commandes pour dix ans » , indique Jean-françois Bay. En résumé, les investisseurs particuliers ont plutôt intérêt à miser sur des valeurs dites « défensives », c’est-à-dire moins dépendantes de l’évolution économique et donc moins soumises aux retournements de situation.
DES SECTEURS porteurs en 2016
La taille de l’entreprise importe peu, « tant qu’elle est sur un segment avec une barrière à l’entrée » , répète Jean-françois Bay. Le tonnelier Oeneo, numéro un mondial des bouchons dans le secteur du vin, constitue pour lui un bon exemple de mid cap (entreprise de valeur moyenne) dans laquelle les particuliers peuvent investir. « Je pense que les moyennes et petites valeurs
résisteront globalement mieux au contexte actuel, estime même Christopher Dembik. Elles vont évoluer plus en lien avec leurs bilans et les contrats signés que les valeurs du CAC 40. » Moins exposées à la conjoncture mondiale que les grands groupes, certaines de ces entreprises posséderaient un potentiel plus important. « Vous avez souvent de belles pépites dans les domaines de l’informatique et de l’internet, qui ne sont pas survalorisées » , ajoute l’économiste. Autres secteurs qui peuvent selon lui être porteurs en 2016 : les banques et l’automobile. « Le secteur bancaire me paraît sous-évalué. Il a été un peu victime des aléas italiens [craintes sur des créances douteuses] et allemands [craintes sur la capacité de la Deutsche Bank à payer ses dettes]. Or, les banques françaises devraient encore délivrer de bons chiffres en termes de rentabilité et de bénéfices cette année, » analyse Christopher Dembik. Enfin, le secteur automobile semble à ses yeux pertinent, dans la mesure où de nouveaux marchés s’ouvrent tels que l’iran, contrebalançant le ralentissement de l’économie chinoise.
DIVERSIFIER SON portefeuille
Dans un contexte de forte volatilité, il apparaît opportun de bien diversifier son portefeuille pour minimiser les risques de pertes. Outre le marché des actions, sur lequel peut s'opérer une première diversification en investissant dans plusieurs secteurs et dans des entreprises de différentes tailles, d'autres supports existent, potentiellement moins rémunérateurs, mais aussi moins risqués. Deux valeurs refuges s'offrent ainsi aux épargnants sur les marchés financiers : les dettes souveraines émises par les Etats et les banques centrales, c'est-à-dire les obligations, et l'or. Les obligations présentent aujourd'hui un rendement quasi-nul puisque que beaucoup d'etats empruntent à des taux négatifs. C'est pourquoi Paul Jackson pense qu'il est intéressant d'investir dans les dettes des pays émergents, comme l'inde ou le Brésil, qui présentent un plus grand risque de défaut de paiement mais qui peuvent offrir « un meilleur retour sur investissement sur cinq ou dix ans » . L'or possède quant à lui « un potentiel de hausse » , selon Christopher Dembik, qui y voit avant tout une valeur pour sécuriser ses avoirs sur le long terme. Enfin, l'économiste conseille de ne pas placer son argent uniquement sur les marchés financiers dans une période aussi incertaine. « L'immobilier en France reste une valeur sûre », rappelle-t-il.
DES INSTRUMENTS pour Se PRÉMUNIR
D'autres possibilités de diversification, plus complexes, permettent de continuer à investir dans les actions tout en se prémunissant en partie des risques liés à la baisse des cours de Bourse. Les fonds patrimoniaux représentent à ce titre un placement intéressant. Censés allier performance et protection du capital, ils ont l'avantage de s'adapter à l'évolution des marchés. Ces fonds « flexibles » reposent sur de nombreuses classes d'actifs, dont des actions et des obligations. Leur composition peut rapidement évoluer grâce à une gestion très souple. En revanche, ils ne bénéficient pas de l'abattement fiscal sur les plus-values pour durée de détention.
Enfin, les trackers (ou ETF) constituent un outil de diversification à part entière dans la mesure où ces fonds cotés, composés d'actions de multiples entreprises, reproduisent la performance d'indices boursiers comme le CAC 40. Au sein d'un plan d'épargne en actions (PEA), circonscrit aux titres européens, les trackers permettent également de diversifier géographiquement son placement. En effet, de nombreux ETF portant sur des indices d'autres régions du monde, en Chine ou Etats-unis par exemple, sont éligibles au PEA. Surtout, alors que les marchés financiers tendent à baisser, les trackers bear (baissiers) offrent la possibilité de suivre l'orientation inverse des indices sous-jacents. Les gains qu'ils rapportent peuvent alors compenser en partie la dépréciation d'un portefeuille d'actions. Ces instruments financiers s'avèrent toutefois moins intéressants en cas de remontée des cours. Reste à savoir comment évolueront les marchés en 2016 et dans les années à venir...