LES RÈGLES À RESPECTER POUR LOUER À SON ENFANT
Pour la rentrée universitaire, votre enfant va quitter le domicile familial. Si vous avez un bien dans la ville où il compte s’installer, il est tout à fait possible de le lui louer. A condition, toutefois, d’être en conformité avec la loi.
Louer un appartement à un membre de sa famille est parfaitement légal. Les propriétaires bailleurs ne sont cependant pas libres de loger un membre de leur famille durablement sans suivre un certain nombre de formalités. La première est de rédiger un contrat de location conforme au modèle de bailtype imposé par la loi pour les locations signées depuis le 1er août 2015. Ensuite, il est nécessaire de déterminer le montant du loyer, les modalités de son paiement et de celles pour la récupération des charges locatives. Comme pour toute location, il n’est pas obligatoire de passer par un professionnel pour conclure le bail. Dans cette situation, le recours à un agent immobilier semble peu approprié mais peut toutefois s'envisager lorsque le propriétaire est très éloigné du logement ou qu'il a déjà confié la gestion locative d'un ou de plusieurs biens à un professionnel. Ce dernier pourra alors se charger de contrôler le respect des obligations légales de location et traiter directement avec le locataire en cas de besoin.
LE FISC VEILLE
Pour éviter tout problème avec le fisc ou la justice, les propriétaires doivent se montrer attentifs au montant du loyer. A priori, un bailleur qui loue un logement à sa famille ne veut pas qu’il soit trop élevé... Mais attention, le fisc veille et peut lancer un redressement fiscal à votre encontre s'il juge le montant du loyer trop faible par rapport à la réalité du marché.
« Si par exemple, vous louez un grand studio à votre enfant à Paris pour 500 euros alors que les prix du marché avoisinent les 800 euros, l’administration fiscale pourra taxer vos revenus fonciers à hauteur de 800 euros par mois et non 500 euros », précise Rozenn Le Beller, notaire à Lanester dans le Morbihan avant d’ajouter : « LA solution peut être DE FAIRE payer uniquement 500 euros à votre enfant et de déclarer 800 Euros DE Loyers, CE qui SIGNIFIE que vous prenez à votre CHARGE LA DIFFÉRENCE DE 300 Euros ». Si l’administration fiscale est aussi attentive à ces pratiques, c’est que louer un logement à un enfant peut permettre au bailleur de réduire encore davantage l'impôt sur les revenus fonciers. Le mécanisme est simple. Si la location génère un faible loyer annuel mais que les charges déductibles des revenus fonciers comme les travaux ou la taxe foncière sont les mêmes que pour une location dite « classique », le propriétaire pourra éviter toute fiscalité sur le loyer perçu grâce à la déduction des charges. Mieux, il pourra utiliser ce moyen pour diminuer le montant de ses autres revenus fonciers imposables s'il met plusieurs logements en location. La location d’un logement à son enfant peut alors se transformer en un avantage fiscal très intéressant. Si cette pratique est détectée, le bailleur encourt une pénalité de 80% en cas d'abus de droit, c'est-à-dire si le bail de location est jugé fictif. Avant de mettre en place la location, il est conseillé de se renseigner auprès des agences immobilières, des sites en ligne de location ou encore des agences départementales d'information sur le logement (Adil) et des observatoires des loyers (Olap, Clameur…), afin de proposer un loyer proche de celui du marché sur le même secteur.
VIGILANCE POUR LES ALLOCATIONS LOGEMENTS
Un autre point d’attention pour réaliser une location à ses enfants dans les règles est l’allocation logement. Si par exemple un père loue un logement à sa fille, cette dernière ne pourra pas percevoir d’aides au logement, qu’il s’agisse de l’aide personnalisée au logement (APL), de l’allocation de logement familiale (ALF) ou encore de l’allocation de logement sociale (ALS). Cette interdiction vaut quel que soit le montant du loyer et les ressources de l’occupant.
LOCATION ET DÉFISCALISATION
Si la location relève d’un régime de défiscalisation de type Pinel ou Scellier, les règles sont encore plus strictes. Dans le cadre du dispositif Pinel qui ouvre le droit à une réduction d’impôt en fonction de la durée de détention, il est possible de louer son bien à son enfant sous certaines conditions. Le loyer doit être conforme aux plafonds imposés par la loi, le locataire doit être majeur, il ne peut pas toucher d’aides au logement, il ne doit pas être raccroché au foyer fiscal du bailleur et il ne doit pas percevoir de ressources supérieures à celles fixées par le dispositif. Si le bailleur a opté pour un dispositif Scellier libre, existant avant la loi Pinel, il est également possible de le louer à sa progéniture. Comme pour le Pinel, le locataire ne doit pas faire partie du foyer fiscal du bailleur. Les investissements en Scellier intermédiaire et social ne permettent pas la location intrafamiliale de même que ceux dits « Duflot ».
ANTICIPER LA SUCCESSION
Enfin, dans la liste des précautions à prendre, il est nécessaire de penser à la répartition équilibrée de votre patrimoine entre vos enfants. « SI VOTRE FILS OU VOTRE FILLE PROFITE D’UN LOYER PEU ÉLEVÉ ALORS QU’IL est étudiant, il est considéré que cette action répond à votre obligation alimentaire envers vos descendants », détaille la notaire. « Mais si cet avantage perdure pendant de nombreuses années alors que ce dernier travaille, cette location pourra se transformer en donation ». Au moment de la succession, les autres héritiers pourront demander que ce montant soit déduit de la part d’héritage qui revenait à l’enfant ayant bénéficié de cette location avantageuse. Le cadeau d’origine se transformant alors en mauvaise surprise…■
« le fisc peut lancer un redressement fiscal à votre encontre s'il juge le montant du loyer trop faible par rapport à la réalité du marché ».